
Au Liban, le paradoxe est devenu un art de vivre et s’invite jusque dans les télécoms. Les opérateurs annoncent une baisse du prix du gigaoctet, mais dans les faits, de nombreux abonnés constatent des factures plus élevées en fin de mois. Une réalité qui interpelle. Explications.
Depuis des années, le Liban jongle entre services essentiels défaillants et tarifs qui s’envolent. Le secteur de la téléphonie mobile n’échappe pas à la règle. Entre forfaits «revus et corrigés» et réseaux capricieux, les abonnés oscillent entre résignation et colère… en attendant un vrai signal, au sens propre comme au figuré.
Voici un exemple de révision et de correction dans les offres télécoms. L’ancienne carte prépayée de 6 Go à 8,5 dollars a été remplacée par une nouvelle formule à 9 dollars pour 7 Go. Sur le papier, le prix du gigaoctet baisse. Dans les faits, la facture mensuelle augmente d’un dollar, et avec la hausse constante de la consommation de données, l’avantage pour les consommateurs reste limité. Pourtant, de leur côté, les opérateurs Alfa et Touch assurent ne pas avoir augmenté les prix. Ils expliquent avoir «restructuré» leurs forfaits afin de «mieux répondre aux besoins des consommateurs».
Alfa défend sa stratégie
Des sources chez Alfa indiquent à Ici Beyrouth que cette restructuration s’appuie sur «le mode réel de consommation des abonnés et leurs comportements sur le réseau». L’opérateur affirme répondre à une demande croissante, notant une hausse de 30% de l’utilisation d’internet en glissement annuel (jusqu’à fin juillet 2025).
L’opérateur a donc lancé de nouvelles offres plus volumineuses. Exemple: la nouvelle formule 25 Go à 14,5 dollars vise à remplacer l’ancienne de 10 Go à 11 dollars, que plus de la moitié des abonnés devaient renouveler avant la fin de leur cycle. Résultat: le prix du gigaoctet a baissé de 47%, mais la facture grimpe tout de même de 3,5 dollars par mois.
Même logique pour les prépayés: l’offre 22 Go à 14,5 dollars vient remplacer l’ancien forfait de 10 Go à 11 dollars. Ici encore, Alfa met en avant une baisse de 40% du prix par giga. Mais concrètement, l’utilisateur paie 3,5 dollars de plus, pour 12 Go supplémentaires.
Touch et Alfa multiplient les efforts: nouvelles stations, renforcement du réseau, couverture améliorée. Toutefois, dans les faits, les Libanais continuent à chercher désespérément une barre de réseau… parfois même à Beyrouth. Les pannes liées aux vols de matériel ou aux coupures d’électricité viennent encore compliquer la vie des opérateurs et des abonnés.
Starlink, l’espoir venu du ciel
Face à ce tableau, une nouveauté attire les regards: Starlink, la constellation de satellites d’Elon Musk. Après des années de blocages politiques, le dossier est enfin revenu sur la table du Conseil des ministres. Pour beaucoup, ce serait la solution miracle: un internet rapide, sans dépendre des infrastructures locales fatiguées.
Mais la réalité est moins simple. Dans un communiqué détaillé, le ministère des Télécoms a clarifié mardi qu’aucun permis n’avait encore été accordé à Starlink. Le projet doit passer par un décret du Conseil des ministres, conformément au cadre légal. De plus, Starlink ne disposera pas d’un monopole: le spectre de fréquences restera ouvert à d’autres opérateurs, suivant les normes de l’Union internationale des télécommunications.
Surtout, il ne faut pas voir Starlink comme un substitut aux réseaux terrestres, mais comme un complément technique destiné aux zones reculées ou aux situations d’urgence. Autrement dit: pas de raz-de-marée d’antennes Starlink demain matin, mais un service limité en capacité et en abonnés.
Le ministère insiste enfin sur deux points: le service ne sera pas exclusivement réservé à Starlink. D’autres opérateurs satellites pourraient suivre et les négociations doivent passer par la société mère, afin de garantir le respect des lois locales.
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