Une politique anti-libanaise au ministère des Affaires étrangères
La politique étrangère du Liban est l'otage de l’agenda iranien, avec ses priorités et ses développements afférents. Le ministère des Affaires étrangères adopte de plus en plus des politiques complètement étrangères au pays et à ses intérêts. Comme si le blocage des échéances électorales et la neutralisation de la Constitution, devenus monnaie courante, ne suffisaient pas.

Ce qui se passe au niveau de l’élection d’un nouveau président de la République avant le 31 octobre, ou encore les débats stériles entre les mastodontes du pouvoir téléguidés de près ou de loin, en fonction des stratégies et des priorités de l’axe iranien, en sont la parfaite illustration.

Cette soumission aux demandes de Téhéran ne s’arrête pas au niveau local. Loin de là. En effet, la complexité de la situation libanaise coïncide sur le plan extérieur avec deux événements de taille qui soulèvent davantage de points d’interrogations au sujet du scénario prévu pour le Liban, en raison de leur corrélation avec les intérêts iraniens et des réactions israéliennes et américaines. On parle principalement du dossier de la démarcation des frontières maritimes entre le Liban et Israël, et des navettes espacées du médiateur américain Amos Hochstein dont les réponses sont peu concluantes jusqu’à l’heure.

Le premier événement concerne le ministre libanais sortant des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib. Lors de la 158e session ordinaire du Conseil de la Ligue arabe – au niveau ministériel – il avait réitéré «la position du Liban sur la nécessité et l’importance que la Syrie, membre fondateur, récupère son siège au sein de la Ligue arabe ».

La position de M. Bou Habib contredit celle du ministre syrien des Affaires étrangères, Fayçal al-Mokdad, qui a partagé quelques jours auparavant avec son homologue algérien Ramtan Lamamra la «réticence de son pays à soulever la question du retour de Damas au sein de la Ligue, durant le prochain sommet, sa priorité étant d’unifier les rangs internes face aux défis régionaux et internationaux ».

Il apparaît ainsi que le rôle du ministère des Affaires étrangères consiste, en vertu de l’engagement en faveur de la stratégie de l’axe iranien, à se faire l’avocat du diable, en redorant le blason du régime d’Assad, lequel s’abstient de formuler des demandes, et adopte une attitude condescendante à l’égard du consensus arabe.

Ceci sans omettre que M. Bou Habib, qui semble suivre les instructions de l’axe syro-iranien et de sa branche libanaise, avait admis dernièrement que le gouvernement libanais était incapable de faire face au Hezbollah, en relevant que la formation chiite représente un  «problème régional», suite aux mesures prises par les pays du Golfe à l’encontre du Liban. Pour rappel, ces mesures constituaient une réponse aux attaques verbales et incessantes du Hezbollah contre ces pays.


Le dernier épisode en date se rapporte à l’accueil par le Hezbollah d’opposants saoudiens dans la banlieue-sud de Beyrouth. Ces derniers se montrent menaçants alors que l’Etat libanais reste incapable de prendre la moindre mesure de dissuasion à leur encontre, ou contre ceux qui les instrumentalisent, voire les parrainent.

Le second événement s’articule autour de la fuite concernant une proposition libanaise, avancée à la faveur du renouvellement du mandat de la Finul, de «supprimer le paragraphe faisant référence aux résolutions 1559 (2004) et 1680 (2006) qui traitent des armes illégales et de la délimitation des frontières avec la Syrie, selon un rapport diplomatique occidental parvenu à Beyrouth».

Selon le rapport, cette démarche serait l’œuvre du camp présidentiel qui aurait demandé au ministère des Affaires étrangères de la concrétiser afin de débarrasser le Hezbollah du fardeau des résolutions internationales qui appellent à son désarmement, avant la fin du mandat de Michel Aoun.

Tout cela n’a cependant rien de nouveau. Ces manœuvres avaient débuté sous la tutelle syrienne, et plus particulièrement lorsque des personnalités chiites avaient été nommées aux Affaires étrangères. Les prises de positions pro-syriennes ont commencé alors à foisonner, aux dépens de l’intérêt arabe commun.

Le niveau de soumission a atteint son apogée avec la mainmise graduelle et préoccupante du Hezbollah sur le Liban. Avec la nomination du chef du CPL Gebran  Bassil, allié du Hezbollah, à la tête du ministère des Affaires étrangères, les intérêts du Liban ont basculé. Le pays a été arraché à son environnement arabe qui lui assurait un rayonnement international, et a plongé dans un isolement qui a permis aux partisans de l’axe syro-iranien de se mouvoir sans être importunés par un Occident qui pouvait «envoyer ses agents pour porter atteinte à la dignité de la Résistance et s’immiscer dans les affaires souveraines du pays».

Aujourd’hui, ces deux occurrences montrent que le sous-instrument de l’instrument principal de cet axe, met en œuvre les demandes du Wali al-Fakih au sein de la Ligue arabe, ainsi qu’aux Nations unies. Ce qui n’est pas sans affaiblir les politiques étrangères du Liban en les rendant tributaires des calculs privés qui permettent le pillage des ressources du pays et de son peuple. Mais tant que l’axe résiste et tient bon, tout semble permis…
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