Lundi 13 mars 2023, voici une date clé pour le cinéma saoudien en France. Pas moins de 5 courts métrages sont à l’affiche pour le lancement des Saudi Film Nights à la salle Pathé Beaugrenelle à Paris, en présence de cinéastes, réalisateurs, artistes et cinéphiles saoudiens et français, à leur tête le président sortant de l’Institut du monde arabe, M. Jack Lang. Les Saudi Film Nights sont un festival itinérant qui va se dérouler sur plusieurs semaines en France, de manière perlée. Après Paris, il a déjà posé ses valises à Toulouse le 16 mars 2023 et mis le cap sur Montpellier le 18 mars 2023 avant de se clore à Lyon, où les films saoudiens seront présentés dans le cadre de l’inauguration du festival Cinémas du Sud (Lyon-France).

Affiche du festival de Lyon.

 

La soirée d’ouverture de la 23e édition du festival Cinémas du Sud, qui aura lieu le 5 avril 2023 à Lyon, sera dédiée à la jeune création cinématographique saoudienne, en partenariat avec la Commission du film d’Arabie saoudite, avec la présentation du long métrage de 74 minutes Scales, de Shahad Ameen, premier long métrage de la cinéaste, prix de Vérone du film le plus innovant au Festival du film de Venise 2019. Scales raconte l’histoire de Hayat, une jeune fille de 13 ans qui vit sur une île où l’on sacrifie les petites filles à la mer pour nourrir les hommes. Un premier long métrage engagé et formellement impressionnant.

La dernière étape des Saudi Film Nights en France, dans le cadre de l’ouverture du festival Cinémas du Sud, sera une véritable exploration de ce cinéma en pleine effervescence qui, depuis 2021, organise son propre rendez-vous cinématographique à l’échelle internationale, le Festival international du film de la mer Rouge à Jeddah.

Le festival de Lyon, tout comme le lancement à Beaugrennelle, présentera aussi le court métrage La Fête de Dounia, 13 minutes. Un film du jeune Raed Alsamari, prix du meilleur court métrage au Festival de Sundance 2019 et première œuvre diffusée après la levée de l’interdiction du cinéma en Arabie saoudite en 2018.

Il est vrai que le coup d’envoi a été donné le lundi 13 mars dans le 15e arrondissement de Paris, mais les projections se sont poursuivies, notamment le lendemain, à l’École de l’image des Gobelins qui compte parmi ses effectifs des étudiants saoudiens et où les jeunes cinéastes ont eu l’occasion d’échanger avec leurs pairs.

À Beaugrennelle, l’audience a pu aussi découvrir Ourjiha, 14 minutes, déformation de balançoire en français, le film qui a le plus ému le public puisqu’il s’agit de l’histoire de Leen, une petite fille de 10 ans, confrontée au deuil et à la perte de son père. Formées respectivement en Arabie saoudite et à New York, les deux sœurs réalisatrices de Ourjiha, Raneem et Dana Almohandes, sont fusionnelles et travaillent en binôme. Elles ont d’ores et déjà été sélectionnées pour représenter l’Arabie saoudite durant plusieurs manifestations cinématographiques à l’international, comme par exemple en Belgique, à Malte ou encore en France.

Quant à Khaled Zidan, jeune réalisateur de 22 ans, il a présenté dans Othman, 35 minutes, l’histoire d’un agent de sécurité ordinaire, confronté à un événement le faisant sortir de sa routine et le forçant à affronter la réalité. Khaled Zidan déclare vouloir continuer à produire et réaliser des films qui véhiculent une image réaliste du quotidien saoudien en mettant en lumière des personnages à l’image d’Othman, loin des clichés et puisés dans le cœur de la société saoudiennne.

Cofondateur de Bright Frame Productions, Khaled Zidan est le récipiendaire de plusieurs prix dont le Jazan Award pour Creativity (2019) et le Festigious International Award pour Best Young Film Maker ou Meilleur jeune cinéaste.

Salma Mourad, a participé à cette première projection parisienne avec Kabreet, 15 minutes, soit allumette en français. Le court métrage relate le récit d’Osama qui est pris dans une bataille entre ses émotions et sa mémoire alors qu’il essaie de suivre le fil qui lui apportera la réponse. Salma Mourad s’intéresse à la fragilité du psychisme humain et cherche à savoir si nous pouvons faire confiance à notre mémoire et à nos propres narrations.

     

Enfin, Kamel Altamimi nous gratifie d’un film d’animation sur la résilience: Starting Point, 7 minutes. Il déclare vouloir faire des films qui inspirent de l’espoir et de la motivation aux jeunes dans un monde difficile. Kamel Altamimi ajoute: "Nous avons tous nos ‘points de départ’ individuels qui donnent un sens et un but à notre vie. Ainsi, lors des moments de détresse, les gens devraient penser à leur ‘point de départ’ pour trouver un soutien spirituel et une force intérieure afin de continuer à vivre courageusement." Il confie vouloir s’adresser aux jeunes Arabes confrontés à une réalité moins rose et moins linéaire que ce que pourrait leur apporter les films d’animation mainstream tels que les films de Disney qui, en dépit de leur intérêt, ne trouvent pas écho auprès des enfants confrontés à la guerre et aux conflits dès leur bas âge dans le monde arabe.

À Paris, le public d’initiés a pu allègrement échanger avec ces jeunes cinéastes lors d’une réception qui a suivi les projections, le tout dans une ambiance conviviale et interactive. Une audience éclairée qui a été enchantée par l’énergie que dégagent ces cinéastes en herbe, pour la plupart âgés de moins de 30 ans; des jeunes pétillants, pleins d’idées et de créativité, qui portent haut et fort les couleurs de l’Arabie saoudite à l’international.

Asma Abdelkarim