Présidentielle: Démarche du Qatar auprès du régime iranien  
Des sources arabes bien informées révèlent que la réunion du groupe des cinq pays en charge du dossier libanais (États-Unis, France, Arabie saoudite, Égypte et Qatar), réunis récemment à Doha, a abouti à une répartition des rôles entre les Cinq. Le Qatar, notamment, a été chargé d’entreprendre des démarches auprès du pouvoir iranien afin de l’amener à faciliter l'élection d’un président de la République (au Liban) en contraignant le Hezbollah à agir dans ce sens.

Le ministre d’État qatari aux Affaires étrangères, Cheikh Mohammed Abdulaziz Al-Khalifa, s'est rendu dans ce cadre à Téhéran, fort des informations fournies par une délégation de sécurité du Qatar qui s’était rendue auparavant, discrètement, à Beyrouth pour s’entretenir avec les dirigeants du Hezbollah du dossier de la présidentielle.  

La France a ensuite poursuivi sa mission sous un nouvel angle. L’ancien ministre Jean-Yves Le Drian est ainsi revenu au Liban après avoir abandonné le projet de dialogue préalable et l’initiative fondée sur le «compromis possible» (Sleiman Frangié à la présidence et un Premier ministre proche du courant souverainiste). M. Le Drian a proposé plutôt des concertations auxquelles participeraient les parties à la Résidence des Pins en septembre pour s'entendre sur les critères et le programme du président. L'opposition a perçu dans cette proposition une tentative de court-circuiter la Constitution et d’empêcher l'élection du chef de l’État. Elle a informé de ce fait M. Le Drian qu'elle lui présenterait sa position dans le courant du mois d’août, après consultations entre ses membres.

L’opposition a également insisté sur son attachement à son candidat Jihad Azour tant que l'axe obstructionniste continuera à s'accrocher à la candidature de Sleiman Frangié. Par ailleurs, elle a indiqué à M. Le Drian qu’elle refusait de revivre l'expérience de 2016, dénonçant en outre la manière coercitive avec laquelle le Hezb aborde le dossier de la présidentielle, à savoir l’élection de Sleiman Frangié ou le vide.

L’un des ténors de l’opposition a souligné à l’attention de M. Le Drian que la véritable crise réside dans les armes du Hezb que ce dernier utilise pour imposer le président de la République aux forces politiques. Parallèlement, Gebran Bassil propose au Hezb un marché : son aval au candidat du Hezb à la présidence, en contrepartie d’une décentralisation administrative et financière élargie et le contrôle du fonds souverain (pour les futures rentrées du secteur pétrolier et gazier). Mais M. Bassil ne renonce pas pour autant, au stade actuel, à la candidature de Jihad Azour. Certains députés aounistes ont d’ailleurs informé leurs collègues des Forces Libanaises que M. Azour est toujours leur candidat et qu'aucune autre décision n'a été prise jusqu'à présent.

Selon certaines sources, la réunion des Cinq à Doha s'est contentée de définir le profil politique du président et les priorités. C'est pourquoi l’opposition craint que le Hezb exploite la proposition de M. Le Drian pour retarder l'élection du président et la maintenir tributaire d’un accord sur le nucléaire, en attendant que la situation régionale et les résultats des négociations se clarifient.


C'est pourquoi l’un des hauts responsables du Hezbollah a déclaré récemment que «la solution n'est pas proche», car les forces de l'axe obstructionniste au Liban et dans la région misent sur les développements internes en Israël et sur les conséquences du conflit sur les amendements judiciaires, en particulier au sein de l'institution militaire, pour la première fois minée par des divisions qui ont même atteint le stade de la rébellion. Israël est ainsi le théâtre d’une vaste campagne contre le gouvernement d’extrême droite. Des voix s’élèvent pour réclamer un gouvernement modéré après le ressentiment régional et international contre le gouvernement extrémiste de Benjamin Netanyahu, en particulier de la part de l'administration américaine.

C'est pourquoi, la visite de Benjamin Netanyahu à Washington, si elle a lieu, sera une étape décisive, surtout que l'administration Biden a exprimé son mécontentement à l'égard de son gouvernement et craint qu’il ne contribue à saboter la réalisation du projet Abraham sur la paix dans la région. Dans ce contexte, et malgré l'escalade au Liban-Sud, des sources américaines écartent la possibilité d'une guerre, surtout après la délimitation des frontières maritimes, en dépit des provocations des deux côtés de la frontière à la veille du renouvellement du mandat de la FINUL.

Certains observateurs se demandent pourquoi la crise a été reportée jusqu'en septembre. Un diplomate occidental répond que cela a été imposé par les vacances annuelles de M. Le Drian et par les contacts entre le CPL et le Hezbollah qui expliquent que Nabih Berri a perçu une lueur d’espoir au niveau du dénouement de la crise. Sans compter les négociations en cours à Oman entre Américains, Iraniens et Saoudiens. Cette phase permettra au Hezb de passer à un troisième candidat après avoir abandonné Sleiman Frangié et suite à l’abandon de Jihad Azour par l'opposition.

Par conséquent, septembre sera la dernière chance. M. Le Drian affirme à cet égard que «les concertations qui auront lieu sur le profil et les priorités du président sont celles de la dernière chance pour élire un président». «Si ces concertations échouent, ajoute l’émissaire français, les Cinq abandonneront leur mission de bons offices, et ceux qui entravent le processus seront sanctionnés».

 
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