La radiation des capitaux des banques éliminera les dépôts
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Le gouverneur de la Banque du Liban, Karim Souhaid, a clarifié la situation en déclarant que la crise au Liban n’est pas seulement financière, mais avant tout systémique, dont le secteur bancaire est devenu la victime.

C’est ce qu’il a affirmé sans détour lors de la séance parlementaire consacrée à l’examen du projet de budget 2025, soulignant : « La crise est une crise systémique et non une crise propre au secteur bancaire. »

Dans la même ligne, le ministre des Finances Yassine Jaber a précisé, lors de la Conférence de l’Union des banques arabes tenue le jeudi 18 septembre 2025, que : « La crise actuelle diffère des précédentes, car elle touche l’ensemble du système bancaire, y compris la banque centrale, devenue elle-même un élément de la crise. Elle s’est transformée en une crise du système financier, surtout après la décision du gouvernement libanais, en avril 2020, de suspendre le paiement de sa dette en devises étrangères (eurobonds). »

Les déclarations de Souhaid et Jaber définissent clairement la nature de la crise libanaise. Elles interviennent alors que certains milieux politiques poussent à se soumettre aux conditions du Fonds monétaire international (FMI), présenté comme la seule voie possible pour sortir le Liban de l’impasse et le sauver.

Face à cette dépendance envers le FMI, le gouverneur Karim Souhaid adopte une approche réformatrice différente, visant à protéger les fonds des déposants et à préserver la confiance restante dans le système bancaire.

Cependant, cette démarche, fondée sur une approche équitable et progressive pour résoudre la crise des déposants et mettre en place un plan de restructuration global du secteur bancaire, a irrité les milieux financiers et politiques proches du FMI, qui ont lancé une campagne virulente contre le gouverneur.

Le Code de la monnaie et du crédit est clair : la gestion des dépôts relève de la responsabilité du gouvernement !

Dans ce contexte, le Code de la monnaie et du crédit précise clairement les limites du rôle de la Banque du Liban dans la crise :

  • La Banque est indépendante selon l’article 13,
  • Sa mission, d’après les articles 70 et 72, se limite à maintenir la stabilité monétaire et bancaire, et non à supporter les pertes de l’État.
  • Les articles 81 à 92 stipulent que le financement de l’État n’est qu’une exception temporaire,
  • Tandis que l’article 113 oblige le gouvernement à recapitaliser la Banque si son capital devient négatif.

Malgré la clarté de ces dispositions, les pressions internationales — sous l’influence du FMI — tendent à écarter la responsabilité de l’État dans les pertes, en poussant vers un plan prévoyant la radiation des capitaux des banques et le transfert du fardeau sur les déposants, avec une indemnisation ne dépassant pas 75 millions de livres libanaises par déposant.

En pratique, cela reviendrait à liquider les banques existantes et à créer de nouvelles banques sans aucune obligation vis-à-vis des anciens dépôts.

Un différend majeur persiste également au sujet d’une dette de 16,5 milliards de dollars que la Banque du Liban réclame à l’État. Le ministère des Finances aurait utilisé ces fonds pour honorer certaines échéances et paiements d’eurobonds, les inscrivant initialement comme dette temporaire avant de revenir sur sa reconnaissance après l’effondrement du taux de change.

Par ailleurs, il est question d’un audit rétroactif remontant à 2017, sans critères clairs, ce qui pourrait servir à justifier davantage l’effacement des dépôts, alors que les banques et les déposants sont exclus des négociations visant à combler le déficit financier.

Dans ce contexte, plusieurs questions essentielles se posent :

  • Qui remboursera les dépôts si les banques actuelles sont dissoutes et remplacées par de nouvelles ?
  • Les nouvelles banques assumeront-elles ce coût ?
  • Comment préserver les relations avec les banques correspondantes internationales ?
  • Et qui financera l’économie pendant la phase de redressement ?

En résumé, la crise actuelle n’est pas seulement un déficit financier, mais un combat pour déterminer qui doit en supporter le coût : l’État, comme le prévoit la loi… ou les déposants, qui en paient le prix depuis 2019 ?

 

 

 

 

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