«L’homme doit s’appuyer sur le passé et tendre vers l’avenir», nous dit Henri Bergson. De ce siècle dernier où notre pays a connu diverses occupations, la famine, des guerres et des misères, nous allons retenir l’édification d’une nation, son impact dans le monde, son rayonnement culturel et sa formidable vitalité. Mois par mois, un peu de ces petites lucioles d’hier pour éclairer notre chemin vers demain.
Avec passion et dévotion, la culture s’est frayé un chemin au tout début du siècle dernier avec, en janvier 1900, la première pierre de ce qui allait devenir le Post Hall et abriter le musée de l’AUB. Dans le testament de Nicolas Ibrahim Sursock, décédé le 1er janvier 1953, une volonté éclairée: celle de léguer son palais à la municipalité de Beyrouth pour en faire un musée d’art national. Après avoir été réquisitionné en avril 1955 par l’État libanais pour accueillir des hôtes de marques, dont le premier sera Hussein de Jordanie, il sera finalement et définitivement sacré Musée Sursock en novembre 1961. C’est le 23 janvier 1965 que, sur une initiative du Président Fouad Chéhab, la Maison de l’Artisan, relevant de l’Office de développement social et réalisée par les architectes Nehmé, Aractingi et Nassar, est officiellement inaugurée à Minet el-Hosn. L’artisanat local, qui fait vivre tant de villages, prendra ses aises sur plus de 900 m2.
Sabah
Les sous-sols du Liban sont d’une richesse inépuisable. Ainsi, en janvier 1919, juste au sortir de la guerre, une première mouture du Service de l’archéologie et des beaux-arts se forme pour réunir les objets provenant des fouilles des missions françaises opérant sur le territoire et qui se poursuivront sans relâche durant le Mandat français. Le Comité des amis des musées nationaux et des sites archéologiques sera fondé le 10 janvier 1923. Formé de figures libanaises éminentes, dont Henri Pharaon, Camille Eddé, Alfred Sursock, Omar Daouk et Georges Corm, une de ses missions sera de recueillir des fonds pour établir un musée national. En janvier 1929, c’est le site de Baalbeck qui est fouillé alors qu’il faudra attendre janvier 1961 pour voir apparaitre les vestiges de thermes romains à Deir el-Qalaa, à Beit Mery. Le site a été fouillé à maintes reprises, mais apparemment n’a pas fini de révéler ses splendeurs. Le 25 janvier 1973 disparaît Henri Seyrig, qui a occupé une place de choix dans le domaine de l’archéologie au Liban. Fidèle ami du Liban, il avait créé l’Institut français d’archéologie et dirigé la revue Syria. Plus près de nous, et au lendemain de la guerre, lors des formidables fouilles qui ont eu lieu au centre-ville, Dr Saghié et son équipe de l’Université libanaise ont dégagé, le 11 janvier 1997, un premier tronçon du Cardo Maximus, qui était la voie romaine principale qui traversait Beyrouth.
Johnny Halliday
Les nouveaux bâtiments de l’Institut des lettres orientales et de la Bibliothèque orientale sont inaugurés le 19 janvier 1939. Avec plus de 100.000 ouvrages à l’époque (aujourd’hui plus de 400.000) la Bibliothèque attire vite les orientalistes férus de recherche. L’École supérieure des lettres, destinée à former des enseignants en langue française, est inaugurée le 9 janvier 1945 en présence de Gabriel Bounoure qui, après un long séjour au Liban, aura ces superbes mots: «J’ai longtemps habité le plus beau pays du monde». Très active sur le plan social, c’est à Zalfa Chamoun que l’on doit l’Institut des aveugles qui ouvre ses portes à Warwar le 9 janvier 1958.
Côté littérature, Elias Abou Chabké, poète et homme de lettres libanais, nous quitte le 26 janvier 1947 à l’âge de 43 ans, en laissant de nombreuses publications. En janvier 1958, disparaît Habbouba Haddad dont le parcours est des plus intéressants. Elle a réussi, malgré les pressions de la société, à créer en 1920 une revue féminine, Al Hayat-el-Jadida, a longtemps tenu un salon littéraire et a animé une émission pour enfants à la radio. Le 7 janvier 1963, le Liban pleure Charles Ammoun, écrivain, ambassadeur du Liban à l’Unesco et délégué auprès du bureau de l’ONU. En janvier 1964, les Éditions du Mercure publient La description de l’homme, du cadre et de la lyre, un recueil de poèmes de l’un de nos plus remarquables auteurs, Fouad Gabriel Naffah. Dans l’admiration béate des années, Au milieu des splendeurs de neige et de verdure, Et parmi les saisons à quatre procédures, trône aux abords du ciel le Liban éternel. En janvier 1971, ce sont les Éditions Dar el-Nahar qui publieront le dernier ouvrage de Farjallah Haïk, Lettre d’un barbare aux civilisés, qui, en raison de propos critiques à l'endroit de la civilisation occidentale, avait été refusé en France. Le 18 janvier 1982, et grâce à l’initiative de Camille Aboussouan, l’exposition Le Livre et le Liban s’ouvre à la Maison de l’Unesco avec des ouvrages en éditions originales en langues phénicienne, grecque, latine, syriaque, arabe, turque, persane et éthiopienne. Le grand, l’immense Georges Schéhadé, titulaire du Grand prix de la Francophonie, décerné par l’Académie française en 1986, s’en va le 17 janvier 1989, laissant derrière lui une œuvre de référence, dont L’Émigré de Brisbane, inscrit au répertoire de la Comédie française.
Elias Abou Chabké
Seule la musique est à hauteur de la mer, a dit Camus. Et, pour un peuple aussi remuant que les Libanais, des musiciens à la hauteur. C’est le 20 janvier 1959 que le jeune Henri Ghoraieb, qui commence à se tailler une jolie place à l’international, donne un récital de piano au West Hall. Les Jeunesses musicales, créées en 1954, repartent du bon pied avec un nouveau comité, le 30 janvier 1962, et proposent des musiciens de renom à un auditoire libanais connaisseur. En 1963, alors que le tourisme bat son plein et que les artistes internationaux se bousculent à l’AIB, le Liban se heurte au puritanisme de Kamal Joumblatt, alors ministre de l’Intérieur. Agacé par la vie nocturne effrénée, il commence par imposer un éclairage «comme il faut» aux «stéréos», comme on appelait les boîtes de nuit de l’époque. Il interdit l’accès des cabarets aux moins de dix-huit ans, et interdit aussi les spectacles de striptease. Et c’est Johnny Halliday qui paiera les frais de l’arrêté de décembre 1962 interdisant le twist! Arrivé le 10 janvier 1963 et accueilli par une foule en délire, le «roi du twist» devait se produire au Théâtre du Liban. Cependant, un arrêté d’expulsion est émis à son égard et c’est dans l’indignation générale et malgré toutes les tentatives du Casino, de la presse et de ministres influents que Johnny a dû quitter, les larmes aux yeux, le pays où il ne chantera pas. En revanche, ce sera la féérie à Jeïta, le 11 janvier 1969, avec trois concerts de musique contemporaine de François Bayle. Grâce à une idée du spéléologue Sami Karkabi, le Conseil national du tourisme a mené d’une main de maître cette incursion de l’électro dans une grotte millénaire, en présence de plusieurs personnalités internationales. Le 20 janvier 1997, Gabriel Yared remporte le Golden Globe et le Press Award pour la musique du film The English Patient. Et, le 13 janvier 2009, disparaît un des plus grands monuments de la musique libanaise: Mansour Rahbani. Infatigable compositeur de génie, sa dernière comédie musicale, Le retour du phénix, était encore à l’affiche.
Zalfa Chamoun
Dans le registre des spectacles, les Libanais, dans les années 50 et 60, sont très friands de ballets. C’est au ciné théâtre Capitole que se déroulent la plupart des représentations de l’époque. Après la Troupe française de ballet en janvier 1956, c’est l’ensemble des Ballets classiques d’URSS qui ravit les amateurs fin janvier 1960. Maurice Béjart fera, en janvier 1963, une visite à Baalbeck pour se familiariser avec les lieux qui accueilleront en été son spectacle Prométhée. Le 20 janvier 1966, Mijana, le deuxième spectacle de Roméo Lahoud au Théâtre Phoenicia, réunit plus de 40 danseurs et chanteurs ainsi que la flamboyante Sabah. Sabah qui triomphera en janvier 1969, sur la mythique scène de l’Olympia, dans Les Nuits libanaises, avec tout le folklore libanais et la compagnie Roméo Lahoud. Dabké et mawwal vont enchanter les présents, de nombreuses nationalités, séduits par la musique de Walid Gholmieh. Ce sera le début d’une longue tournée en Europe. Élue en janvier 1969, Salwa Saïd est la nouvelle présidente du Comité de Baalbeck. Elle remplace Aimée Kettaneh qui a dirigé le comité depuis sa création, en 1956. La guerre n’empêche pas les frères Rahbani de concevoir et de présenter au Picadilly, en janvier 1978, Pétra dont Feyrouz est la reine, sur une scénographie de Abdel-Hamid Caracalla et dans des costumes signés Papou Lahoud.
La suite de cet article 2/2: demain, lundi 30 janvier
Avec passion et dévotion, la culture s’est frayé un chemin au tout début du siècle dernier avec, en janvier 1900, la première pierre de ce qui allait devenir le Post Hall et abriter le musée de l’AUB. Dans le testament de Nicolas Ibrahim Sursock, décédé le 1er janvier 1953, une volonté éclairée: celle de léguer son palais à la municipalité de Beyrouth pour en faire un musée d’art national. Après avoir été réquisitionné en avril 1955 par l’État libanais pour accueillir des hôtes de marques, dont le premier sera Hussein de Jordanie, il sera finalement et définitivement sacré Musée Sursock en novembre 1961. C’est le 23 janvier 1965 que, sur une initiative du Président Fouad Chéhab, la Maison de l’Artisan, relevant de l’Office de développement social et réalisée par les architectes Nehmé, Aractingi et Nassar, est officiellement inaugurée à Minet el-Hosn. L’artisanat local, qui fait vivre tant de villages, prendra ses aises sur plus de 900 m2.
Sabah
Les sous-sols du Liban sont d’une richesse inépuisable. Ainsi, en janvier 1919, juste au sortir de la guerre, une première mouture du Service de l’archéologie et des beaux-arts se forme pour réunir les objets provenant des fouilles des missions françaises opérant sur le territoire et qui se poursuivront sans relâche durant le Mandat français. Le Comité des amis des musées nationaux et des sites archéologiques sera fondé le 10 janvier 1923. Formé de figures libanaises éminentes, dont Henri Pharaon, Camille Eddé, Alfred Sursock, Omar Daouk et Georges Corm, une de ses missions sera de recueillir des fonds pour établir un musée national. En janvier 1929, c’est le site de Baalbeck qui est fouillé alors qu’il faudra attendre janvier 1961 pour voir apparaitre les vestiges de thermes romains à Deir el-Qalaa, à Beit Mery. Le site a été fouillé à maintes reprises, mais apparemment n’a pas fini de révéler ses splendeurs. Le 25 janvier 1973 disparaît Henri Seyrig, qui a occupé une place de choix dans le domaine de l’archéologie au Liban. Fidèle ami du Liban, il avait créé l’Institut français d’archéologie et dirigé la revue Syria. Plus près de nous, et au lendemain de la guerre, lors des formidables fouilles qui ont eu lieu au centre-ville, Dr Saghié et son équipe de l’Université libanaise ont dégagé, le 11 janvier 1997, un premier tronçon du Cardo Maximus, qui était la voie romaine principale qui traversait Beyrouth.
Johnny Halliday
Les nouveaux bâtiments de l’Institut des lettres orientales et de la Bibliothèque orientale sont inaugurés le 19 janvier 1939. Avec plus de 100.000 ouvrages à l’époque (aujourd’hui plus de 400.000) la Bibliothèque attire vite les orientalistes férus de recherche. L’École supérieure des lettres, destinée à former des enseignants en langue française, est inaugurée le 9 janvier 1945 en présence de Gabriel Bounoure qui, après un long séjour au Liban, aura ces superbes mots: «J’ai longtemps habité le plus beau pays du monde». Très active sur le plan social, c’est à Zalfa Chamoun que l’on doit l’Institut des aveugles qui ouvre ses portes à Warwar le 9 janvier 1958.
Côté littérature, Elias Abou Chabké, poète et homme de lettres libanais, nous quitte le 26 janvier 1947 à l’âge de 43 ans, en laissant de nombreuses publications. En janvier 1958, disparaît Habbouba Haddad dont le parcours est des plus intéressants. Elle a réussi, malgré les pressions de la société, à créer en 1920 une revue féminine, Al Hayat-el-Jadida, a longtemps tenu un salon littéraire et a animé une émission pour enfants à la radio. Le 7 janvier 1963, le Liban pleure Charles Ammoun, écrivain, ambassadeur du Liban à l’Unesco et délégué auprès du bureau de l’ONU. En janvier 1964, les Éditions du Mercure publient La description de l’homme, du cadre et de la lyre, un recueil de poèmes de l’un de nos plus remarquables auteurs, Fouad Gabriel Naffah. Dans l’admiration béate des années, Au milieu des splendeurs de neige et de verdure, Et parmi les saisons à quatre procédures, trône aux abords du ciel le Liban éternel. En janvier 1971, ce sont les Éditions Dar el-Nahar qui publieront le dernier ouvrage de Farjallah Haïk, Lettre d’un barbare aux civilisés, qui, en raison de propos critiques à l'endroit de la civilisation occidentale, avait été refusé en France. Le 18 janvier 1982, et grâce à l’initiative de Camille Aboussouan, l’exposition Le Livre et le Liban s’ouvre à la Maison de l’Unesco avec des ouvrages en éditions originales en langues phénicienne, grecque, latine, syriaque, arabe, turque, persane et éthiopienne. Le grand, l’immense Georges Schéhadé, titulaire du Grand prix de la Francophonie, décerné par l’Académie française en 1986, s’en va le 17 janvier 1989, laissant derrière lui une œuvre de référence, dont L’Émigré de Brisbane, inscrit au répertoire de la Comédie française.
Elias Abou Chabké
Seule la musique est à hauteur de la mer, a dit Camus. Et, pour un peuple aussi remuant que les Libanais, des musiciens à la hauteur. C’est le 20 janvier 1959 que le jeune Henri Ghoraieb, qui commence à se tailler une jolie place à l’international, donne un récital de piano au West Hall. Les Jeunesses musicales, créées en 1954, repartent du bon pied avec un nouveau comité, le 30 janvier 1962, et proposent des musiciens de renom à un auditoire libanais connaisseur. En 1963, alors que le tourisme bat son plein et que les artistes internationaux se bousculent à l’AIB, le Liban se heurte au puritanisme de Kamal Joumblatt, alors ministre de l’Intérieur. Agacé par la vie nocturne effrénée, il commence par imposer un éclairage «comme il faut» aux «stéréos», comme on appelait les boîtes de nuit de l’époque. Il interdit l’accès des cabarets aux moins de dix-huit ans, et interdit aussi les spectacles de striptease. Et c’est Johnny Halliday qui paiera les frais de l’arrêté de décembre 1962 interdisant le twist! Arrivé le 10 janvier 1963 et accueilli par une foule en délire, le «roi du twist» devait se produire au Théâtre du Liban. Cependant, un arrêté d’expulsion est émis à son égard et c’est dans l’indignation générale et malgré toutes les tentatives du Casino, de la presse et de ministres influents que Johnny a dû quitter, les larmes aux yeux, le pays où il ne chantera pas. En revanche, ce sera la féérie à Jeïta, le 11 janvier 1969, avec trois concerts de musique contemporaine de François Bayle. Grâce à une idée du spéléologue Sami Karkabi, le Conseil national du tourisme a mené d’une main de maître cette incursion de l’électro dans une grotte millénaire, en présence de plusieurs personnalités internationales. Le 20 janvier 1997, Gabriel Yared remporte le Golden Globe et le Press Award pour la musique du film The English Patient. Et, le 13 janvier 2009, disparaît un des plus grands monuments de la musique libanaise: Mansour Rahbani. Infatigable compositeur de génie, sa dernière comédie musicale, Le retour du phénix, était encore à l’affiche.
Zalfa Chamoun
Dans le registre des spectacles, les Libanais, dans les années 50 et 60, sont très friands de ballets. C’est au ciné théâtre Capitole que se déroulent la plupart des représentations de l’époque. Après la Troupe française de ballet en janvier 1956, c’est l’ensemble des Ballets classiques d’URSS qui ravit les amateurs fin janvier 1960. Maurice Béjart fera, en janvier 1963, une visite à Baalbeck pour se familiariser avec les lieux qui accueilleront en été son spectacle Prométhée. Le 20 janvier 1966, Mijana, le deuxième spectacle de Roméo Lahoud au Théâtre Phoenicia, réunit plus de 40 danseurs et chanteurs ainsi que la flamboyante Sabah. Sabah qui triomphera en janvier 1969, sur la mythique scène de l’Olympia, dans Les Nuits libanaises, avec tout le folklore libanais et la compagnie Roméo Lahoud. Dabké et mawwal vont enchanter les présents, de nombreuses nationalités, séduits par la musique de Walid Gholmieh. Ce sera le début d’une longue tournée en Europe. Élue en janvier 1969, Salwa Saïd est la nouvelle présidente du Comité de Baalbeck. Elle remplace Aimée Kettaneh qui a dirigé le comité depuis sa création, en 1956. La guerre n’empêche pas les frères Rahbani de concevoir et de présenter au Picadilly, en janvier 1978, Pétra dont Feyrouz est la reine, sur une scénographie de Abdel-Hamid Caracalla et dans des costumes signés Papou Lahoud.
La suite de cet article 2/2: demain, lundi 30 janvier
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