Il est aussi doué pour signer une comédie dramatique générationnelle sur les trentenaires qu’un film d’horreur à l’ambiance glaçante sur des enfants maléfiques : Eskil Vogt, en salles en France mercredi avec The Innocents, n’a pas volé l’étiquette d’étoile montante du cinéma nordique.

Ce Norvégien de 47 ans vient de remporter avec cette fable macabre, son deuxième long-métrage, les Prix du public et du jury de la presse au Festival international du film fantastique de Gérardmer.

" Je suis très cinéphile, j’aime tous genres de films et j’ai le luxe de pouvoir en faire sans les définir d’avance ", a expliqué à l’AFP le réalisateur, qui se sent chez lui aussi bien dans les salles du festival vosgien que dans celles de Cannes, où il était invité en juillet dernier.

En plus de The Innocents (dans la section Un Certain Regard), il y présentait Julie en 12 chapitres, dont il a signé le scénario aux côtés de son fidèle comparse et compatriote Joachim Trier. Ensemble, ils auront écrit cinq films, dont il y a une décennie le très remarqué Oslo, 31 août.

Une double sélection à Cannes qui n’a pas fait tourner la tête de ce père de famille : " ça m’a ouvert des portes et des propositions, mais moi, je n’avais rien, pas de projets ", s’amuse-t-il six mois après. " Je me suis senti le réalisateur le moins professionnel du monde! ".

Julie en 12 chapitres, comédie dramatique sur la quête existentielle d’une jeune femme d’aujourd’hui et The Innocents ont peu de points communs, si ce n’est peut-être l’envie d’aborder, par petites touches, une large palette de questions contemporaines.

" J’adore quand il y a plein de touches, de détails différents dans un film. Il vaut mieux trop que pas assez ", souligne Eskil Vogt, parfaitement francophone et diplômé en 2004 du département réalisation de la Fémis, l’école de cinéma française.

– Mystère de l’enfance –

Pour sonder le mystère de l’enfance, une période qui le fascine depuis qu’il est devenu père, mais dont il n’est " pas nostalgique ", le réalisateur s’immerge dans un quartier norvégien plutôt tranquille, où se mêlent plusieurs classes sociales, et où les tours de béton s’ouvrent directement sur la forêt.

Un jeune couple avec deux fillettes, Ida et Anna, dont l’aîné est autiste et lourdement handicapée, vient d’emménager. Pendant que les parents sont affairés, les enfants se lient d’amitié avec des petits voisins, Ben et Aïsha, les enfants de deux familles modestes, issues de l’immigration.

En tuant le temps pendant les longues journées de l’été nordique, loin du regard de leurs parents, quasi absents de l’histoire, ils s’aperçoivent vite qu’ensemble, ils disposent de pouvoirs surnaturels. Par télépathie, la petite fille autiste va enfin pouvoir communiquer avec les autres, tandis que les enfants s’amusent à jeter des cailloux ou briser des bâtons par la pensée.

" La magie, les pouvoirs, ça permettait de réfléchir autour de la façon dont on devient une personne avec une morale, de l’empathie. On ne naît pas avec, ça se construit au fur et à mesure de l’enfance ", souligne le réalisateur. Car les jeux de ces enfants ne vont pas longtemps rester sans conséquence, menaçant même de virer au massacre lorsqu’ils se rendent compte de l’étendue de leurs pouvoirs, qui leur permettre d’assouvir toutes leurs pulsions.

" Je savais qu’il fallait des séquences qui font peur, j’adore les films d’horreur, mais je m’intéresse énormément aussi à la psychologie des personnages ", souligne Eskil Vogt, dont le film ouvre une série de questions sur la morale individuelle ou la cruauté.

" Je souhaitais redécouvrir cet état de l’enfance, qui est tellement différent de la vie adulte dans la manière de percevoir le monde. "

Par Francois Becker
© AFP

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