La nuit du 3 février 2021, Lokman Slim a été retrouvé assassiné dans sa voiture, après avoir été la cible de 6 balles d’une arme automatique munie d’un silencieux. La victime était auparavant proie à des menaces et des séries d’agressions. 

Indubitablement, les violations des droits de l’Homme dans l’affaire de Lokman Slim sont multiples. Avant d’être assassiné, ce penseur et commentateur international de la politique libanaise, qui a souvent dénoncé les agissements du Hezbollah, anticonstitutionnels et destructeurs de l’Etat, a vécu l’inadmissible. Malheureusement, au pays du Cèdre, bien qu’elles soient partie intégrante de la Constitution, les libertés fondamentales ne sont pas préservées par l’establishment politique, pseudo-démocratique et assujetti à l’Iran et à sa milice de " droit divin ".

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) de 1948 apporte un éclairage au sujet des différentes atteintes avérées à la personne de Lokman Slim à qui a été ôté le droit à " la vie, la liberté et la sûreté " (article 3 de la Déclaration) parce qu’il avait une opinion différente de celle instaurée par l’unilatéralisme autoritaire dans le pays.

AnchorLe meurtre prémédité est un " crime contre l’humanité ". Exécuté dans le cadre de la politique du bâillonnement, il fut précédé d’une série de harcèlements, de menaces et d’attaques directes au caractère sacré du foyer, de la réputation personnelle et du travail de la victime. D’où la transgression de l’article 12 qui stipule : " Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation ". En effet, en 2019, le martyr avait dénoncé le fait que dans les nuits du 11 au 12 et du 12 au 13 décembre, un rassemblement avait été organisé contre lui, à l’intérieur de son jardin privé, entourant son domicile à Haret Hreik et les locaux de sa maison d’édition " Al Jadeed " ainsi que le centre de documentation et de recherche " UMAM ". Les " comploteurs de la nuit ", tel que feu Slim les avait désignés, lançaient contre lui des insultes et des slogans l’accusant de trahison, proférant contre lui des menaces de mort et s’en prenant à son foyer.

Les papiers qui avaient jonché les murs extérieurs de sa demeure, en cette nuit lugubre de décembre, comportaient des messages du genre : " Gloire au pistolet silencieux ", " Le Hezbollah est l’honneur de la nation " et " Nous ne tarderons pas à arriver ". Lokman Slim avait alors demandé la protection de l’État et des forces de l’ordre en citant explicitement la responsabilité du duopole chiite Hezbollah-Amal.

Le Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l’Homme confirma en mars 2021 le contexte de harcèlements, d’intimidations, de menaces qui avaient précédé le meurtre de Slim, soulignant que " le gouvernement devait prendre toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement être attendues pour protéger sa sécurité afin de ne pas être tenu pour responsable de la violation de son droit à la vie ". À ce sujet, l’article 12 préconise que " toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ".

Le porte-étendard de la liberté d’expression a été tué un an et demi après avoir fait part des agressions auxquelles il s’exposait dans une région qui a ses propres lois : la banlieue sud de Beyrouth, bastion du Hezbollah et son extension, le Sud du Liban. Or, selon l’article 19 de la DUDH " Toute personne a droit à la liberté d’opinion et d’expression. Ce droit comprend la liberté d’avoir des opinions sans ingérence et de rechercher, recevoir et répandre des informations et des idées ".

Désormais, un an s’est écoulé et la vérité n’a pas encore vu le jour. L’enquête demeure inaboutie bien que le rapport du Conseil des droits de l’Homme ait exhorté en mars 2021 les autorités libanaises à mettre fin à l’impunité qui prévaut dans le pays et à rétablir la confiance dans les institutions judiciaires par des mesures efficientes telles la création d’une commission indépendante et impartiale chargée d’enquêter sur l’échec des investigations précédentes et sur les meurtres de défenseurs des droits de l’Homme, d’activistes et d’Hommes politiques au Liban". Et Mme Najat Rochdi, coordonnatrice spéciale adjointe des Nations-Unies pour le Liban, de s’indigner " Le peuple libanais mérite un système judiciaire indépendant et efficace qui produise des résultats en temps opportun, garantisse la responsabilité et mette fin à l’impunité au Liban " et d’ajouter que la liberté d’exprimer des opinions et de s’engager dans l’espace civique doit être préservée et protégée car cela fait partie du pluralisme qui définit le Liban.