Depuis 2019, le Liban est en proie à un phénomène croissant: l’émigration clandestine. L’été 2022 a vu exploser le nombre de départs via la mer Méditerranée, devenue la seule échappatoire pour des milliers de personnes fuyant le pays du Cèdre.

Les candidats au départ proviennent essentiellement des gouvernorats du Liban-Nord et du Akkar, qui comptent parmi les régions les plus pauvres du pays. La majorité d’entre eux sont des réfugiés syriens, mais la part de réfugiés palestiniens et de Libanais parmi les émigrés clandestins est de plus en plus importante.

Rebaptisés " les bateaux de la mort " après le naufrage de Qalamoun en avril dernier – qui a coûté la vie à 84 personnes –, les navires relèvent de réseaux qui agissent principalement en petites cellules disparates. Ces passeurs imposent des prix faramineux, oscillant entre 6.000 et 8.000 dollars. Mais les politiques restrictives de visa, la difficulté d’obtenir un passeport ou l’apatridie sont autant d’obstacles qui empêchent les habitants de ces régions d’envisager une autre solution pour émigrer.

La réaction de l’État est limitée – voire inexistante – dans des régions depuis longtemps oubliées et paupérisées. Non que le fait de fuir par la mer soit nouveau pour Tripoli et sa région, mais les candidats au départ se faisaient rares, et leur but était par le passé d’éviter les combats. Aujourd’hui, c’est la paupérisation – in fine l’absence d’État – qui les pousse désormais à s’embarquer illégalement au péril de leur vie.