"L’homme doit s’appuyer sur le passé et tendre vers l’avenir", nous dit Henri Bergson. De ce siècle dernier où notre pays a connu diverses occupations, la famine, des guerres et des misères, nous allons retenir l’édification d’une nation, son impact dans le monde, son rayonnement culturel et sa formidable vitalité. Mois par mois, un peu de ces petites lucioles d’hier pour éclairer notre chemin vers demain.

Sur les planches, les Libanais adorent le théâtre français et se régalent durant les années 60 avec les grandes pièces et leurs interprètes de renom. Danielle Delorme jouera dans L’Annonce faite à Marie de Paul Claudel le 18 janvier 1963 et dès 1964 c’est en janvier et traditionnellement que commencera la ronde du théâtre français jusqu’aux portes de l’été. Le théâtre libanais émergera en force dès la fin des années 60 avec notamment Jalal Khoury qui présente Géha dans les villages frontaliers en janvier 1971. Un an plus tard, c’est Chouchou qui régale au Théâtre national avec un spectacle pour les enfants, Les Histoires drôles de l’oncle Chouchou. On n’oublie pas Samy Khayat qui, en janvier 1972 présente sa revue satirique Chambre des futés et en janvier 1974 Gaz Gazna. La guerre ne l’arrêtera pas et Pax Ba’a fin janvier 1977 fait un peu oublier les derniers mois de violences. En janvier 1973 et 1974, c’est Akhouet Chanay de Raymond Gebara avec l’inimitable Nabih Abou el-Hosn qui triomphe au Théâtre du Phoenicia. Durant la guerre, les Six Gales présentent leur revue Chi Metel el-Kezb en janvier 1982 et en janvier 1988, c’est une troupe qui cartonne. Les Chansonniers de la route, Rony Khalifé, Georges Nasr, Serge Gélalian, Joe Raggi et Sami Nader serviront La Folie des Grand’heures à un public très conquis.

Dans le domaine de l’art, ce sont les années 60 qui ont été les plus foisonnantes et riches en couleur au Liban avec des Salons d’automne qui se tenaient chaque année depuis 1952, des vernissages dans les galeries qui fleurissaient à chaque coin de rue. Janvier 1962: vernissage de l’exposition de Brigitte Schéhadé à la galerie Alecco Saab; le 25 janvier 1963, c’est Sophie Yeramian qui expose dans les locaux de L’Orient et Khalil Zgheib dévoile ses toiles le 21 janvier 1965 à la Galerie One. En janvier de chaque année débutaient les conférences de Dar el-Fan et en janvier 1968, l’Unesco organise une très remarquée Rétrospective de l’art contemporain avec entre autres César Gemayel, Aref Rayess, Moustapha Farroukh, Omar Onsi, Saloua Rawda Choucair, Amin el-Bacha. Les peintres libanais brilleront au-delà des frontières et le 11 janvier 1993 est organisée à l’Institut du monde arabe à Paris une exposition de Saliba Douaihy qui nous quittera un an plus tard en janvier 1994.

Du côté du 7e art, les Libanais ne sont pas en reste puisque le premier studio libanais, Lumnar, voit le jour en janvier 1935. Les cinémas fleurissent pour le plus grand plaisir des Libanais et l’Empire et le Roxy présentent les dernières réalisations européennes et américaines. Le 16 janvier 1946, pour percer une artère dans le centre-ville, on sacrifie le cinéma Royal. Les ciné-clubs aussi ont la cote et le premier sera inauguré le 7 janvier 1958 au Collège des Frères de la Salle avec un film de Bresson, Les Dames du Bois de Boulogne. Dans les années 60, il est de coutume que les vedettes viennent assister à Beyrouth à la première de leur film et c’est ainsi que le 8 janvier 1961 Maria Schell est présente pour la sortie de son film As the Sea Rages. Durant ces années-là, les tarifs des séances donneront lieu à de multiples manifestations et le 27 janvier 1965, le ministre de l’Économie fixera les prix: ce sera 100 piastres les places orchestres, 150 piastres les places balcons. La censure sévit sur les films publicitaires et les disques importés à partir de janvier 1959 et en 1962, ce seront les films qui seront soumis à la surveillance.

Depuis les Orientalistes en quête de dépaysement, le Liban a toujours représenté une destination de choix. Et dans le Liban des années 60, il y avait tout un pays et un art de vivre à faire découvrir au reste du monde. Le 11 janvier 1962, une association pour la promotion du tourisme au Liban voit le jour. Le Conseil national du tourisme, avec pour président Charles Hélou, va dès lors faire des merveilles avec une augmentation conséquente des touristes chaque année. Des bureaux étaient ouverts dans chaque capitale d’Europe en vue de promouvoir l’idée du Liban partout. On venait au Liban en toute saison pour les paysages, les fêtes, la délicieuse cuisine, les vestiges archéologiques, le ski, les plages et les festivals. En 1971, plus de 825.000 étrangers sont venus au Liban. La presse internationale était dithyrambique quant aux nombreux avantages de ce si joli petit pays. Les Anglais iront même en janvier 1968 instaurer au Liban les 4 S pour Sun, Sea, Sands and Sexy.

Durant deux années consécutives en janvier 1959 et 1960, l’abbé Pierre est venu donner des conférences durant lesquelles il a notamment dit: "Vous êtes l’un de ces si rares lieux de la terre où peut être faite la démonstration de l’unité fondamentale de la famille humaine." Délégué des Nations unies, Yul Bynner viendra en janvier 1960 en mission humanitaire auprès des camps palestiniens et la première femme cosmonaute atterrit à Beyrouth le 26 janvier 1964 pour rencontrer le gotha mais aussi des étudiants. Venue poser pour un reportage pour Mademoiselle Âge tendre, France Gall est accueillie par une météo surprenante. Il fait en effet zéro degré à Beyrouth en ce mois de janvier 1967.

La première motion réclamant le droit de vote aux femmes sera déposée au Parlement le 12 janvier 1944. Mais il faudra attendre. Entre-temps, le sexe féminin s’active et organise une Semaine de la femme en janvier 1952 pour défendre les droits politiques. Pour la première fois dans l’histoire de Beyrouth, trois femmes, Laure Tabet, Ibtihaje Kaddoura et Hélène Rihan siègent en janvier 1953 à la réunion des conseillers municipaux de la ville. Et la première femme à siéger dans un tribunal sera Georgette Chidiac Arbid en janvier 1969. En janvier 1968, une école surprenante voit le jour. Fondée par Linda Noujaim et Antoinette Husussian, "Femme d’aujourd’hui" s’est fixé pour but de prodiguer des conseils aux jeunes filles pour être au top de leur forme et savoir se mettre en valeur avec élégance et finesse. Si l’on reste dans le féminin, nous pouvons mentionner le nouvel uniforme jaune et orange signé Carven qui habillera dès janvier 1968 les hôtesses de la MEA. La disparition de la couturière des élégantes libanaises mais également arabes, en janvier 1969, laisse tous les cœurs inconsolés. Mme Salha avait entre autres conçu les robes de notre Sabbouha pour ses spectacles.

Parmi les dates à retenir de ce mois de janvier qui, au lendemain des fêtes, se pare de blanc et de froideur le 19 du mois de l’année 1925 où la nationalité libanaise vient d’être officiellement instituée. Les premières cartes d’identité sont alors émises et, pour couper court à toute polémique, exigées lors de toute formalité. Contrairement à ce que l’on peut penser, c’est en 1949, le 19 janvier toujours, que le directeur de la police d’alors décide de diviser la capitale en Beyrouth-Est et Beyrouth-Ouest. Le 11 janvier 1955, l’horloge parlante entre en piste en français et en arabe. En janvier 1959, L’Orient publie les résultats d’un référendum sur les hommes les plus élégants du Liban et c’est Camille Chamoun qui se hisse en tête du peloton. Pour les femmes ce sera May Arida. Nous ne dévoilerons pas le top ten des moins élégants. C’est le 24 janvier 1958 qu’est posée la première pierre des nouveaux bâtiments de la radiodiffusion à Sanayeh. Le 22 janvier 1969, une partie de la corniche sera, sur ordre de la municipalité de Beyrouth, baptisée Avenue du Général de Gaulle alors qu’on l’appelait Corniche Chouran.

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