Galvanisée par une première édition couronnée de succès en 2021, Menart Fair Paris revient, du 19 au 22 mai 2022, présenter le meilleur de la création moderne et contemporaine de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord dans la capitale européenne de l’art.

Avec une fidélité significative de ses exposants, Menart Fair Paris accueille, du 19 au 22 mai 2022 dans l’Hôtel particulier de la maison Cornette de Saint Cyr, 18 galeries venues de 12 pays pour faire dialoguer les différentes régions du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA).

La directrice et fondatrice Laure d’Hauteville Taslé a répondu aux trois questions d’Ici Beyrouth.

Après deux ans de crise sanitaire, dans quel esprit se passe cette foire?

On sent un engouement chez le public pour venir visiter les expositions et sortir. Avec le beau temps, Paris est noir de monde et il y a de longues files d’attente devant les musées.

Nous avons lancé Menart Fair Paris en 2021, pendant la période de confinement. Contrairement aux musées et autres lieux culturels, il a été possible d’ouvrir, car j’ai loué à un commissaire-priseur, Cornette de Saint-Cyr, qui dépend du ministère des Finances et non de la Culture.

La dernière édition de Beirut Art Fair a eu lieu en 2019. Trois semaines après, la Révolution du 17 octobre a éclaté. C’était très fort, j’ai fait partie des gens qui la soutenaient. Puis l’explosion du port a eu lieu le 4 août 2020. Le contexte général de crise économique au Liban a rendu impossible la tenue d’une foire, où des galeries étrangères pourraient commercer. J’ai alors eu l’idée de déplacer Beirut Art Fair à Paris, qui est la capitale de l’art en Europe, et d’accueillir des galeries du MENA. En France, il y a des foires dédiées à l’Afrique, ou à l’Asie, mais jamais rien n’avait été fait sur cette région.

Quels changements a engendré le déplacement de Menart Fair de Beyrouth à Paris?

Lors de la soirée d’inauguration, plus de 400 collectionneurs, directeurs de musées ou de fondations privées sont venus. Ils étaient émerveillés. C’est encore nouveau pour les Français et les Européens. Mais je pense qu’il faut montrer l’art du MENA de plus en plus. C’était important d’inviter les institutions pour leur donner envie d’organiser des expositions dédiées au Levant, au Maghreb, aux pays du Golfe ou à l’Iran.

Je trouve que c’est essentiel que le public découvre l’art du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord autrement que par les médias qui parlent toujours de catastrophes. Les artistes du MENA ont énormément de choses à révéler. Nous n’avons pas voulu montrer des œuvres trop dures. Chaque artiste parle de ce qu’il vit dans son pays avec beaucoup de douceur et de liberté. On retrouve beaucoup de poésie, d’élégance, de bonté, de générosité dans leurs œuvres.

Nous créons des ponts pour que les artistes puissent être en contact avec d’autres galeries et que des échanges puissent se faire. Par exemple, la galerie Esther Woerdehoff, qui a exposé l’année dernière, présente cette année un stand avec quatre artistes libanais. La galerie Saleh Barakat a fait un partenariat avec la galerie Bessières, qui expose en ce moment deux artistes libanais. Menart Fair se veut une passerelle.

Quelles sont les lignes conductrices cette année?

Nous avons demandé à chaque galerie de présenter deux ou trois artistes de la modernité. Car pour bien comprendre l’art contemporain, il faut savoir par où les courants sont passés. L’artiste moderne tunisienne Baya a par exemple travaillé dans les ateliers de Picasso et Matisse. Sa première exposition a eu lieu en 1947 chez Aimée Mag, à une époque où les femmes étaient confinées au domaine domestique et n’avaient pas le droit de peindre.

Nous faisons aussi un focus sur l’École de Casablanca, une étape très importante. Au Maroc, à l’époque du mandat français, les artistes faisaient soit de l’artisanat, soit des tableaux orientalistes. Un mouvement de six Marocains a voulu montrer qu’ils pouvaient peindre librement. Ainsi est né le mouvement de l’École de Casablanca, et il n’est pas possible de comprendre l’art marocain aujourd’hui sans savoir par où sont passés les grands maîtres de cette école.

Un autre espace est dédié au NFT du MENA. Les artistes du Moyen-Orient ne peuvent pas s’exprimer comme ils veulent en raison de la censure. Grâce à cet espace, ils ne dépendent d’aucune juridiction et peuvent montrer librement leur art. Nous avons également donné libre parole à trois jeunes galeries qui exposent pour la première fois: Salahin, Nomad Utopia et Ayn Gallery. À part celles-ci, Menart accueille 18 galeries de très grande qualité venues de 12 pays, présentant 98 artistes pour plus de 250 œuvres. Ceux que l’on retrouve le plus sont les artistes libanais. Trois galeries libanaises sont en outre présentes: Saleh Barakat, la galerie Tanit et Art on 56th.