L’ONG Himaya a lancé une initiative pour sensibiliser au harcèlement et aux abus sexuels dont sont victimes les mineurs au Liban. Deux vidéos éducatives ont été projetées jeudi à cet effet au Grand Cinemas ABC à Achrafieh.

À l’écran, deux témoignages se succèdent. Une femme et un homme, tous deux Libanais. “Je me suis rendu compte que je pouvais utiliser le mot abus”, partage la première. “Jusqu’à maintenant, j’ai cherché comment aborder la situation, car certaines personnes ont essayé de me faire taire”, déclare le second. Avec courage, les deux jeunes abordent les agressions et le harcèlement sexuels qu’ils ont subis étant mineurs.

Diffusés ce jeudi au Grand Cinemas ABC Achrafieh, ces deux témoignages vidéos ont été préparés par l’ONG Himaya, qui lutte pour la protection de l’enfance au Liban. Dans l’optique de briser les tabous, les abus sexuels sur mineurs étaient au cœur de cette session de prévention et de sensibilisation.

Au Grand Cinemas à ABC Achrafieh, l’ONG Himaya a projeté jeudi une vidéo d’une jeune fille qui fait part de l’abus sexuel dont elle a été victime durant son enfance. ©Maxime Pluvinet

Briser le silence

La première vidéo résume l’expérience personnelle d’une jeune femme qui a été harcelée sexuellement durant son enfance par un ami de la famille. Le jeune garçon témoigne quant à lui de l’agression sexuelle qu’a exercé sur lui un membre du clergé. Les deux vidéos sont disponibles sur les réseaux sociaux de Himaya.

Après la projection, Serge Saad, directeur exécutif de Himaya, a présenté le rapport réalisé par l’ONG sur les personnes qu’elle a accompagnées depuis 2020. Le résultat est sans appel: “En 2021, 8% du total des cas étaient liés aux violences sexuelles”, a commenté M. Saad. “Le chiffre est passé à 11% en 2022, et dans 51% des cas l’agresseur est un proche” de la famille. “Avec la pandémie, la vulnérabilité a augmenté du fait que les gens s’étaient retrouvés seuls dans leur maison”, a déclaré à Ici Beyrouth Rose Habchi, responsable du programme Résilience, au sein de Himaya.

L’équipe de l’ONG Himaya a présenté aux médias le rapport détaillé des cas recensés d’abus sexuels entre 2020 et 2022. ©Maxime Pluvinet

Le rôle essentiel des médias

Les deux témoignages ont souligné le rôle essentiel des médias dans leur prise de conscience de l’abus qu’ils ont subi. Devenue passionnée de cinéma, la jeune femme avait vu “un film, qui m’avait beaucoup marqué, Les Chatouilles, qui évoque ce genre d’histoire ". Et au jeune homme de se remémorer le visionnage sur “la chaîne de télé New TV, un épisode du programme The Adult Talk” qui traitait de l’abus sexuel.

Ainsi, Serge Saad a souligné “le rôle positif et primordial que jouent les médias dans la sensibilisation” des enfants. Mais les témoignages ont également illustré son revers: dans son témoignage, le jeune homme a expliqué que les médias ne l’avaient pas cru lorsqu’il avait partagé son histoire. L’équipe de l’ONG a donc invité à une réflexion éthique et une responsabilité sociale dans la couverture de ces sujets. “Nous souhaitions rappeler le rôle essentiel des médias, à la fois super positif, mais parfois toxique”, insiste Kim Hechmé, chargée de la communication à Himaya.

* Il est possible de signaler les cas d’abus de tous types à Himaya sur sa ligne d’urgence, disponible 24h/24: 03-414964.