Vladimir Poutine a lancé ce jeudi 24 février une offensive militaire en Ukraine. Déjà, les menaces de guerre des derniers jours ont eu des conséquences sur les marchés et cours mondiaux, le principal indicateur étant le pétrole. Le monde risque de vaciller et le Liban de s’enfoncer davantage dans la crise.  

Ce conflit en Ukraine, Vladimir Poutine ayant fait de son économie une arme de guerre, affecte directement et en premier lieu le secteur de l’énergie parce que la Russie est le deuxième exportateur de pétrole et le troisième producteur mondial de brut, derrière les États-Unis et l’Arabie saoudite et le premier producteur de gaz. Le prix du pétrole a flambé. On est à 102 dollars ce jeudi, au plus haut depuis huit ans et les experts estiment qu’il est désormais très possible qu’on atteigne les 125 dollars pour un baril.

Pour le gaz, c’est la même chose. Son prix s’est envolé pour frôler les 115 euros. Il est peu probable que la Russie coupe complètement le gaz à l’Europe. A noter que Moscou fournit 40% du gaz utilisé dans le vieux continent. Mais ce qui est fort possible, c’est que le gazoduc qui traverse l’Ukraine soit interrompu, endommagé ou coupé pour empêcher son explosion.

TotalEnergies a annoncé jeudi, qu’"il n’existe pas de solution immédiate pour remplacer sur le marché du gaz européen les importations venues de Russie, si celles-ci devaient cesser".

Mis à part l’effet direct de la hausse des prix de l’énergie, c’est le reste de l’économie qui risque d’être contaminée. En effet, si le conflit s’étend dans le temps, ce sont tous les domaines nécessitant beaucoup d’énergie qui pourraient voir leur prix exploser.

Sur le marché des céréales, là encore, la Russie et l’Ukraine sont des protagonistes géants sur celui du blé notamment. Ce sont les deux premiers producteurs mondiaux qui sont en guerre. Donc, on s’attend également à une flambée des prix. Le pic de jeudi était totalement inédit: 344 euros la tonne.

Tempête du côté des places boursières aussi. C’est la débandade! Hong Kong perd plus de 3%, Tokyo plus de 2%, Paris 5,02%, Francfort chute de 5,17% et Milan de 5,10%, le Dow Jones de 2,31%, l’indice Nasdaq de1,79%, tandis que l’indice élargi S&P 500 perdait 1,89%.

A craindre bien sûr aussi un frein de l’investissement à travers la planète. Les gens vont s’inquiéter de poursuivre, mettre en œuvre ou développer des projets économiques. D’où de mauvaises conséquences sur la croissance mondiale pour 2022.

Les conséquences du conflit au Liban

Du côté de chez nous, les Libanais peuvent s’attendre concrètement à une essence plus chère. Selon Georges Brax, porte-parole des propriétaires de stations-service, les 20 litres pourraient atteindre environ 400.000 LL. Les prix des denrées alimentaires, qui ont déjà beaucoup augmenté avec la crise que connaît le Liban, pourraient aussi être revues à la hausse, la Russie et l’Ukraine étant deux importants producteurs de blé et fournisseurs du pays. Si le problème s’étend à toute la mer Noire, le Liban devra choisir d’autres options d’importation de blé, explique un responsable dans une minoterie. De plus, toute hausse des cours du blé sur les marchés internationaux aura forcément un effet sur le prix du pain.

Pour l’analyste politique Sami Nader, Il y a deux éléments qui vont impacter le Liban. "Notre importation de blé, puisque nous achetons 50% de notre blé d’Ukraine, risque d’être perturbée. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas l’importer d’ailleurs, mais nous n’avons pas les stratégies mises en place pour le faire. Il peut y avoir une rupture dans la chaîne d’approvisionnement d’autant plus que les importateurs ont du mal à se faire financer par la Banque du Liban. Ceci risque de tourner à l’aigre. Deuxièmement, le cours du pétrole mondial va particulièrement affecter le Liban. La hausse du prix va peser lourd dans la balance des paiements. Par conséquent, davantage de pression affectera la livre libanaise, le pouvoir d’achat, et nous allons avoir une poussée inflationniste. Dans le cas libanais, au vu du déficit, cela va peser lourd", explique l’analyste.

L’économiste Fouad Zmokhol estime pour sa part que " les retombées seront tout d’abord politiques". "Ce conflit montre que la loi du plus fort est la loi du meilleur et que les pressions de la communauté internationale n’ont mené à rien. Ce conflit aura un impact immédiat sur les prix des ressources naturelles et les échanges mondiaux", ajoute-t-il.

Concernant le blé, M. Zmokhol pense qu’il ne faut pas paniquer. " Nous n’avons pas une importation exclusive de blé d’Ukraine. Nous avons une grande importation, certes, parce qu’ils ont des prix compétitifs et une livraison rapide. Aucun importateur de blé au Liban ne s’approvisionne exclusivement d’Ukraine. Ils travaillent tous avec plusieurs pays pour des raisons de diversification ", note-t-il. "Si ce conflit perdure et se transforme en une vraie guerre, la chaîne d’approvisionnement de la région sera déstabilisée. La circulation aérienne et maritime sera également perturbée", conclut-il.

Quid des sanctions? La plus importante, c’est interdire à la Russie l’utilisation du Swift, le réseau de transactions internationales permettant le commerce mondial et autorisant tous les pays qui l’utilisent à se servir du dollar. La Russie serait ainsi isolée. Le président français Emmanuel Macron a quant à lui souligné que les sanctions militaires et économiques seront à la hauteur de l’agression.