La plupart des partis mettent la touche finale à leurs programmes et discours électoraux, qui tenteront de persuader leurs électeurs de leur donner une nouvelle chance après le grand effondrement dont ils sont responsables. La tâche est aujourd’hui plus difficile que jamais. Quel slogan sera-t-il donc suffisamment attrayant, dans un pays où les habitants sont devenus comme des condamnés à passer leur "vie éternelle" en enfer?

Un tour d’horizon rapide d’Ici Beyrouth auprès des grands partis conduit à la conclusion que les prochaines élections pourraient ressembler plus que jamais à un référendum sur l’option de la " résistance ". Certes, des groupes et des forces d’opposition insistent à donner à la bataille l’image d’une guerre entre les partis de l’establishment d’une part, qu’ils accusent d’avoir mené le pays là où il se trouve, et ses propres candidats de l’autre, qu’il dépeint comme des chevaliers venus sur leurs blancs destriers pour mener à bien la mission de "sauver du Liban".

En dépit de cela, les partis historiques traditionnels s’efforcent d’imposer leur label, qui leur servira pour leur campagne électorale. Ils croient sans doute qu’en faisant de ces élections un référendum sur les armes du Hezbollah et le rôle de ce parti à l’intérieur et à extérieur, ils pourront réorganiser leurs foules et mobiliser leur esprit de corps sectaire. Dans le cas contraire, surtout si les gens sont tenus de choisir entre une prolongation de la réalité politique actuelle et une nouvelle option proposée et menée par un nouveau groupe de formations politiques, il est certain que les électeurs surferont sur la deuxième vague, quels que soient les risques et les difficultés.

On s’attend à ce que ces partis présentent officiellement leurs grands titres et programmes électoraux à la mi-mars ou début avril, dans la mesure où le "calendrier électoral" indique que la date du 26 mars constituera le dernier délai pour l’inscription des candidatures, le 31 mars celui de leur retrait, alors que le 5 avril sera le dernier délai pour l’enregistrement des listes électorales. Début mai verra le début du compte à rebours: le 5, il sera interdit de publier des sondages d’opinion, avant le " silence électoral ". Le scrutin se déroulera le 15 mai.

Il n’est un secret pour personne que le Hezbollah et les Forces libanaises ont commencé tôt leur bataille électorale, et il semble que chacun profite de l’autre pour mobiliser son audience. Les récentes prises de position lancées par le secrétaire général adjoint du Hezbollah Naïm Kassem contre les FL, évoquant leur passé qu’il a qualifié de "criminel", ont révélé la direction ou la voie que le parti chiite empruntera pour restaurer l’enthousiasme perdu de sa base. D’autant plus que selon les informations obtenues par Ici Beyrouth, des sondages d’opinion menés par le Hezbollah et son allié, le mouvement Amal, ont révélé une hausse du taux d’abstention aux prochaines élections, ce qui va les inciter à déployer tous leurs efforts pour générer des slogans et des batailles "fantasmatiques" capables de faire remonter le nombre d’électeurs.

Il semblerait que le parti reprendra le slogan de sa campagne précédente lors des législatives de 2018, "Nous protégeons et construisons", ou bien qu’il choisira un titre allant dans le même sens, en mettant à nouveau l’accent sur le tri des Libanais entre "patriotes" soutenant l’option de la résistance, et les autres, accusés d’entraîner le Liban dans "la capitulation face aux intérêts d’Israël", comme l’a déclaré Naïm Kassem lui-même.

Sans aucun doute, les Forces libanaises trouvent qu’en se plaçant dans une position de confrontation directe avec le Hezbollah, elles peuvent mobiliser leur public, et même ratisser plus large, si elles réussissent à convaincre que le parti pro-iranien et le Courant patriotique libre assument seuls la responsabilité du "grand effondrement".

Une source FL révèle à ici Beyrouth que le programme électoral du parti comportera quatre grands titres. Le principal sera lié à l’absence de l’État, en pointant du doigt les groupes ou partis qui contribuent à son dé. L’accent sera mis sur l’importance de l’État et son rôle, l’impératif du concept de souveraineté, du respect de la Constitution, de l’adhésion à l’accord de Taëf et aux résolutions internationales, ainsi que sur les souffrances du peuple libanais du fait du non-État. Le deuxième titre sera celui de la gestion de l’État en toute transparence, du rôle de la justice et tout ce qui se rapporte à ce dossier, en plus du titre économico-financier, où les FL exposeront leur vision quant à la façon d’extirper le Liban de la situation actuelle. Le dernier titre évoquera les droits de l’homme, le rôle des femmes et d’autres dossiers connexes.

Quant au titre que le Parti socialiste progressiste est censé choisir pour mener sa campagne électorale, il part, comme le dit l’un des leaders socialistes à Ici Beyrouth, du constat qu’ "il n’y a pas de réforme sans souveraineté". Le programme électoral du PSP tirera ses grandes lignes du document politique élaboré lors de son quarante-huitième congrès, qui s’est tenu en octobre dernier, et confirmera sa lutte pour protéger les spécificités d’un Liban diversifié, libre et démocratique, parachever la mise en œuvre des dispositions de l’accord de Taëf, qui constituaient une porte d’entrée vers la solution. Cette mise en œuvre passe par l’abolition du confessionnalisme politique pour passer à l’État civil et l’adoption d’une loi électorale non confessionnelle, confirmant le partenariat des expatriés dans le choix de leurs représentants, et la création d’un Sénat.

Le PSP soulignera l’importance de "préserver et redynamiser les relations libano-arabes, en particulier avec les pays qui ont soutenu le Liban dans les conditions les plus difficiles, les guerres et les épreuves, et aborder la relation avec la Syrie sur la base de l’intérêt national supérieur et le plein respect de la souveraineté libanaise et de la décision libanaise indépendante, ainsi que les liens historiques avec le peuple syrien, en respectant son droit à la liberté, la démocratie, la sécurité et à une vie décente, et en mettant l’accent sur un retour sûr et digne des déplacés syriens."

Le parti qui semble sans doute le plus embarrassé lorsqu’il s’agit de formuler un grand titre attractif pour sa campagne électorale est le Courant patriotique libre, surtout après la chute cataclysmique de son slogan relatif "au changement et à la réforme" sous le mandat Aoun. Son nouveau programme électoral partirait des trois titres que Michel Aoun a proposés pour la conférence de dialogue national sans recevoir de réponse positive, à savoir la décentralisation administrative et financière élargie, la stratégie de défense pour protéger le Liban, ainsi que le plan de redressement financier et économique, les réformes nécessaires et une répartition équitable des pertes.