À quelques jours des élections américaines de mi-mandat, beaucoup de yeux sont tournés vers TikTok. Le réseau social chinois, extrêmement populaire chez les plus jeunes, est le lieu de partage et de propagation de nombreuses fakes news, notamment à propos d’une possible fraude électorale.

Si la campagne bat son plein sur les réseaux sociaux à quelques jours des élections américaines de mi-mandat, la désinformation n’est pas non plus en reste, y compris sur TikTok. Et en dépit des règles établies par le géant chinois, des analystes craignent l’influence que pourraient avoir les intox partagées sur la plateforme prisée des jeunes.

Des vidéos, évoquant sans aucun fondement l’existence de fraude électorale ou de vols de bulletins postaux, ont notamment trouvé refuge sur le réseau.

Et peut-être de manière encore plus inquiétante, TikTok a approuvé sur sa plateforme des publicités politiques payantes contenant de la désinformation, alors même que l’entreprise avait affirmé interdire en 2019 une telle pratique.

Zéro filtre

" Les hackers peuvent facilement changer les résultats de l’élection! Pas la peine d’aller voter! ", peut-on entendre dans une vidéo dont le contenu a été élaboré par des chercheurs de l’ONG Global Witness.

Lors de l’expérience réalisée conjointement avec l’université de New York, et visant à tester les limites de l’interdiction établie par TikTok, plus de 90% des publications trompeuses rédigées par l’équipe ont été autorisées sur le site.

" Nous sommes assez choqués de ces résultats ", confie à l’AFP Jon Lloyd, un conseiller de Global Witness, qui décrit TikTok comme l’un des " bonnets d’âne " en matière de modération.

Plus de huit millions de jeunes Américains actifs sur le site pourront voter pour la première fois ce 8 novembre. Et selon un sondage du Pew Research Center, plus d’un quart des Américains entre 18 et 29 ans consultent aujourd’hui TikTok pour s’informer.

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Les démocrates sont les premières cibles des " fakes news " propagées sur les réseaux sociaux (AFP)

 

 

La large quantité de contenus diffusés sur la plateforme fait que ses " utilisateurs, et en particulier les jeunes et plus impressionnables " finiront par interagir avec des publications potentiellement polarisantes ou problématiques, note Matt Navarra, un consultant expert en réseaux sociaux.

Et si la maison-mère de TikTok, ByteDance, dispose de mesures pour limiter les théories complotistes sur le réseau social, " cela ne signifie pas que celles-ci sont respectées ", explique Jon Lloyd.

Des problèmes ailleurs qu’aux États-Unis

TikTok est censé retirer les contenus en rapport avec " la santé publique, les processus électoraux, les faits et la science ", qui pourraient nuire aux citoyens. Mais les récentes vidéos communiquant de manière trompeuse ou fausse sur la fraude électorale aux Etats-Unis, sont, elles, encore en ligne.

" Nous prenons notre responsabilité de protéger l’intégrité de notre plateforme et les élections avec le plus grand sérieux ", a déclaré un porte-parole de ByteDance dans un communiqué à l’AFP.

" Nous continuons d’investir dans notre règlement, notre sûreté, et nos équipes de sécurité pour contrer la désinformation électorale ", poursuit-il.

D’autres pays ont auparavant fait état de problèmes similaires avec le réseau, notamment durant l’élection présidentielle aux Philippines, ainsi qu’en Allemagne où de faux comptes parlementaires avaient été créés, et au Kenya, où la propagande politique prospère.

Lors du deuxième trimestre 2022, TikTok a supprimé 113 millions de vidéos pour violation de ses règles communautaires, soit environ 1% de son contenu publié.

Les analystes, quant à eux, n’expriment aucun réel optimisme quant à une amélioration à l’avenir, se rappelant du déroulement de la dernière présidentielle américaine et du rôle des réseaux sociaux dans la propagation de rumeurs sur l’élection.

Facebook passe pour un bon élève

" Que Facebook passe pour un bon élève en comparaison sur ces questions, paraît incroyable ", souligne Steven Brill, président de NewsGuard, site qui évalue les sources d’information en fonction de leur fiabilité.

Selon Matt Navarra, le format " très rapide et très simpliste " des vidéos TikTok rend la création et la diffusion de contenu à portée de tout utilisateur.

Combiné à un algorithme puissant, il est alors un jeu d’enfant d’accumuler des milliers de vues à une vitesse astronomique, et cela sans nécessairement disposer d’un nombre important d’abonnés.

Quant au style, la nuance cède souvent la place au contenu haché, accompagné d’une musique entraînante et de commentaires ajoutés en voix off. Il est alors très difficile de distinguer le mythe de la réalité.

" Si les jeunes cherchent à s’informer au sujet de l’élection sur la plateforme, ils trouveront des résultats de courte durée, dépourvus de leur contexte " et souvent sans explication quant à leur source, conclut Jack Brewster, analyste chez NewsGuard.

Avec AFP