De la Villa des Cèdres à l’abbaye de Saint-Pé (2/2)
De son siège diocésain de Meudon, sis Villa des Cèdres, l’éparque maronite de France, Mgr Maroun Nasser Gemayel, décrit l’abbaye de Saint-Pé comme l’«œuvre de sa vie». Elle incarne à la fois la présence des maronites en France, leur intégration et leur message missionnaire.

L’abbaye de Saint-Pé-de-Bigorre, à Lourdes, fondée en l’an 1022, célèbre en ce mois de juillet 2022, son millénaire. De son siège diocésain de Meudon, sis Villa des Cèdres, l’éparque maronite de France, Mgr Maroun Nasser Gemayel, la décrit comme l’«œuvre de sa vie». Elle incarne à la fois la présence des Maronites en France, leur intégration et leur message missionnaire.



La Maison maronite de la mère de la Miséricorde

Acquise par l’association «Authenticité et mission» en 2017, cette ruine aura besoin de plusieurs années et de millions d’euros pour sa restauration. Malgré ce programme monumental, l’évêque et son équipe ont tenu à réaliser le minimum afin d’être prêts à célébrer le millénaire de cette ancienne abbaye bénédictine chargée de sens, de symboles et de visions pour l’avenir.

D’emblée, les plans de masse du projet présentent le nom de cette abbaye romane devenue maronite. En syriaque Mor Potros de Bigor, et en français Saint-Pé-de-Bigorre, Pé signifiant Pierre en occitan. Elle est parfois désignée aussi par Saint-Pé-de-Générés. Les documents présentent de même systématiquement le nom de l’actuelle mission: Baito morounoyo d’émo de mrahmonouto, ou Maison maronite de la mère de la Miséricorde. Car Mgr Gemayel, évêque éparque maronite de France, a tenu à y maintenir la tradition maronite du dévouement à la Sainte Vierge, depuis que cette Église lui a consacré tous ses sièges patriarcaux, de Notre-Dame d’Ilige à Notre-Dame de Bkerké, en passant par Notre-Dame de Qannoubine.

Ancienne gravure de l’abbaye de Saint-Pé.

Le duc de Gascogne

Fondé au début du XIe siècle, cette abbaye est devenue un haut-lieu de pèlerinage, et ce jusqu’au XIIIe siècle. Son emplacement est stratégique, à moins de deux heures de marche du sanctuaire de Lourdes et sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Mais l’histoire médiévale raconte surtout qu’à cet emplacement, se trouvaient des restes de la chaîne dans laquelle Saint Pierre avait été lié lors de son martyr à Rome.

En 1022, le duc Sanche de Gascogne, touché par une grave maladie, était parti en pèlerinage auprès de ces saintes reliques. Une fois rétabli, il avait entrepris la construction d’une église en l’honneur des saints Pierre et Paul. Agrandie aux XIIe et XIIIe siècles, cette abbaye a fini par acquérir une grande renommée et faisait partie des plus grands monuments romans de cette région d’Occitanie.

L’évêque des apparitions

À la suite des guerres de religion du XVe siècle et surtout du tremblement de terre de 1661, l’église abbatiale à dû être reconstruite, mais avec des dimension plus réduites. Elle sera à nouveau restaurée en 1822 par l’évêque Laurence de Tarbes qui lui a adjoint un séminaire, et qui a surtout lancé la première procession au départ de l’abbaye de Saint-Pé, vers la grotte de Lourdes, devenue le second haut-lieu de pèlerinage marial mondial. C’est cette tradition initiée par celui qu’on surnomma «l’évêque des apparitions» qui sera désormais perpétuée par la communauté maronite avec tous les pèlerins et visiteurs de toutes origines.

Planche portant le nom de Saint-Pé-de-Bigorre en syriaque.

Rendre la vie à l’abbaye


Le bâtiment du séminaire de Saint-Pé, érigé par l’évêque de Tarbes et converti en école en 1966, a fini par être désaffecté en 1999. Dès cette date, l’abbaye commençait à se dégrader et à tomber progressivement en ruines, jusqu’à son acquisition en 2017 par l’association «Authenticité et mission».

Pour l’association qui entame déjà sa restauration, il s’agit d’en faire un centre spirituel avec un monastère doté d’un séminaire, mais aussi un gîte d’accueil pour les pèlerins de Lourdes et de Saint-Jacques-de-Compostelle. Les plans comprennent également une maison de convalescence et un centre culturel avec auditorium, bibliothèque et musée. À tout cela, Mgr Gemayel a adjoint une fermette et un potager pour enseigner aux jeunes à se retrouver et à renouer avec la terre. Ce sera là, dans le ressourcement des jeunes «qui sont, dit-il, notre préoccupation majeure et notre souci permanent» que se trouvent la vocation et la mission principale de ce site. Pour Mgr Gemayel, cette abbaye sera «une œuvre pastorale et missionnaire par excellence».

Un projet ambitieux

Le projet est ambitieux et couvre une superficie bâtie de 13.000 m2 sur un terrain de 4 hectares. Il s’agit de réhabiliter un patrimoine historique. Les festivités du millénaire permettront de faire connaître ce projet titanesque aux visiteurs, fidèles et pèlerins, mais aussi éventuellement d’y attirer de potentiels donateurs. Car jusque-là, l’association « Authenticité et Mission » continue de compléter les dons de quelques bienfaiteurs par des prêts bancaires.

Ce projet qui semble démesuré vient souligner et enrichir les pages d’histoire séculaire des liens et des échanges entre la France et le Liban.  Cette amitié était née au XIIIe siècle lorsque les maronites étaient venus proposer leur soutien à Saint Louis lors de la septième croisade, lit-on sur le site de l’association. L’échange se traduira dans cette abbaye maronite de France par des moments de paix, de prière, de retraites et d’activités spirituelles et culturelles. Là se fera l’expérience de la solidarité et de l’entraide, du don et du dialogue, sans oublier, comme aime à le répéter Mgr Gemayel, l’amour de la terre que l’on apprend à cultiver et à respecter.

L’église de l’abbaye de Saint-Pé.

Les festivités

Les festivités du millénaire s’étendront du 14 au 17 juillet à Saint-Pé-de-Bigorre à 9 kilomètres de Lourdes*.

Le 14 juillet, l’inauguration se fera par une messe célébrée à l’intention de la France et du Liban. S’en suivront la cérémonie d’ouverture et le lancement de l’exposition permanente qui durera toute la semaine. Cette journée sera agrémentée d’un concert de chants sacrés, suivi d’un spectacle sur les mille ans de l’abbaye.

Le 15 juillet, auront lieu le lancement de la journée des jeunes ainsi que la première partie du colloque. La journée s’achèvera par une procession vers le sanctuaire de Lourdes.

Le 16 juillet, le colloque se poursuivra et un concert de musique classique sera offert.

Le 17 juillet, la célébration de la messe d’action de grâce précèdera la cérémonie de clôture des festivités. La soirée sera agrémentée par le spectacle sur le millénaire de l’abbaye.

Festivités du millénaire de Saint-Pé.

*Il est possible de consulter le programme et de s’inscrire en ligne sur : www.saintpe.fr
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