Malgré des coûts de développement faramineux, le métavers, censé révolutionner l’usage d’internet, n’est encore qu’une série d’îlots virtuels plus ou moins déserts. Pourtant, les entreprises les plus investies continuent à y croire.

Si le métavers est vide, " c’est parce que les produits sont mauvais ", tranche Joël Hazan, associé au Boston Consulting Group. Selon cet expert, qui a conduit une étude dans six pays occidentaux, 52 % des sondés connaissent le concept de métavers et 16 % ont interagi avec l’un de ces mondes virtuels (46 % chez les 18-24 ans). Mais les expériences qui ont du succès sont celles qui ont précédé l’émergence du concept de métavers lui-même : les jeux ultras populaires " Roblox ", " Minecraft " et " Fortnite " ou le monde virtuel " VRChat ".

En revanche, les plateformes plus récentes comme The Sandbox ou Decentraland, qui s’appuient sur des cryptomonnaies pour se financer et veulent encourager l’échange de biens numériques, ne comptent que quelques milliers d’utilisateurs réguliers prêts à y dépenser de l’argent.

" Je ne suis pas inquiet ", assure à l’AFP le cofondateur de The Sandbox, Stéphane Borget, rencontré lors du Web Summit à Lisbonne. Selon lui, entre 30.000 et 40.000 utilisateurs ont interagi quotidiennement avec la plateforme cet été. " Les gens sont intéressés par le métavers. Les marques continuent d’affluer et plus de 230 studios produisent désormais du contenu ", insiste-t-il.

Pourtant, même Meta (ex-Facebook), qui a engagé plus de 10 milliards de dollars pour développer l’univers " Horizon Worlds ", a dû revoir ses ambitions à la baisse. " Beaucoup d’entre nous ne passent pas tellement de temps sur “Horizon” ", a écrit Vishal Shah, le vice-président du groupe chargé du métavers, dans une note à ses employés mi-septembre, reprise par le média The Verge.

Il y rapportait des retours d’expérience peu flatteurs et s’interrogeait : " Si nous n’adorons pas (la plateforme), comment pouvons-nous espérer que nos utilisateurs l’adorent ? " Sur la dizaine de milliers de " mondes " existants sur la plateforme, seuls 9 % reçoivent chaque mois plus de 50 visiteurs, selon des documents obtenus par le Wall Street Journal.

Cela pourra-t-il s’améliorer grâce au partage de revenus avec les créateurs et à l’ajout de jambes pour les avatars, comme l’a annoncé le patron du groupe, Mark Zuckerberg ? " Pour que ça fonctionne, il faut que des développeurs trouvent que le casque (de réalité virtuelle) Quest est super, qu’ils aient envie d’y développer des applications. Cette dynamique-là n’est pas du tout engagée ", explique Joël Hazan.

Bien loin d’être résignés, les promoteurs du métavers tentent aujourd’hui de trouver des solutions techniques pour y accueillir des foules de plus en plus grandes. Ainsi, la société britannique Improbable développe depuis près d’une décennie un système permettant d’accueillir jusqu’à " 20.000 personnes dans le monde entier interagissant en temps réel avec leur propre voix " au sein d’un même espace virtuel.

Cela permettrait aux stars de la musique, aux sportifs célèbres ou aux marques de démultiplier leur présence auprès de leurs fans, a vanté son dirigeant Herman Narula, lors du Web Summit.

Improbable s’est associé cette année à Yuga Labs, le champion des NFT (jetons non fongibles), qui possède notamment la collection du " Bored Apes Yacht Club ", dont il veut tirer un jeu vidéo baptisé " Otherside ". Un premier test en juillet, sans réalité virtuelle, a permis à quelque 4.500 " voyageurs " de plonger en même temps au cœur du jeu, mais aucune date de sortie n’a encore été fixée. Le métavers est " un immense pari et il est important de prendre des risques pour innover ", a dit Naomi Gleit, la directrice des applications de Meta, interrogée sur la scène du Web Summit.

" Il y a tant d’entreprises qui innovent sur ce sujet. Je pense que cela arrivera avec ou sans Meta ", a-t-elle ajouté.

AFP

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