Écoutez l’article

Le soir où j’ai commencé à faire mes valises pour rentrer au Liban, une étrange mélancolie m’a envahie. J’étais face à un choix, mais étais-je vraiment convaincue? Des semaines plus tôt, j’avais tenté de vendre le rêve libanais à ma fille de cinq ans. J’ai raconté l’histoire de la mer et de la montagne, ces trente minutes imaginaires qui les séparent, le kebbé, la téta et le jeddo, tout pour la convaincre de quitter son havre en Île-de-France et de retrouver le pays du Cèdre.

Je suis revenue au pire moment de l’histoire récente du Liban: une crise économique aiguë, un nœud politique inextricable et une insécurité omniprésente. Pendant que j’écris ces lignes, un drone israélien survole Beyrouth, et un message vocal de la responsable du syndic m’informe que l’abri de l’immeuble est en cours de nettoyage.

Nous sommes donc rentrés à Beyrouth en plein été, bercés par le slogan aznavourien: "Il me semble que la misère serait moins pénible au soleil." Pourtant, le soleil ne peut protéger un enfant d’un conflit interminable. Il ne pourra jamais expliquer à un être humain ce qu’est un mur de son franchi. Il n’aidera pas à trouver un refuge pour ceux que l’on aime.

Cependant, au milieu de ce chaos, une certitude émerge: ici, on apprend à aimer, malgré les divergences. Ici, on apprend à patienter, même face à la douleur. Ici, on partage, même dans la souffrance, et ici, ça vaut le coup malgré tout.

À ma fille, je dirai: si jamais nous nous en sortons, excuse ma folie, excuse mes délires.

Un jour, si nous survivons, tu sauras que ce pays minuscule est le monde entier. Tu réaliseras que le Liban est un miracle, parfois une fin de non-recevoir, mais souvent une terre d’accueil. Peut-être une bande de corrompus, mais aussi un foyer de talents inconditionnels. Un chaos parfois infini, mais une liberté absolue pour toujours. Ici, ma fille, au Liban, ça vaut le coup. Alors accroche-toi, ce n’est que le début…

Abonnez-vous à notre newsletter

Newsletter signup

Please wait...

Merci de vous être inscrit !