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Alors que la moitié orientale du monde chrétien s’était effondrée lors d’une controverse sur le sexe des anges, voici que la moitié occidentale implose lors d’une polémique sur le sexe des humains, accompagnée d’un suicide civilisationnel.

La théorie du genre est centrale pour la religion woke. Tout peut se construire (ou se déconstruire) autour d’elle. Car elle permet de désavouer toutes les manifestations de la réalité, après avoir réussi à contester les évidences mêmes du corps humain. En reniant la binarité sexuelle, l’homme et la femme, le père et la mère, elle supprime la famille qui est à la base de la construction sociale. Elle annihile la société. Elle remplace l’être humain par un numéro. Parent 1 et parent 2 effacent la réalité biologique. En faisant disparaître le père, en castrant l’homme, elle abroge le patriarcat, et donc le principe d’autorité, ouvrant la voie vers l’anarchie. Cette théorie devient la clé passepartout pour les délires les plus diversifiés. Pour Jean-François Braunstein, la théorie du genre forme le mystère (dans un sens religieux) du wokisme.

Du transsexuel au transgenre

La religion woke ne croit pas au corps, mais seulement à la conscience. Elle refuse la vérité scientifique, la réalité, la raison, l’évidence matérielle et le concept de vérification et d’empirisme. Pour elle, la conscience est enfermée dans un corps matériel. Elle en est prisonnière et cherche à se libérer de ce poids contraignant. La pure conscience est tellement absolue qu’elle n’a plus de considération pour ce corps. C’est ainsi que le wokisme dépasse la transsexualité et élève le transgenre sur un piédestal dépassant toutes les autres catégories. En d’autres termes, pour être homme, femme ou toute autre chose, nul n’a besoin d’avoir recours à la chirurgie. Pour être ceci ou cela, il suffit de le vouloir. L’aspect physique n’est que superflu et totalement insignifiant.

C’est ainsi qu’un psychologue woke, John Money, a tenté de prouver que le genre n’est pas biologique, mais culturel, et qu’il ne dépend donc pas du sexe, mais des conditions sociales. Il pense pouvoir ainsi transformer des garçons en filles et vice-versa, s’il s’y prenait assez tôt. Inutile de rappeler que son expérience sur le petit David s’était soldée en un suicide. Mais, la solution, selon la championne du wokisme, Anne Fausto-Sterling, aurait été d’aller plus loin que Money. Pour elle, ce psychologue a failli, car il était resté prisonnier de la notion de binarité sexuelle héritée d’une société patriarcale qui s’était inventé ses propres repères durant des millénaires. Or, selon elle, il existe une infinité de sexes qu’il convient de reconnaître, et le petit David aurait pu être sauvé s’il avait bénéficié d’une énième voie, autre que la masculinité ou la féminité.

Alors que la moitié orientale du monde chrétien s’était effondrée et islamisée lors d’une controverse sur le sexe des anges, voici que la moitié occidentale implose lors d’une polémique sur le sexe des humains, accompagnée d’un suicide civilisationnel.

L’intersectionnalité

Dans le prolongement de la théorie du genre, les courants universitaires ont développé celle de l’intersectionnalité, définissant des communautés identitaires classées en castes étanches les unes aux autres. Leurs relations sont construites sur la haine, la méfiance et la défiance, ainsi que sur le poids des présumés péchés ou souffrances de leurs ancêtres.

Cette notion d’intersectionnalité a été imaginée par la juriste wokiste américaine Kimberlé Crenshaw. Elle vient rajouter l’indigénisme ou le décolonialisme aux critères de race et de genre. Les décoloniaux mis face à face avec les blancs, sont cependant subdivisés, à leur tour, en sous-groupes identitaires opposés. Les pays occidentaux ont ainsi connu, sur leurs sols, des affrontements entre ethnies de décoloniaux.

La théorie de la race

À la théorie du genre, s’ajoute donc la théorie critique de la race. En plus d’être ultra-identitaire, le wokiste est aussi ultra-raciste. Il a réussi à ressusciter l’odieuse notion de race. Alors qu’à la suite de la Seconde Guerre mondiale, le monde occidental s’efforçait d’effacer cette hideuse notion, ou d’en atténuer l’importance, les wokes sont venus l’exacerber. Ils ont établi leur vision du monde sur le principe-même de différences raciales. Alors que les antiracistes du XXᵉ siècle recherchaient l’égalité entre les races, les racialistes du wokisme allaient établir une échelle de valeur et une classification rigide sans le moindre espoir de salut.

"Tous les Blancs sont racistes", même indépendamment de leur volonté, a déclaré la militante woke racialiste Barbara Applebaum. Tout Blanc doit payer pour ses privilèges, pour sa blanchité et pour son histoire. Contrairement aux antiracistes, les wokes racialistes ne cherchent nullement à abolir l’oppression, mais à l’inverser pour la diriger vers les supposés privilégiés. Il y a une volonté non dissimulée de néantiser les présumés adversaires, et c’est là "l’un des aspects les plus détestables de cette idéologie", écrit Jean-François Braunstein.

L’éloge de l’injustice

Le woke rejette l’Autre et œuvre à rectifier l’injustice par une injustice inverse. Il ne croit pas à l’égalité, mais cherche à corriger le monde en privilégiant les défavorisés et en défavorisant les privilégiés. Il veut remédier au racisme en le retournant contre les Blancs. Pour faire un monde meilleur, il rajoute de l’injustice à l’injustice. Foncièrement raciste, il indexe les vertus des gens sur la couleur de leur peau. "Le wokisme est un racisme au carré, c’est l’enfer", pour reprendre Raphael Enthoven.

Pour un woke, l’égalité des chances n’est plus tolérable à cause de ce qu’il définit comme "privilège blanc" dont certains bénéficient. Il est donc, selon lui, nécessaire de rétablir la discrimination, mais contre les Blancs. Cette doctrine exécrable a suscité la répréhension du linguiste noir américain John McWhorter. Celui-ci l’a considérée comme néoraciste et nocive, particulièrement pour les Noirs. Son livre Le Racisme woke porte le sous-titre explicite Comment une nouvelle religion a trahi l’Amérique noire.

Pour cette religion, l’équité n’est donc obtenue que dans l’application de l’inégalité, et donc dans l’oppression des présumés privilégiés. Selon cette théorie et selon certains intellectuels woke libanais, les chrétiens du Liban doivent payer comme tout Blanc occidental. Mais, il faut surtout aussi leur ôter le droit d’être blancs. Ils n’ont droit ni à l’identité culturelle, ni historique, ni même biologique. Certains pseudo-historiens woke prétendent déconstruire leur histoire à coups de mensonges et d’inexactitudes.

Les chrétiens du Liban sont ainsi une erreur dans l’histoire, la géographie et l’anthropologie. Le fait même de demander à sauvegarder leur liberté et leur culture est une preuve de leur racisme inhérent. Il leur est demandé, comme l’a si bien exprimé François Xavier Bellamy*, de se sentir coupable de vouloir exister.

* François Xavier Bellamy in Maya Khadra, Samir Geagea – L’Avenir du Liban, Alençon, 2023.

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