Vouée à travailler au sein de la banque familiale, Marianne Saradar a préféré le journalisme et l’écriture qu’elle pratique depuis une vingtaine d’années. On se souvient de ses billets d’humeur absolument décapants dans Femme Magazine, le mensuel féminin que l’on aimait tant! Durant des années, on attendait chaque mois de lire sa rubrique, pour savoir avec quelle thématique la journaliste allait nous faire rire. Si Femme Magazine n’existe plus aujourd’hui, Marianne Saradar n’a pas pour autant arrêté l’écriture puisqu’elle a déjà publié deux livres.

Le premier, en France, est un témoignage de vie poignant: " Le bonheur à la sueur de mon front ". Franc succès en librairie, paru en 2019 en pleine crise. L’aventure de l’écriture qui est une véritable passion pour Marianne Saradar ne s’est pas arrêtée là puisqu’elle vient de publier aux Éditions Antoine un nouveau livre autour de la bourgeoisie libanaise; l’inspiration lui est venue durant le confinement.

Une plume trempée dans du vitriol

" Vice "… Le terme écorche un tant soit peu l’ouïe. Il a une connotation fortement péjorative. Au point que l’on craint d’en faire mauvais usage en y recourant. Pourtant, depuis un moment déjà, il a perdu de sa virulence immorale. Dès lors, on parlera du vice pour faire allusion à un simple défaut, un " travers ". Cette définition du vice que l’on peut lire sur la quatrième de couverture renvoie au contenu de cet opus qui est une sorte de satire sociale autour de la bourgeoisie féminine: des vices banalisés, rendus presque “ "ormaux " dans une société centrée sur les apparences et les superficialités. Pour la journaliste, nous sommes une société " pourrie gâtée, tout nous est dû et c’est à cause de cela que nous en sommes aujourd’hui arrivés là ".

L’ensemble des travers de la vie de tous les jours sont passés en revue: les femmes dans les bureaux de vote, les femmes au volant, les femmes et la chirurgie esthétique, les femmes et le divorce, les femmes et leur employée de maison, celles qui ont oublié que l’esclavage a été aboli! Sans oublier les femmes et le shopping. Et Marianne Saradar ne s’est pas contentée de relater des faits sans base objective. Au contraire! Elle a suivi une démarche journalistique. Elle a par exemple enquêté auprès d’une responsable de boutique de prêt-à-porter pour nous faire découvrir un monde basé sur le matérialisme et les superficialités. " Certains comportements sont indécents dans ce domaine, comme ces boutiques qui envoient les vêtements au domicile de leur cliente pour essayage via un chauffeur, alors que nous somme en pleine crise! ". La journaliste brosse un tableau souvent peu reluisant de cette catégorie de la population, cette nouvelle bourgeoisie enrichie après la guerre et les crises, toujours sur un ton humoristique. " Je trouve certains travers de notre société très choquants, mais j’ai choisi de relater les choses sur le ton de l’humour et du rire ", confie-t-elle.

Effectivement, mieux vaut en rire qu’en pleurer même si, comme le précise bien Marianne Saradar Barakat, " ces portraits concernent une certaine catégorie de la société et probablement, et que cette catégorie ne lira pas ses écrits ".

Hommage rendu à la femme

Même si cet ouvrage raille les femmes, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un opus éminemment féministe. Plusieurs parties des chapitres sont, à l’inverse, consacrées à un hommage à la femme d’une manière générale: la femme active, la mère de famille, la femme de lettres, celle qui sait s’exprimer et qui a plusieurs cordes à son arc. La femme qui recèle des qualités et non la femme superficielle.

On rit énormément, on découvre une magnifique plume acerbe et parfois âpre, mais on est aussi troublé par l’exactitude des récits, et triste de réaliser que les mentalités ne changent pas et ne changeront sans doute jamais, malgré les crises, malgré l’adversité que traverse notre pays.