Arneli Art Gallery propose à Rebirth Beirut, du 28 avril au 5 mai, une expostion intitutlée Human Condition, regroupant une dizaine d’artistes, peintres, photographes et sculpteurs dans une heureuse alliance de styles, tempéraments et moyens d’expression. Enfance, adolescence et âge adulte, ces différentes étapes de la vie humaine, défilent et animent les murs de la galerie, suscitant des émotions aussi complexes que multiples.

Les toiles et dessins de Joanna Raad nous plongent dans le monde éthéré de l’enfance, pour une immersion joyeuse et légère dans un bleu ciel et mer, un univers chagalien et onirique jaune soleil et rose bonbon aux couleurs de l’innocence. Joanna ouvre un pan de sa mémoire pour laisser échapper des bribes de souvenirs épars qui s’effacent rapidement dans un flou vaporeux. La maison de son enfance, avion et bateau, cheval à bascule, oiseaux et poissons sont autant de silhouettes et formes évanescentes peuplant ses rêves et ses fantasmes.

La peintre Zovig Arnélian, elle, nous invite dans l’intimité du couple, scrute le visage des amoureux par des close-up sur les regards et les lèvres afin d’en saisir les moindres expressions, celles du désir à fleur de peau, la chaude lumière de l’extase qui irradie par tous les pores, images provocantes et audacieuses qui revendiquent une sexualité féminine assumée. Les moments lumineux de la jeunesse faits d’émerveillement et de découvertes sont suivis d’un passage obligé vers l’âge adulte soumis aux épreuves de feu et de sang.

Ce rappel cruel est accentué par certaines toiles d’artistes montrant des corps amoncelés, morts-vivants gravés en noir et blanc sur le bois couvert d’une mince tulle en guise de linceul indiquant la finitude de l’existence, l’opposition entre la force et la fragilité de l’être.

On retrouve par ailleurs ce même thème dans les portraits de Sarkis Sislian, visages à peine esquissés en larges touches hachurées, hésitant entre composition et décomposition, et renvoyant au thème de l’impitoyable passage du temps.

Les sculptures de Toufic Melhem représentent cette humanité souffrante, en plein désarroi, tiraillée, barricadée, mutilée, malmenée par les épreuves, soumise aux affres de l’existence.

Les larges toiles de Johnny Semaan s’offrent comme un espace abstrait pour abriter l’intériorité de l’être. Elles présentent des créatures informes, semblant flotter entre immanence et transcendance, comme si elles étaitent en constante recherche d’équilibre.

Ce parcours artistique nous conduit finalement vers la lumière grâce aux heureux assemblages de matériaux, sable, bois ou fer de Lodi Sabra qui exprime la joie de vivre par ses couleurs chaudes et chatoyantes, grâce aussi aux portraits peints comme des icônes de Moushegh Karavartanian, têtes auréolées représentant des êtres lumineux irradiant la positivité et la bonne humeur.

Une promenade artistique où l’on se laisse bercer par la poésie de Ziad Dib Jreige, les notes mélodieuses d’une charmante violoniste, où l’on se laisse aussi surprendre par des démonstrations de danse latine pour que s’imprime définitivement le mot de la fin en images lumineuses de réjouissance et d’apesanteur, la condition humaine se laissant ainsi porter par les ailes de la créativité et de l’art.

Jocelyne Ghannagé
joganne.com