L’Association des banques du Liban appelle à reconnaître la nature systémique de la crise
Le secteur bancaire libanais réclame la pleine reconnaissance de la crise systémique pour protéger les déposants.  ©Al-Markazia

La crise économique libanaise est systémique. C’est le message central du dernier rapport de l’Association des banques du Liban (ABL) pour octobre 2025. Une assertion qui vient contredire la dernière version du projet de loi sur le «gap financier», laquelle semble éluder cette qualification, probablement pour éviter que l’État assume sa part de responsabilité face au coût de la crise et aux dettes qui en découlent, correspondant notamment aux fonds des déposants.

Pour le secrétaire général de l’ABL, Fadi Khalaf, ignorer le caractère systémique de la crise dans la législation revient à saper les fondements mêmes de toute tentative de redressement. «Si la crise est systémique, comment peut-on espérer la résoudre avec des lois qui en ignorent la nature? Comment se fait-il que les discours officiels invoquent quotidiennement la ‘nécessité de préserver le secteur bancaire’ comme pilier central pour sortir le Liban de l’économie en espèces, tout en proposant des textes qui affaiblissent ce même secteur?», s’interroge-t-il.

Dans son éditorial, M. Khalaf rappelle que les autorités monétaires et financières ont bel et bien reconnu que le Liban traverse une crise systémique, affectant simultanément la structure de l’État et le système financier. Or, regrette-t-il, «le paradoxe flagrant réside aujourd’hui dans la suppression de l’expression ‘crise systémique’ des récents projets de loi, sans justification ni explication logique, comme si ce simple oubli suffisait à masquer la réalité que tous constatent».

Le secrétaire général insiste: toute coopération entre le secteur bancaire et les autorités «ne peut être efficace sans une pleine reconnaissance de la véritable nature de la crise et de son essence systémique, et sans le respect du partenariat institutionnel». Ce partenariat implique la participation de toutes les parties prenantes, et notamment des banques, à l’élaboration des solutions.

Pour M. Khalaf, certains principes sont essentiels pour bâtir des solutions viables: reconnaître le caractère systémique de la crise et rejeter toute responsabilité directe des banques; respecter la décision du Conseil d’État de février 2024 protégeant les droits des déposants; appliquer l’article 113 de la loi de la Monnaie et du Crédit garantissant que l’État couvre les pertes de la Banque centrale et rembourse intégralement les dépôts; refuser la radiation des actifs bancaires sous prétexte de réduire la dette publique; intégrer les fonds levés par les banques dans de futures recapitalisations et assurer l’égalité entre détenteurs d’euro-obligations, nationaux et étrangers.

«Ces principes constituent le socle de protection du secteur bancaire et des fonds des déposants, conditions sine qua non pour toute reprise économique durable», a souligné M. Khalaf. «Le secteur bancaire, bien qu’ayant subi de plein fouet la crise, reste convaincu qu’une coopération constructive avec les autorités est la seule voie vers des solutions viables», a-t-il poursuivi.

Et de conclure avec un avertissement clair: «Il est grand temps que l’État reconnaisse que la voie du redressement ne passe pas par la radiation simultanée des dépôts et des banques, mais par l’acceptation de sa responsabilité première dans la crise et par des actions concrètes, au lieu de se contenter de belles paroles».

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