Après près d’un an de vacance présidentielle, les politiques ne semblent toujours pas pressés d’élire un chef de l’État, au grand dam de la communauté internationale, et malgré les nombreuses crises que traverse le pays.
Tous les moyens sont jugés bons pour retarder l’échéance présidentielle: Boycott des séances électorales, refus de convoquer la Chambre sans entente préalable autour d’un candidat… Cependant, le groupe des Cinq (France, Arabie saoudite, États-Unis, Qatar et Égypte) persiste à faire pression sur la classe dirigeante pour débloquer l’échéance présidentielle. Un forcing qui a repris de plus belle à la fin de l’été avec les visites de l’émissaire américain Amos Hochstein et celle du représentant du président français, Jean-Yves Le Drian.
Visite d’Amos Hochstein
L’émissaire américain Amos Hochstein, qui était présent à Beyrouth pour deux jours (les 30 et 31 août) pour s’occuper du dossier relatif aux 13 points litigieux le long de la frontière terrestre entre le Liban et Israël, s’est réuni autour d’un dîner avec le commandant en chef de l’armée, le général Joseph Aoun, qui était habillé en civil pour l’occasion. Le diplomate américain a profité de cette rencontre pour souligner que «le dévouement de soldats hautement professionnels est essentiel à la sécurité et à la stabilité du Liban», et a réitéré l’engagement de Washington à «poursuivre le partenariat de sécurité entre les États-Unis et le Liban». Des propos qui laissent entendre que les Américains considèrent que le général Joseph Aoun a un rôle politique à jouer.
Photo tirée du compte X de l’ambassade américaine à Beyrouth
Le lendemain, M. Hochstein s’est rendu dans la Békaa pour visiter l’acropole et le musée de Baalbeck – un interlude touristique qui porte un message clair au Hezbollah: nous reconnaissons votre présence, mais nous pouvons toutefois nous rendre là où nous le souhaitons.
Photo tirée du compte X de l’ambassade américaine à Beyrouth
Début septembre: Mohammad Raad rencontre Joseph Aoun
Quelques jours plus tard, le chef du bloc parlementaire du Hezbollah Mohamad Raad se réunit de façon informelle avec le général Joseph Aoun. Une preuve supplémentaire qui signifie que la formation chiite considère le commandant en chef de l’armée comme un acteur incontournable de la vie politique libanaise. Plus encore, celle-ci aurait fait comprendre au chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, que si aucun progrès n’est réalisé pour faire avancer la candidature du chef des Marada, Sleiman Frangié, le Hezbollah sera enclin à soutenir la candidature du général Joseph Aoun.
Jean-Yves Le Drian entame sa troisième visite à Beyrouth
Du 12 au 15 septembre, le représentant du président français, Jean-Yves Le Drian, entame sa troisième tournée au Liban et est reçu par le général Aoun. Le diplomate français a clairement souligné lors de ses différentes rencontres «la nécessité de réaliser les réformes requises pour le rétablissement du Liban et le règlement des crises socio-économiques», estimant que «la vacance au niveau des institutions paralyse l’État». Il a fait valoir que «l’élection d’un président de la République ne constitue pas une solution en soi, mais une condition indispensable à cette solution». Il aurait également dit aux personnes qu’il a rencontrées qu’il faudrait un «semi-accord qui consiste à lâcher les deux candidats, Sleiman Frangié (soutenu par le tandem Amal-Hezbollah) et Jihad Azour (appuyé par l’opposition, le CPL et des indépendants) au profit d’un troisième candidat». Tout est dans le non-dit, puisque dans ses entretiens avec les différents responsables politiques libanais, M. Le Drian a laissé entendre que la France serait en faveur de l’élection du général Aoun à la présidence de la République, sans pour autant le nommer explicitement.
Par ailleurs, il convient de noter que messieurs Hochstein et Le Drian se sont respectivement rendus à Aïn el-Tiné, chez le président de la Chambre, Nabih Berry, qui reste l’ultime maître de cérémonies et l’instigateur d’un appel à un dialogue de sept jours, au terme desquels des séances parlementaires successives seront tenues jusqu’à l’élection d’un président de la République.
Réunion du groupe des Cinq
Le dossier de la présidentielle semble toutefois avancer, en dépit des diverses manœuvres du camp du 8 Mars. Au niveau international, le groupe des Cinq (Arabie saoudite, Qatar, Égypte, États-Unis et France), qui œuvre pour débloquer le dossier de la présidentielle libanaise, s’est réuni en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, qui s’est tenue les 18 et 19 septembre à New York, et de l’arrivée du ministre des Affaires étrangères du Qatar à Beyrouth le 5 octobre.
En attendant, la classe politique joue la montre, en espérant le «mot secret» que certains imaginent se matérialiser en espèces sonnantes et trébuchantes. Pendant ce temps, les Libanais attendent, font face à de multiples crises et comptent les jours perdus.
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