Le nouvel ambassadeur des États-Unis au Liban, Michel Issa, a atterri vendredi à Beyrouth pour entamer une mission particulièrement sensible. Son arrivée intervient à un moment où Washington cherche à redéfinir les contours de son engagement dans un pays pris dans une crise institutionnelle profonde, une confrontation latente au Sud et des pressions internationales croissantes autour du dossier du Hezbollah.
Pour sa première visite officielle dans le pays, M. Issa devrait rencontrer, lundi, le président de la République, Joseph Aoun, ainsi que le chef du Parlement, Nabih Berry et le Premier ministre, Nawaf Salam. Selon des sources médiatiques, ces entretiens devraient se concentrer sur la coopération bilatérale et la situation sécuritaire générale, sans aborder dans l’immédiat les négociations indirectes entre le Liban et Israël.
L’objectif affiché de l’ambassadeur est clair: contribuer à renforcer la stabilité interne du pays, relancer les partenariats économiques et sécuritaires et maintenir un canal politique direct entre Beyrouth et Washington. Cette mission, qu’il présente comme un engagement professionnel autant qu’un retour personnel, s’inscrit dans un climat marqué par les débats autour de la souveraineté libanaise, du rôle du Hezbollah et des réformes institutionnelles exigées par la communauté internationale.
Un profil atypique pour un poste stratégique
Michel Issa succède à Lisa Anne Johnson, dont le mandat s’est achevé fin septembre 2025. Nommé par Donald Trump dès le mois de mars, puis confirmé par le Sénat début octobre, il ne correspond pas au profil habituel des diplomates de carrière. Homme d’affaires et ancien banquier, il arrive à l’ambassade américaine à Aoukar, avec un parcours façonné par plusieurs décennies dans la finance internationale et l’entrepreneuriat.
Né à Beyrouth, il a poursuivi une partie de ses études à Paris, obtenant une licence en économie à l’Université Paris X Nanterre avant de se spécialiser en banque au Cours d’études supérieures de banques. Maîtrisant l’arabe, l’anglais et le français, il dispose d’une connaissance culturelle et personnelle rare pour un représentant américain au Liban.
Professionnellement, il a bâti plus de vingt ans de carrière dans de grandes institutions financières, telles que Crédit Agricole Indosuez, à New York, Chase Manhattan Bank et Banco Português do Atlântico à Paris. Reconnu pour son expertise en trading de devises, il a piloté des opérations financières complexes et présidé plusieurs comités de conformité et de crédit.
En 1999, il quitte la finance pour fonder une entreprise spécialisée dans les concessions automobile, regroupant Porsche, Audi et Volkswagen aux États-Unis. Sa société atteint rapidement plus de 35 millions de dollars de chiffre d’affaires annuel. Aujourd’hui, il dirige le Newton Investment Group LLC, basé dans le New Jersey.
Passionné de voitures, de golf et de tennis, Michel Issa est également connu pour sa relation personnelle de longue date avec Donald Trump, avec qui il joue régulièrement au golf.
Une vision déjà exprimée : le dossier du Hezbollah au cœur des attentes
Sa nomination avait été accompagnée de prises de position marquantes. En juillet, lors de son audition devant la commission des Affaires étrangères du Sénat, M. Issa avait appelé à une action urgente contre le Hezbollah, estimant que son désarmement n’était pas une option mais une nécessité pour préserver la souveraineté libanaise.
Lors de la cérémonie de prestation de serment à Washington, il a réaffirmé son engagement envers le Liban: «Je suis né à Beyrouth et le Liban n’a jamais quitté mon cœur». Il a également indiqué vouloir servir de «pont» entre les deux pays et renforcer la coopération bilatérale à tous les niveaux.
Morgan Ortagus, envoyée spéciale américaine pour le Liban, avait salué sa nomination et exprimé son intention de travailler étroitement avec lui dans la région.
Avec son profil hybride de financier, d’entrepreneur et désormais de diplomate, Michel Issa incarne une approche américaine fondée sur le pragmatisme et l’expérience du secteur privé. Son action à Beyrouth sera scrutée de près: elle pourrait annoncer une nouvelle phase dans la relation entre Washington et un Liban en quête d’équilibre.



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