Le jury du prix France-Liban de l’Adelf (Association des écrivains de langue française) s’est réuni vendredi 21 janvier afin de choisir son lauréat pour l’édition 2021. Le Prix est attribué au roman de Fouad El-Etr En mémoire d’une saison de pluie, paru chez Gallimard. Entretien express avec Georgia Makhlouf, responsable du prix France-Liban de l’Adelf.

Le jury du Prix France-Liban a décidé de récompenser le roman de Fouad el-Etr. Quelles seraient les trois choses que vous auriez envie de dire à propos de ce roman? 

Trois choses c’est peu! Mais je dirais avant tout que c’est un texte qui réussit un mélange inédit entre poésie et roman, ce qui produit une écriture singulière et d’une grande beauté. La deuxième chose que j’aimerais souligner est le caractère méditatif du texte, qu’il faut lire avec lenteur pour le savourer. Enfin, certaines pages sont de petits chefs-d’œuvre, qu’on devrait inclure dans une anthologie de la littérature libanaise, ou plutôt de la littérature tout court.

Au-delà de ce roman, le jury a aussi souligné l’engagement de l’écrivain au service de la poésie.

Oui, en effet, c’est une vie entière au service de la poésie que nous avons souhaité mettre en lumière, alors que Fouad el-Etr n’a pas reçu au Liban la reconnaissance qu’il méritait. On dit que nul n’est prophète en son pays alors que nous aurions tant besoin de tels prophètes! Parce qu’il s’agit d’un grand poète mais aussi d’un grand éditeur, qui a créé la revue La Délirante, puis la maison d’édition du même nom qui occupent toutes deux une place majeure dans la production éditoriale de poésie et dans la traduction des plus grands poètes. Trois grandes expositions lui ont été consacrées en France, dont l’une au centre Pompidou. Et peut-être sera-t-il possible de monter une telle exposition au Liban un jour prochain!

Vous êtes aux manettes du prix France-Liban depuis 2016. Pouvez-vous nous dire quel est plus précisément le positionnement de ce prix et sa place dans le paysage littéraire? 

Le prix existe depuis 1981 et peut être attribué à un écrivain libanais quel que soit son sujet, ou à un écrivain d’une autre nationalité écrivant en français, pour peu que le Liban soit au cœur de son ouvrage. C’est l’Adelf qui encadre ce prix et cette association réunit dans un même attachement à la langue française des écrivains de toutes origines. Depuis que j’en suis responsable, je m’efforce de mettre en avant le renouvellement de la littérature libanaise et l’émergence de nouveaux talents; Camille Ammoun, Dima Abdallah, Sabyl Ghoussoub par exemple ont été lauréats de notre prix ou distingués par une mention spéciale. Mais je reste attentive à des textes écrits par des écrivains étrangers qui eux aussi renouvellent le regard sur le Liban au-delà de l’image d’Epinal. Le récent ouvrage de Ryoko Sekiguchi distingué cette année en est un excellent exemple. Et j’espère qu’avec le soutien de la fondation Boghossian qui est notre nouveau sponsor, nous pourrons développer des rencontres littéraires afin de mettre en valeur ces écritures innovantes.

Une mention spéciale va à Ryoko Sekiguchi pour 961 heures à Beyrouth (et 321 plats qui les accompagnent) publié chez POL.

Grâce au soutien de la fondation Boghossian dont le siège se trouve à la villa Empain à Bruxelles, le lauréat recevra 4.000 euros.

Pour information, les membres du jury dont la responsable depuis 2016 est Georgia Makhlouf sont Carmen Boustany, Albert Dichy, Valérie Marin La Meslée, Abdallah Naaman et Bahjat Rizk.

Pour mémoire, la lauréate de l’an dernier était Dima Abdallah pour Mauvaises herbes paru chez Sabine Wespieser.

Liste des finalistes du prix France-Liban, édition 2021:

– Bentz Céline, Oublier les fleurs sauvages (Préludes éditions, 2021).

– El-Etr Fouad, En mémoire d’une saison de pluie (Gallimard, 2021).

– Langlois Denis, Le voyage de Nerval (éditions La Déviation, 2021).

– Sekiguchi Ryoko, 961 heures à Beyrouth (et 321plats qui les accompagnent) (POL, 2021).

– François Zabbal, Boutros al-Boustani: intellectuel et notable protestant (L’Harmattan, 2021).

Liste des ouvrages participant au prix France-Liban, édition 2021:

– Bentz Céline, Oublier les fleurs sauvages (Préludes éditions, 2021).

– Cattan Joëlle, L’encombrant souhait (L’Harmattan/Saër el-Mashrek, 2020).

– Dib Georges, À l’ombre d’autrefois (éditions Sydney Laurent, 2019).

– Elamine Juliette,  Le nom de mon père: essem abbi (Librinova, 2021).

– El-Etr Fouad, En mémoire d’une saison de pluie (Gallimard, 2021).

– Gharios Michèle, Les beaux jours de Kayan (éditions-Onze.com, 2021).

– Ghazal Saïd, Vincent, Nour et les autres (L’Harmattan, 2021).

– Langlois Denis, Le voyage de Nerval (éditions La Déviation, 2021).

– Sekiguchi Ryoko, 961 heures à Beyrouth (et 321 plats qui les accompagnent) (POL, 2021).

– Zabbal François, Boutros al-Boustani: Intellectuel et notable protestant (L’Harmattan, 2021).