Le terme de symptôme a été emprunté à la médecine qui le conçoit comme un indicateur d’un corps qui souffre et présente un état de maladie, s’écartant de ce qu’on considère comme un état normal. Il signe un dysfonctionnement d’origine organique, observable et mesurable. La guérison médicale implique la disparition du symptôme.

Médecin lui-même, S. Freud a révolutionné la compréhension et l’étiologie de cette notion en psychanalyse. Il l’a dégagée du domaine médical, lui conférant une origine psychique et non plus organique, porteuse d’un savoir inconnu du sujet.

C’est par l’observation clinique qu’il découvre l’origine psychique des symptômes apparus chez ses patients, ce que sa visite à J.-M. Charcot en 1885 lui avait déjà appris. Se pose ainsi pour lui l’énigme suivante: si le symptôme n’a pas une origine organique, quelle peut en être dès lors la cause et la signification?

"Le symptôme est un dire", découvre-t-il, un langage, ou mieux encore, il est le langage de l’inconscient. C’est une sorte de métaphore, un parler qui se substitue à un autre, comme nous le faisons couramment parfois lorsque nous parlons d’une façon imagée, ou comme cela se manifeste dans nos rêves. Dans Il Postino, le film de M. Radford, Mario, un facteur passionnément amoureux se retrouve pratiquement mutique devant Béatrice, l’objet de sa flamme. Sa rencontre avec Pablo Neruda et l’usage que fait celui-ci de la métaphore dans ses poèmes l’introduit à un univers magique qui lui était totalement inconnu, celui de la création d’un langage fait de mots captateurs qui se substituent à d’autres, trop banals. Mario crée alors des expressions d’une telle puissance poétique que, subjuguée, la belle Béatrice en tombe amoureuse. Il en est ainsi du symptôme, création éminemment perturbatrice, langage métaphorique de l’inconscient.

Freud l’a souvent répété: "Chaque symptôme a un sens et se rattache étroitement à la vie psychique du malade." La singularité du message symptomatique c’est que son sens est spécifique à un sujet particulier. Il n’y a pas à proprement parler un sens général au symptôme qui équivaudrait à une explication universelle. Mais ce sens échappera tant qu’un sujet ne l’offre pas à l’écoute d’un psychanalyste, ce qui l’amènera progressivement à la résolution de l’énigme du sens. Freud le qualifie de rébus, de hiéroglyphe dont le sens doit être déchiffré.

L’histoire du petit Hans relatée par le psychanalyste viennois dans Cinq psychanalyses en est un bon exemple: Hans est un enfant âgé de cinq ans qui ne pouvait plus sortir de sa maison à cause de sa peur d’être attaqué par un cheval. À son père qui lui raconte toute l’histoire et qui demande son aide, Freud explique que ce symptôme de phobie est lié à un conflit œdipien non résolu, dans lequel Hans substitue le cheval à son père, sa véritable peur étant la punition qu’il imagine que son père lui infligera, résultant de son fantasme de vouloir le remplacer auprès de sa mère.

Le milieu socioculturel n’échappe pas à sa responsabilité dans la formation du symptôme. Dans l’un de ses textes, S. Ferenczi l’en blâme parce que les exigences sociétales s’imposent de manière "égoïste" lorsqu’elles cherchent à assujettir les sujets à des normes qui ne tiennent aucunement compte des particularités de leur développement psychique.

La meilleure protection contre la névrose est encore de suivre Freud lorsqu’il recommande à l’être humain d’entrer dans ses profondeurs psychiques afin d’apprendre à mieux se connaître. "Alors, nous dit-il, tu comprendras pourquoi tu dois devenir malade, et tu éviteras peut-être de le devenir."