“Si le Hezbollah s’arroge le droit de décider du l’identité du président de la République au Liban, le pays en paiera cher le prix.” Tous les propos comme ceux qui émanent actuellement de Gebran Bassil, chef du Courant patriotique libre, gendre du chef de l’État et son acolyte à la présidence, n’ont aucun sens. Ils sont obsolètes, dans la mesure où ils évoquent les armes du Hezbollah, qui ont propulsé le tandem Aoun-Bassil au palais de Baabda. Ces derniers ne savaient-il pas qu’il y a un prix à payer en contrepartie de leur accession à la première magistrature grâce aux armes iraniennes ? Ou bien la formule des armes qui protègent la corruption a-t-elle fait oublier à ce binôme le vrai sens et la portée du crime qu’il a commis ?

Il n’est pas normal que seize ans après la signature du document de Mar Mikhaël, Gebran Bassil prenne soudainement conscience de la problématique des armes du Hezbollah, dont la seule mission est de consacrer Beyrouth comme province iranienne sur la Méditerranée. Venant d’une personne qui est membre d’un binôme ayant pris à sa charge d’assurer une couverture aux armes et aux exactions du Hezbollah durant seize ans, de tels propos sont dénués de toute logique.

Une telle réthorique signifie entre autres qu’il y a encore chez les chrétiens un nombre important de benêts prêts à voter pour les candidats du Courant patriotique libre aux prochaines élections législatives si elles ont lieu dans leurs délais constitutionnels. Ce qui est effarant, c’est que certains parmi les chrétiens soient toujours prêts à voter pour les candidats aounistes. À la lumière des élections de 2005, où des ténors comme Nassib Lahoud ont perdu leur siège parlementaire face à de piètres figures aounistes qui ne méritent même pas d’être mentionnées, il apparaît que la bêtise d’un nombre non-négligeable de chrétiens est sans limites. Ceux-là n’ont toujours pas compris et ne comprendront sans doute jamais que le Hezbollah a modifié l’identité du Liban et les a transformés en dhimmis, ni plus ni moins !

Ce que le Hezbollah a fait sous la couverture de Michel Aoun et Gebran Bassil suscite beaucoup de questions. Pourquoi, par exemple, les réformes sont-elles impossibles au Liban ? La réponse est qu’en dépit de tous les efforts déployés par le Premier ministre Najib Mikati, qui doit se battre sur plusieurs fronts, et en dépit de toute l’expérience locale, arabe et internationale dont il dispose à travers son expérience dans la vie, il découvrira tôt ou tard qu’il ne peut mener aucune réforme quelle que soit la souplesse dont il fait preuve, parfois jusqu’au seuil de la complaisance inacceptable. Sans application des réformes, ce qui est impossible, il n’y a pas de place pour ceux qui veulent réfléchir à l’avenir du Liban et de ses citoyens.

Il n’est un secret pour personne que les réformes sont requises par la communauté internationale et tous ceux qui veulent vraiment aider le Liban, surtout le Fonds monétaire international. Pourquoi le Liban est-il incapable de les entreprendre ? La raison est très simple: la condition première pour les réformes est la présence d’un État central fort qui contrôlerait totalement l’aéroport et les ports et tout ce qui entre et sort du pays à travers ces centre vitaux et les frontières terrestres avec la Syrie. Il existe également un besoin d’un État capable de prendre des mesures claires au niveau du tracé des frontières avec Israël, loin des surenchères et des slogans creux, pour que le Liban puisse aborder sérieusement la question du gaz des ses eaux régionales.

Plus important encore, un État fort est nécessaire pour prouver que le Liban n’est pas une rampe de missiles iraniens dans la région. Sans un tel État, le Liban ne peut très malheureusement pas être autre chose qu’un centre de fabrication de stupéfiants à destination du Golfe arabe. Sa capitale ne peut qu’être la deuxième ville la plus importante dans la région pour les Houthis, pour qui Beyrouth est une destination privilégiée et facile, dont ils peuvent entrer et sortir à leur guise sans aucun contrôle, et où ils possèdent une chaîne de télévision satellite. Et, cerise sur le gâteau, le Liban est devenu le centre d’activité d’ “opposants” saoudiens et bahreïnis venus de nulle part, qui se sont mis au service du projet expansionniste iranien d’un point de vue sectaire.

Pour ceux qui sont en quête de preuve sur tout ce qui se précède, il suffit d’en revenir aux commentaires de la chaîne satellite du Hezbollah, al-Manar, après l’agression menée par les Houthis contre les Émirats arabes unis à l’aide de drones et de missiles iraniens: le fiel iranien a été savamment distillé contre un pays arabe pacifique, qui n’a offert que du bien au Liban et les Libanais, et au sein duquel des dizaines de milliers de nos concitoyens vivent en toute dignité, aidant leurs familles afin qu’elles puissent tenir bon sur le territoire libanais. Ceux qui sont capables de se livrer à de tels commentaires, nuisibles à tout ce qui est arabe dans la région, refusent certainement d’assurer la moindre aide au Liban et aux Libanais, et recherche même davantage d’appauvrissement et de misère pour eux.

Le Liban est un pays qui ne peut plus être réformé, en tout cas à l’ombre des rapports de force internes et régionaux. La seule volonté de Najib Mikati ne suffit pas dans un pays où les réformes signifient de commencer par contrôler l’aéroport, le port et les frontières avec la Syrie d’abord, puis baisser le nombre des fonctionnaires dans le secteur public et retourner à la Constitution. Comment d’ailleurs en revenir à la Loi Fondamentale dans un pays où le duopole qui se trouve à la présidence de République ne cherche qu’à complaire au Hezbollah pour que Gebran Bassil succède son à beau-père, Michel Aoun, au palais de Baabda. La seule obsession de M. Aoun est Gebran Bassil et son avenir, en dépit des sanctions américaines imposées contre lui. Tout le reste n’est que détails et tentatives de donner l’impression qu’il existe une gêne aouniste vis-à-vis du Hezbollah. Mais qu’est donc in fine le courant aouniste au Liban pour avoir le droit d’être incommodé par le Hezbollah, lequel a mené son leader, accompagné de son gendre, au palais de Baabda en 2016, au terme de près de deux ans et demi et blocage du Parlement ?

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