«Edmond» d’Alexis Michalik au Palais-Royal: éternel succès?
«Edmond», d'Alexis Michalik, au Palais-Royal de Paris. ©Site web officiel du Palais-Royal

Sept nominations aux Molières en 2017, cinq récompenses, plus de 1.800 représentations, ce n’est pas par pur hasard que la pièce Edmond d'Alexis Michalik est jouée sans arrêt au Théâtre du Palais-Royal. Quelles seraient les clés de succès de cette pièce impérissable qui joue pour la 9e saison à guichet fermé?

Après le succès de ses pièces Le Porteur d’histoire et Le Cercle des illusionnistes, le dramaturge et metteur en scène Alexis Michalik signe avec Edmond une réussite théâtrale incontestable. La pièce obtient sept nominations aux Molières en 2017, dont meilleur spectacle de Théâtre privé, meilleure Comédie, meilleur Auteur francophone vivant et meilleur Metteur en scène d’un spectacle de Théâtre privé. La pièce est créée au Palais-Royal à Paris, en 2016. Elle joue actuellement pour la 9e saison à guichet fermé et est l’une de ses plus belles réussites autour de la création de Cyrano de Bergerac par Edmond Rostand.

Edmond, entre autres, propulse Alexis Michalik sur la scène des grands, lui, jeune talent français de la dramaturgie. On ne peut s’empêcher de voir se dessiner un frappant parallélisme avec l’auteur de Cyrano de Bergerac. En effet, Edmond Rostand a eu un succès immédiat avec Cyrano de Bergerac en 1897, sa pièce qui a traversé les siècles. Depuis ses premières pièces, Alexis Michalik a droit à des ovations et à un avis à l’unanimité de la critique. La déclaration d’amour au théâtre de Cyrano de Bergerac et d’Edmond fait partie intrinsèque de l’ADN de la pièce. Les deux pièces comportent aussi une mise en abyme; l’une dans son exposition du pouvoir des mots sur scène, dans un Cyrano caché sous le balcon et l’autre dans la vie privée d’un auteur dont les fils s’entremêlent avec ceux de l’acteur. Les deux auteurs sont loués pour leurs dialogues ardents et une modernisation du théâtre durant leurs époques respectives; Edmond Rostand en introduisant les alexandrins à un temps dominé par le naturalisme et Alexis Michalik en réinventant le théâtre universel au sein d’une dimension contemporaine.
La trame de la pièce est basée sur l’histoire même du processus d’écriture d’Edmond Rostand. Cette idée de «théâtre dans le théâtre» est alléchante pour le spectateur qui s’immisce en voyeur dans les coulisses d’une pièce atemporelle.

Avec 12 comédiens sur les planches, Edmond prend l’ampleur d’un théâtre de troupe. Une troupe homogène, soudée, comme au bon vieux temps. Le jeu est harmonieux, précis, vécu. En effet, on sent qu’au fil des répétitions et représentations, des liens indéfectibles se sont tissés entre les comédiens. On arrive difficilement à détecter si les micro-expressions font partie du jeu ou sont un clin d’œil d’un comédien à l’autre. De là naît le comique des situations, un comique naturel, hors du burlesque poussé des clichés théâtraux.

Incontestablement, irréfutablement, le texte d’Edmond Rostand est une équation gagnante à tout prix. Que ce soient les plus belles épopées d’amour avec la tirade du balcon de Christian alors que Cyrano demeure sous le balcon de Roxane: un baiser mais à tout prendre, qu’est-ce?...» ou le «panache» de Cyrano «qui fut tout et qui ne fut rien», rendant hommage à son principe de vie, le texte laisse le spectateur en apnée. Tous les sens sont rivés sur les mots de ce personnage mythique qui émanent des coulisses les plus profondes de l’être.

«Non, merci! Non, merci! Non, merci! Mais… chanter,
Rêver, rire, passer, être seul, être libre,
Avoir l’œil qui regarde bien, la voix qui vibre,
Mettre, quand il vous plaît, son feutre de travers,
Pour un oui, pour un non, se battre, ou faire un vers!
Travailler sans souci de gloire ou de fortune,
À tel voyage, auquel on pense, dans la lune!
N’écrire jamais rien qui de soi ne sortît,
[…]
Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul!»
Une leçon de vie à bon entendeur.

 

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