Dans la catégorie du meilleur documentaire, cinq courts-métrages sont nommés aux Oscars 2023. Ce qui pourrait être une révélation de l’appétit du public pour ce genre de format cinématographique. Les cinq films documentaires sont: Haulout, Stranger at the Gate, How Do You Measure a Year, Réduite au silence: l’effet Martha Mitchell et Ceux qui murmuraient à l’oreille de l’éléphanteau.

Aperçu général sur les courts-métrages nommés aux Oscars

Haulout est un film qui tire la sonnette d’alarme face aux ravages du changement climatique causé par l’homme et qui affecte la fonte de la banquise en Sibérie.

Stranger at the Gate, également co-produit par le New Yorker, raconte l’histoire d’un vétéran de l’armée américaine, rongé par la haine, qui projette de faire sauter une mosquée avant d’être désarmé par l’accueil chaleureux des fidèles. La lauréate du prix Nobel de la paix, Malala Yousafzai, est la productrice exécutive du court-métrage.

How Do You Measure a Year? propose un montage d’entretiens tournés chaque année par le réalisateur Jay Rosenblatt avec sa fille, entre ses 2 et 18 ans.

Produit par Netflix, Ceux qui murmuraient à l’oreille de l’éléphanteau expose les liens d’affection entre un couple indien et les bébés animaux dont il a la charge.

Le géant du streaming, pour qui le genre figure régulièrement en tête des contenus les plus regardés de sa plateforme, propose également Réduite au silence: l’effet Martha Mitchell, une compilation d’images d’archives sur une femme en marge du scandale du Watergate.

Une loupe sur Haulout

Sur une côté isolée de l’Arctique sibérien, dans une hutte battue par les vents, un scientifique attend le rassemblement de milliers de morses qui viennent se reproduire ici chaque année. Mais le réchauffement climatique a clairement changé la donne.

Lorsque le biologiste marin Maxim Chakilev ouvre la porte de sa cabane sibérienne délabrée, dans son mini-documentaire, pour se retrouver face à 100.000 morses qui râlent, s’agitent et s’entrechoquent, le spectateur en prend plein les yeux. Pendant près de deux minutes, la caméra est plongée au cœur d’un théâtre naturel étourdissant, rempli de colosses qui grognent et se bousculent. Pièce maîtresse de ce film de 25 minutes sur l’impact du changement climatique sur la nature, cette scène illustre la manière dont les mini-documentaires s’imposent actuellement en tant que forme d’art à part entière, au point de susciter l’intérêt de grandes maisons comme le New Yorker et Netflix.

"La vidéo est un média très puissant, et, à l’heure actuelle, c’est ainsi que de nombreuses personnes obtiennent leurs informations sur le monde", explique Soo-Jeong Kang, directrice exécutive de la programmation et du développement au New Yorker, qui a coproduit le film. Pour le magazine américain, les mini-documentaires sont "à la fois un moyen d’atteindre de nouveaux publics et une plateforme de narration profonde".

Le film quasi-muet Haulout, produit par le duo familial Maxim Arbugaev et Evgenia Arbugaeva, cadre avec l’exigence du prestigieux magazine. Le frère et la sœur ont vécu trois mois dans la hutte rudimentaire du scientifique chargé d’observer les morses. "C’est une expérience cinématographique pure, où vous n’avez pas besoin d’un mot pour savoir de quoi parle l’histoire (…), une extension de cette intersection entre l’art et le grand journalisme", estime Mme Kang.

Le secteur du documentaire

Longtemps dominé par des institutions au ton pédagogique telles que la BBC britannique, PBS aux États-Unis ou Arte en Europe continentale, le secteur du documentaire intéresse désormais l’industrie du divertissement qui se met de plus en plus aux séries documentaires. Rythmé, le genre permet aussi d’aborder des thèmes plus larges, comme le changement climatique et l’identité, avec un vrai écho auprès du public.

Selon le New Yorker, les vidéos publiées sur son site et sa chaîne YouTube cumulent près de 11 millions de vues par mois, et les mini-documentaires figurent en tête de liste. Ce genre se démocratise également grâce aux avancées technologiques. "Ces dernières années, grâce à l’accessibilité et au prix abordable des logiciels de montage et des caméras de haute qualité (…), toute personne qui rêve de réaliser un documentaire a désormais un accès raisonnable à ces outils", reprend Mme Kang. Pour des cinéastes comme Mme Arbugaeva, qui livre avec Haulout une véritable œuvre d’art, cela favorise l’authenticité des récits proposés. "Quand les réalisateurs locaux racontent des histoires sur leur environnement, c’est quelque chose de tellement personnel", insiste l’artiste iakoute, issue du peuple autochtone de Sibérie. "On parle de son propre cœur et du cœur de sa communauté qui se brise."

Marie-Christine Tayah

Avec AFP

Instagram : @mariechristine.tayah

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