Le parti Kataëb et un député des Forces libanaises, Ghayath Yazbeck, ont vivement réagi aux propos, pour le moins inhabituels, du mufti jaafari, Ahmad Kabalan, porte-parole officieux du Hezbollah, au sujet de Bkerké.

Les deux ont jugé "inacceptable" que le mufti, dont la principale mission est de répondre, chaque dimanche, au volet politique de l’homélie du patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, appelle le chef de la diplomatie vaticane, Mgr Pietro Parolin, à "réformer l’Église", simplement parce que le dernier sermon de Mgr Raï, n’a pas plu au camp qu’il défend.

Dans son homélie, dimanche, Mgr Raï avait de nouveau plaidé en faveur de la neutralité du Liban et appelé à l’élection, d’un président qui "veillerait à ce que le Liban ne soit plus une rampe de lancement pour des actes terroristes qui compromettent la sécurité et la stabilité de la région". Des propos qui ont tellement déplu au Hezbollah et ses alliés qu’ils ont boycotté lundi la rencontre islamo-chrétienne de Bkerké, autour de Mgr Parolin.

Dans le même temps, le mufti Kabalan dressait, dans un "appel" au numéro 2 du Saint-Siège, un véritable réquisitoire contre Mgr Raï, mais sans le nommer. Il l’a pratiquement accusé de "faire la politique d’Israël" et de "cautionner le massacre d’innocents à Gaza", mais en empruntant à l’Église certains de ses concepts qu’il a déformés au service de son argumentation. Parallèlement, il a fait l’apologie de l’axe auquel il appartient, le présentant comme le défenseur des Églises d’Orient, au Liban, en Syrie, en Irak et dans les territoires palestiniens, mais aussi de "tous les opprimés de la région". Cheikh Kabalan a conclu son pamphlet contre Bkerké en affirmant: "Nous n’accepterons pas que l’Église exploite autre que la parole de Dieu. Opérez une réforme et interdisez les voix qui s’expriment à l’encontre du droit. La réforme, le droit et le secours apporté aux victimes d’injustice et de supplices sont communs aux deux religieux chrétienne et mahométane".

Il a en outre appelé à l’élection d’un "président chrétien qui se dévoue aux musulmans autant que la résistance musulmane se dévoue aux Églises des chrétiens et se sacrifie pour elle".

Réuni sous la présidence de son leader, Samy Gemayel, le parti Kataëb a fustigé les propos du mufti, dans lesquels il a vu "une provocation flagrante contre le rôle de Bkerké et une note confessionnelle détestable, jamais vue, même aux pires moments de la guerre" de 1975.

Les Kataëb ont accusé le camp auquel cheikh Kabalan appartient de "chercher encore une fois à museler les voix opposantes" et mis en garde contre les tentatives de "conférer aux conflits politiques une dimension confessionnelle". Et d’insister: "Le conflit au Liban se situe aujourd’hui entre deux projets: le premier cherche à hypothéquer le pays pour le rattacher à son axe (pro-iranien) et l’entraîner vers sa ruine. Le second s’efforce de le sauver et de rétablir sa souveraineté pour en faire de nouveau un État au sein duquel les Libanais seront égaux aux niveaux des droits et des obligations".

Sur son compte X, le député Ghayath Yazbeck a violemment critiqué cheikh Kabalan, dénonçant un discours "offensant qui essaie de séduire les fondamentalistes, en ciblant les maronites et leur patriarche à l’aide d’une rhétorique vile, masquée par un respect du Christ".

Dans une déclaration, le chef du Mouvement de changement, Elie Mahfoud, a reproché au mufti de "se faire le porte-parole d’un groupe qui s’est écarté depuis longtemps de la culture de la République libanaise" et de "tenir un discours confessionnel". Il l’a invité à "revenir aux préceptes défendus par de grands leaders libanais, comme les imams Moussa el-Sadr et Mohammed Mehdi Chamseddine".

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