
Créée en 1967, l’Assemblée des patriarches et évêques catholiques au Liban (APECL) est à la recherche d’un renouvellement de ses structures en vue d’une plus grande efficacité pastorale et d’une plus grande maturité dans la gestion de ses biens. C’est à ce difficile objectif qu’elle vient de consacrer sa 57ᵉ session ordinaire, tenue dans la maison d’accueil Bethania (Harissa, 17-20 février), après avoir été reportée de l’automne en raison de la guerre.
Un bilan d’étape s’imposait pour s’assurer que l’APECL ne s’est pas “assoupie” et que le désir de travailler ensemble anime aussi ardemment qu’à l’origine les différentes Églises catholiques orientales, convient en substance une source ecclésiastique, sous couvert d’anonymat.
Or, s’il existe au niveau de ces Églises des commissions de réflexion ou des initiatives, les esprits clairvoyants parmi les évêques se sont demandés si cela suffit et s’il ne faudrait pas repenser les méthodes de l’APECL et de réapprendre à travailler ensemble. Née comme un instrument de communion ecclésiale à travers la consultation, la coordination et la coopération entre les différentes Églises catholiques, l’APECL doit faire preuve de plus d’efficacité pastorale, ont estimé des évêques partis, avec plus ou moins de succès, à l’assaut du chevauchement des structures qui vide certaines commissions de toute utilité, des situations de rivalité entre programmes et personnes, des torpeurs administratives et des insuffisances.
Un visiteur de marque
Le Saint-Siège a choisi de faire coïncider la session avec l’arrivée d’un visiteur de marque, le cardinal jésuite canadien Michael Czerny S.J., président du dicastère pour le service du développement humain intégral.
Pour les observateurs, cette visite illustre la tendance à l’intensification de la présence pastorale du Vatican auprès des Églises orientales, à une étape cruciale où elles doivent unifier leurs initiatives pour faire face aux guerres qui vident le Moyen-Orient de ses chrétiens.
Effectuées à l’écart des pompes officielles, ces visites permettent au Saint-Siège de prendre le pouls du pays et de mieux aider diverses hiérarchies, parfois figées dans le formalisme, à percevoir et à prendre en charge une jeunesse tentée par l’émigration.
Cet effort n’est pas récent. L’appel à l’unité d’action et de sentiment lancé aux Églises orientales remonte au synode sur le Liban de 1996, un appel que le synode sur le Moyen-Orient de 2013 a renouvelé et que les papes Benoît XVI et François n’ont cessé de relancer lors de leurs multiples visites dans la région.
Sobriété de vie
Il n’est pas inutile, par exemple, de rappeler comment le pape François s’adressait en 2013 aux chefs d’églises orientales qu’il avait invités à une journée de prière et de réflexion, au Vatican: “Pour que notre témoignage soit crédible, nous sommes appelés à (…) un style de vie sobre (…), à cette charité à la fois fraternelle et paternelle, que les évêques, les prêtres et les fidèles, en particulier s’ils vivent seuls et en marge, attendent de nous.”
“Je pense surtout à nos prêtres ayant besoin de compréhension et de soutien, même au niveau personnel, ajoutait le pape. Ils ont le droit de recevoir notre bon exemple dans les choses qui concernent Dieu, comme dans toute autre activité ecclésiale. Ils nous demandent de la transparence dans la gestion des biens et de la sollicitude envers toutes les faiblesses et les nécessités. Tout cela, dans l’application la plus sincère de cette authentique pratique synodale qui distingue les Églises d’Orient”.
Doctrine sociale et biens des Églises
À l’ordre du jour de la session figurait aussi, et comme naturellement, un nouvel appel à valoriser la doctrine de l’Église et une saine gestion de ses biens. La richesse des Églises orientales, notamment en biens fonciers, est souvent cause de scandales pour les fidèles. Car ces biens restent stériles en raison d’un favoritisme venu du passé. Selon des sources épiscopales, le nonce a suggéré la création d’un “fonds national commun des Églises du Liban”, qui redistribuerait les liquidités disponibles en fonction des besoins, sachant qu’à côté de diocèses riches, il en existe qui sont privés de ressources et incapables de financer des activités ou des institutions indispensables à leur mission.
Le représentant du Saint-Siège aurait également recommandé une administration plus professionnelle de propriétés d’Églises gérées de façon incompétente. “Certaines institutions ecclésiales ne savent même pas ce qu’elles ont, aurait déclaré le nonce au cours de la séance d’ouverture de la session, et leurs biens finissent par enrichir tout le monde, sauf l’Église et les pauvres, créant ainsi des scandales dans la communauté chrétienne.”
Visite au cimetière de Jamhour
En marge de sa participation ponctuelle à la session de l’APECL, le cardinal Czerny a multiplié les visites pastorales. Il s’est rendu en particulier à Tripoli, où il a rencontré le mufti de la ville, cheikh Mohammad Imam. Parmi ses activités, une émouvante visite au collège de Jamhour, où il s’est recueilli sur la tombe de Hans-Peter Kolvenbach, qui fut le supérieur de la Compagnie de jésuites vingt-cinq années durant, et dont le Liban était devenu la terre d’élection.
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