Basket - Mondial 2027 : Qatar brise la série, le Liban retombe dans ses travers
Le meneur qatari Brandon Goodwin s’arrache vers le cercle entre deux défenseurs libanais, symbole d’un Qatar agressif et concentré. ©©fiba.basketball

Quatre jours après avoir arraché un succès au couteau à Doha, le Liban a laissé filer un match qu’il tenait entre les mains à Zouk Mikaël. Battus 86-83 par un Qatar 83e mondial, les hommes d’Ahmad Farran concèdent leur première défaite à domicile en qualifications depuis 2019… et offrent aux Qatariens leur premier succès contre le Liban depuis dix ans.

Dimanche soir au Nouhad Nawfal Sports Complex, tout semblait pourtant aligné pour une nouvelle soirée tranquille : salle pleine, ambiance chaude, adversaire déjà qualifié d’office pour le Mondial 2027 et présenté comme petit poucet du groupe. Le Liban démarre sérieux, met la balle à l’intérieur, trouve du rythme en transition et pose d’emblée son jeu.

Le premier quart tourne en sa faveur : agressivité sur la ligne de passe, quelques stops défensifs qui se transforment en paniers faciles, adresse correcte à mi-distance. Le Liban mène, gère les rotations, et donne le sentiment de contrôler le tempo. À la pause, l’écart n’est pas gigantesque mais suffisant pour installer une forme de confort : devant au score, porté par son public, le Liban semble tenir les commandes.

C’est précisément là que le problème commence. Comme trop souvent, dès que la sélection libanaise croit tenir le match, elle se relâche. Un dribble en trop, une passe téléphonée, un repli défensif en retard… et l’adversaire s’engouffre dans la brèche. Cette fois, c’est Qatar qui a puni.

Le trou d’air du troisième quart

Au retour des vestiaires, le décor change. Qatar revient avec un plan clair : monter la pression sur le porteur de balle, couper les premières options et attaquer le cercle sans complexe. Les visiteurs enchaînent un mini-run, profitant de deux pertes de balle consécutives et de fautes évitables. Le Liban répond par séquences, mais ne maîtrise plus rien.

Progressivement, le troisième quart tourne au cauchemar : tirs forcés en fin de possession, rebonds abandonnés, communication qui se délite. Qatar impose son physique dans la raquette, gratte des secondes chances, s’offre des lay-ups « cadeau ». Le score bascule, puis s’envole. À 1’18 de la fin de la période, le triple d’Abdulrahman Saad fait l’effet d’une gifle : +8 pour Qatar, qui ne lâchera plus jamais les commandes.

Dans le quatrième quart, le Liban tente le tout pour le tout. Un stop, un panier primé, un drive réussi, la salle se réveille, l’écart fond. On se dit que l’orgueil va finir par faire le travail. Mais chaque fois que les locaux reviennent à portée, une faute inutile, une erreur de lecture ou un tir précipité redonnent de l’air aux Qatariens. Sur la dernière possession, Wael Arakji a le tir pour arracher la prolongation : le ballon tape l’arceau et ressort, comme un symbole d’une soirée gâchée.

Goodwin, patron assumé

En face, un homme a tenu la barre du début à la fin : Brandon Goodwin. Le meneur qatari, déjà brillant à Doha, a signé une feuille XXL à Zouk Mikaël : 25 points, 8 rebonds, 8 passes et 2 interceptions, le tout avec un calme glacial dans les moments chauds. Capable d’alterner entre fixation-passe et prise de responsabilité, il a dicté le tempo, puni chaque retard défensif et mis ses coéquipiers sur orbite.

À ses côtés, le pivot Alen Hadzibegovic a dominé les airs, avec un double-double autoritaire (14 points, 12 rebonds, 4 passes). Présent au contre, solide au rebond défensif, précieux dans les écrans, il a imposé sa taille et sa mobilité des deux côtés du terrain, exactement là où le Liban a manqué de constance.

« C’est ma troisième fois contre eux, chaque seconde est difficile, on est juste restés concentrés », résumera Goodwin après la rencontre. Eux sont restés focus quarante minutes. Pas le Liban.

Des chiffres qui piquent

Les stats, parfois, font plus mal qu’un discours. Treize ballons perdus pour le Liban, comme au match aller, et beaucoup trop de turnovers gratuits au moment où le match se jouait. Derrière l’arc, l’adresse est restée au vestiaire : à peine plus d’un tir primé sur cinq converti, avec des shoots ouverts manqués au plus mauvais moment.

En face, Qatar rate dix lancers francs, mais compense par une activité constante en défense et quatre contres de plus. Dans une rencontre décidée à trois petits points, ce genre de détails fait toute la différence. Pendant que les visiteurs se jettent au sol, contestent chaque tir et ferment la raquette, les locaux perdent de l’énergie à discuter des coups de sifflet.

Leçon de constance après le thriller de Doha

Le plus frustrant, c’est que le scénario était écrit en lettres rouges quatre jours plus tôt. À Doha, le Liban avait déjà vu Qatar revenir de très loin, poussé par un Goodwin incandescent, avant de s’en sortir 75-74 sur un lay-up héroïque de Youssef Khayat à 17 secondes du terme. Un avertissement sans frais, transformé dimanche en sanction bien réelle.

Ahmad Farran ne se cache pas : défaite difficile à la maison, prestation loin des standards nécessaires pour gagner ce type de match. Le groupe est neuf, les automatismes encore fragiles, mais cela n’excuse pas tout. À ce niveau, relâcher l’effort mental, même pour deux ou trois minutes, revient à livrer le match.

Dedric Lawson, lui, prend une partie de la faute sur ses épaules en assumant ne pas avoir répondu présent dans les moments clés. Mais l’affaire est collective : défense qui se désunit, rebond mal maîtrisé, possessions gâchées. Ce n’est pas un tir raté qui perd le match, c’est une accumulation de petites abdications.

Qatar déjà prêt pour 2027

Paradoxalement, l’équipe qui n’a pas besoin de se qualifier – Qatar, pays hôte du Mondial 2027 – aborde ces fenêtres avec une urgence et une intensité qui font réfléchir. Les Qatariens avancent dans leur projet, construisent une identité défensive, installent Goodwin en patron et envoient un message clair au continent : même déjà qualifiés, ils jouent chaque possession.

Le Liban, lui, cherche encore sa colonne vertébrale autour de ses cadres. Le talent est là, l’expérience aussi, le soutien du public ne faiblit pas. Mais tant que cette sélection pensera qu’un match est gagné à +5 à la pause ou à +3 à deux minutes de la fin, elle restera exposée à ce genre de déconvenue. L’histoire se répète, et l’adversaire, lui, n’oublie rien.

À chaque fois qu’ils croient avoir la main sur le match, les Libanais ont la fâcheuse habitude de se relâcher. Dimanche, ils se sont fait rattraper puis dépasser, chez eux, par une équipe qui n’a jamais cessé d’y croire. Alors de grâce, messieurs, la prochaine fois, rappelez-vous qu’au basket rien n’est jamais gagné avant le coup de sifflet final. Parce qu’à force d’apprendre « à la dure », un jour, ce n’est plus l’adversaire qui vous punit… c’est votre propre talent gâché.

 

 

 

 

 

 

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