Liban-Sud, lieu modèle de l’ouverture universelle de Jésus
©Ici Beyrouth

À la veille d’une visite au Liban que le Pape Léon XIV effectuerait fin novembre, et en attendant sa confirmation par le Saint-Siège, l’association Sur les Pas du Christ au Liban-Sud plaide pour qu’un plus grand intérêt soit accordé à cette partie du pays, dont une bande frontalière comprenant quelque 27 villages est occupée et dévastée.

Fondée en 2012, l’association s’emploie exclusivement à mettre en valeur l’extraordinaire patrimoine évangélique de cette région. Elle déplore son apparente négligence par les autorités publiques, civiles et religieuses, du pays. Pour elle, cette partie du Liban regorge de lieux et de routes liés à la vie publique de Jésus, dont l'existence est ignorée par de nombreux Libanais et chrétiens.

Réuni au siège de la Fondation maronite dans le monde, quartier de la Quarantaine, le comité de cette association, présidé par Samir Sarkis, a donné son feu vert à l’élaboration d’un nouveau site électronique destiné à donner plus de visibilité à ses réalisations, déjà appréciables.

L'épisode central de la Cananéenne 

Présent à la réunion, l’évêque émérite de Sarba, Guy Noujeim, a défini le Liban-Sud comme le lieu modèle de l’ouverture de Jésus à toutes les nations, à partir de l’épisode central bien connu de la Cananéenne venue demander la délivrance de sa fille.

L’épisode en question figure dans l’évangile selon saint Matthieu. Il rapporte qu’à l’arrivée de Jésus dans la région de Tyr et de Sidon, une Cananéenne, venue de ces territoires — une païenne adoratrice des dieux El, Baal, Adonis, Astarté ou Echmoun —, ayant entendu parler de Jésus, se met à crier à son passage: «Prends pitié de moi, Seigneur, fils de David! Ma fille est tourmentée par un démon.» Mais Jésus garde le silence et semble ignorer sa demande. Toutefois, importunés par son insistance, les disciples s’approchent de Jésus et lui demandent de l’exaucer. Ce à quoi Jésus répond: «Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël.» Mais la femme, qui a tout entendu, vient se prosterner devant lui et l’implore: «Seigneur, viens à mon secours!» Et lui de répondre durement: «Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens.» Elle reprend alors, avec une insistance bien libanaise: «Oui, Seigneur; mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres.» Conquis par cette réponse qui ne tient pas compte de la dureté de ses paroles, Jésus lui répond: «Femme, grande est ta foi, que tout se passe pour toi comme tu le veux!» Et, à l’heure même, sa fille est guérie.

Une «lecture libanaise »

Dans une «lecture libanaise» de cet épisode, Guy Noujeim souligne que, selon l’évangile de saint Matthieu, à partir de cet épisode de sa vie publique, «Jésus ne dira jamais plus qu’il a été envoyé uniquement aux brebis perdues d’Israël». Il sait désormais, pour l’avoir entendu de la bouche de la Cananéenne, qu’il a été envoyé non seulement aux Juifs, mais aussi aux nations que les Juifs côtoient.

Notre terre, écrit Guy Noujeim dans une méditation sur cet épisode, a servi de témoin à Jésus, que toutes les nations, travaillées par l’Esprit Saint, l’attendaient. Nous pouvons reconnaître là, inscrite dans l’Écriture, notre vocation de citoyens du Liban, que le saint Pape Jean-Paul II a qualifié de «plus qu'un pays: un message de liberté et un exemple de pluralisme pour l'Orient comme pour l'Occident» (Lettre apostolique à tous les Évêques catholiques, 7/9/1989). Ici, au Liban, pour la première fois dans l’histoire, les trois religions abrahamiques — juive, chrétienne et islamique — ont décidé de construire ensemble une même république démocratique et de porter ensemble, à titre égal, la responsabilité de tous ses citoyens.

Liban, dépôt sacré

Voilà, l'importance du Liban, qui nous est confié comme un dépôt sacré, est mise en évidence comme jamais auparavant. C’est de cette vérité que l’association Sur les Pas du Christ au Liban-Sud souhaite imprégner la conscience de tous les Libanais, et des chrétiens en particulier, au même titre que le sont les autres dévotions que propose l’Église ou que propage le tourisme religieux. Certes, ce temps de guerre larvée n’est pas favorable à cette cause, mais l’Église du Liban ne devrait manquer aucune occasion pour plaider en faveur du retour de la paix dans cette partie inaliénable de la patrie.

Une logistique d'accueil adequate

L’association Sur les Pas du Christ au Liban-Sud a déjà à son actif de nombreuses réalisations, dont l’établissement d’un circuit touristique avec une logistique d’accueil adéquate (cette dernière est encore en projet), une exposition permanente à l’Archevêché grec-catholique de Saïda, un pèlerinage annuel au pied du mont Hermon, le 6 août, pour la Fête de la Transfiguration, ainsi qu’un guide religieux. Pour elle, Jésus n’est pas «passé par le Sud», mais y a vécu des épisodes marquants de sa vie.

Parmi les sites qu’elle se propose de mettre en valeur, se distingue celui de Cana de Galilée, un village situé à une quinzaine de kilomètres de Tyr. C’est là que certains localisent le premier miracle du Christ: le changement de l’eau en vin. L’espace manque ici pour avancer les arguments favorables à ce qu’il faut considérer comme une hypothèse sérieuse, mais encore contestée.

Membre de l’association, l’archéologue Naji Maroun Karam a consacré une monographie au sujet. Après avoir dirigé une prospection archéologique sur le site, il a développé dans cet ouvrage (paru chez Saër el-Machrek) une argumentation convaincante en faveur de cette hypothèse. En tout état de cause, à son exemple, les chercheurs libanais et les universités catholiques devraient se montrer plus sûrs d’eux-mêmes et engager les compétences nécessaires pour vérifier la validité de certaines conclusions venues d’un Occident plus préoccupé de dresser des itinéraires touristiques commodes que d’établir des faits objectifs.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur les projets de l’association. Disons simplement pour conclure qu’un merveilleux «road movie», signé Philippe Aractingi et produit par l’association, portant son titre, remporte un succès mérité partout où il est projeté (cinémas, milieux scolaires, missions étrangères). Le film donne un avant-goût de ce qui reste à faire au service d’une cause que le ministère du Tourisme devrait placer en tête de ses priorités.

(*) Présidée par Samir Sarkis, l’association Sur les Pas du Christ au Sud-Liban est enregistrée officiellement le 5 avril 2012 sous le RC 508. Pour tout complément d’information: (961) 5 450650.

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