À l’Ordre des dentistes, on renoue dimanche avec la démocratie
L’ordre des dentistes renoue avec la démocratie. Six semaines après l’annulation des élections du conseil de l’ordre, les dentistes sont à nouveau appelés à exercer leur droit de vote selon les mêmes paramètres que le scrutin dernier. Les élections se tiendront ainsi ce dimanche 9 janvier, à partir de 8h, au siège de l’ordre des médecins à Tehouita. Des mesures sécuritaires seront prises pour assurer le bon déroulement du processus électoral. Des mesures sanitaires sont également imposées pour éviter la propagation du Covid-19.

Le 28 novembre dernier, les dentistes inscrits à l’ordre devaient avoir déjà élu leurs représentants syndicaux. Mais lors du décompte des voix, un esclandre, vraisemblablement provoqué par des éléments proches du tandem chiite Amal-Hezbollah, a entraîné l’annulation du scrutin lorsque des urnes ont été brisées, ce qui a rendu impossible la poursuite du processus démocratique.

Trois listes sont en lice : "Mon syndicat, ma révolution", présidée par Émilie Hayek et soutenue par des groupes issus du soulèvement du 17 octobre 2019 et le parti Kataëb ; "Le syndicat des dentistes se révolte", présidée par Ronald Younes, également soutenue par des groupes issus du mouvement de contestation populaire du 17 octobre et plusieurs partis politiques ; et enfin "Ensemble pour le sauvetage", présidée par Élias Maalouf et soutenue par le tandem chiite Amal-Hezbollah.

L’enjeu est de taille ce dimanche. Il s’agit d’abord de montrer que des élections démocratiques et justes peuvent être organisées sans problèmes, contrairement aux scènes observées le 28 novembre dernier. "Nous refusons l’image que le scandale du 28 novembre a pu transmettre à l’opinion publique. Cela ne représente nullement les dentistes", affirme à Ici Beyrouth la candidate Émilie Hayek. Certains "rejettent la démocratie", ajoute-t-elle dans une allusion aux personnes qui en sont venues aux mains pour interrompre le processus électoral.

Pour le candidat Ronald Younes, "le dépouillement était lent mais juste". Ce sont "les perdants qui avaient intérêt que les élections soient annulées" en remettant en cause le processus du dépouillement et en détruisant ensuite les urnes, souligne-t-il.


Lors du précédent scrutin, la candidate Émilie Hayek avait demandé que le dépouillement se fasse manuellement, car le dépouillement électronique était, selon elle, frauduleux. "Les chiffres étaient falsifiés à l’écran. Pour l’urne numéro 15, la dernière à avoir été dépouillée, le système affichait 120 résultats, alors qu’il y avait 79 votants, s’indigne la candidate. C’était un scandale." Elle espère que le processus de dimanche ne sera pas entaché par des soupçons de fraudes ou d’autres perturbations.

Un autre enjeu du scrutin du dimanche reste d’ordre politique, comme c’était le cas pour plusieurs autres ordres et syndicats. Les différents groupements politiques, qu’il s’agisse des partis traditionnels ou alternatifs, en profiteraient pour se préparer au scrutin législatif, en mai prochain. D’une part, les nouveaux arrivants issus du soulèvement du 17 octobre doivent essayer de faire leurs preuves, surtout après leurs défaites et le retour en force des partis politiques traditionnels dans d’autres syndicats, notamment ceux des avocats.

D’autre part, les partis politiques tentent de retrouver l’influence qu’ils ont perdue depuis deux ans. Or la division au sein de ces groupes issus du soulèvement d’octobre 2019 qui soutiennent deux listes différentes est une panacée pour les partis traditionnels. Bien que Émilie Hayek et Ronald Younes affirment être indépendants des partis politiques, leurs listes seraient appuyées par ces derniers selon diverses sources.

Un dentiste qui a pris part aux concertations entre les mouvements alternatifs avant de s’en retirer confie anonymement à Ici Beyrouth que "même si les candidats sont connus pour être intègres, la formation des listes en amont n’était pas claire". Il se demande "comment, sans préavis, certains groupes se voulant révolutionnaires ont décidé de soutenir des candidats proches de partis traditionnels".

Dimanche sera donc crucial pour les dentistes, mais également pour l’ensemble des Libanais. Est-ce que les dentistes vont se remobiliser et se présenter aux urnes pour sauver le processus démocratique que certains ont voulu détruire? Est-ce que le changement peut venir de candidats intègres, qu’ils soient indépendants ou non des partis politiques? Ou bien la vie politique et syndicale est destinée à rester minée par les partis traditionnels corrompus alors que le Liban s’effondre?
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