La tension atteint son paroxysme, Joe Biden répète que l’Ukraine pourrait être envahie " à tout moment ", le chancelier allemand Olaf Scholz parle d’une situation " critique ". Malgré les efforts diplomatiques intenses, les menaces de sanctions occidentales inédites et coordonnées, une réponse " rapide et résolue " à toute attaque russe, Moscou semble déterminée à franchir la frontière ukrainienne et, pour reprendre la déclaration sans ambages de son ambassadeur en Suède, " n’a rien à foutre " des sanctions…

" Pardonnez-moi l’expression, mais nous n’en avons rien à foutre de toutes leurs sanctions ", a indiqué le plénipotentiaire russe Viktor Tatarintsev au journal suédois Aftonbladet. " On nous a déjà imposé tellement de sanctions, et dans un sens, elles ont eu des effets positifs sur notre économie et notre agriculture ", souligne l’expérimenté M. Tatarintsev, qui parle couramment suédois et a occupé plusieurs postes en Suède. " Nous sommes davantage autosuffisants et avons été capables d’augmenter nos exportations. (Par exemple) nous n’avons pas de fromages italiens ou suisses, mais nous avons appris à fabriquer des fromages russes aussi bons en utilisant des recettes italiennes ou suisses ", a-t-il expliqué. " De nouvelles sanctions n’ont rien de positif, mais ne sont pas aussi mauvaises que l’Occident le dit ", a-t-il assuré. Pour M. Tatarintsev, les pays occidentaux ne comprennent pas la mentalité russe: " Plus l’Occident fait pression sur la Russie, et plus forte sera la réponse russe ". M. Tatarintsev assure que la Russie tente d’éviter une guerre. " C’est le souhait le plus sincère de nos responsables politiques. La dernière chose que veulent les gens en Russie, c’est la guerre ".

De l’autre côté de la planète, les Etats-Unis ont répété dimanche que l’Ukraine pourrait être envahie " à tout moment " par la Russie après l’échec des derniers efforts diplomatiques, situation " critique " que le chancelier allemand Olaf Scholz va tenter de désamorcer lundi à Kiev et mardi à Moscou. Dans un entretien téléphonique dimanche soir, le président américain Joe Biden et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky ont convenu de poursuivre " diplomatie " et " dissuasion " face à Moscou. M. Zelensky a également invité M. Biden à venir à Kiev. " Je suis convaincu que votre visite à Kiev dans les prochains jours (…) serait un signal fort et contribuerait à stabiliser la situation ", a déclaré le président ukrainien, selon un communiqué de ses services, au président américain. Washington n’a de son côté fait aucune référence à cette invitation dans son compte-rendu de la conversation, durant laquelle Joe Biden a de nouveau promis une réponse " rapide et résolue " des Etats-Unis, en coordination avec leurs alliés, en cas d’attaque russe.

Souvent accusée d’être trop complaisante envers la Russie, l’Allemagne inquiète a haussé le ton dimanche. " Nous sommes au beau milieu d’un risque de conflit militaire, de guerre en Europe orientale et c’est la Russie qui en porte la responsabilité ", a déclaré le président allemand Frank-Walter Steinmeier. Le chancelier Olaf Scholz a de son côté prévenu que les sanctions occidentales seraient " immédiates " en cas d’invasion russe.Les tensions sont à leur comble avec 130000 militaires russes massés à la frontière ukrainienne qui mènent des manoeuvres tous azimuts.Washington a redit dimanche que les Russes pourraient attaquer " à tout moment ", au lendemain d’un appel entre Joe Biden et son homologue russe Vladimir Poutine qui ne leur a pas donné " de motif d’optimisme ". La situation a atteint un point " critique ", estime une source gouvernementale allemande. " Notre préoccupation a grandi (…) Nous pensons que la situation est critique, très dangereuse ". Reste à savoir si le constat poussera l’Allemagne à revoir sa réticence quant aux livraisons d’armes en Ukraine, qu’elle bloque dans le cadre de l’Otan, et l’avenir de Nord Stream 2, le gazoduc controversé construit pour acheminer sur son territoire du gaz russe en contournant l’Ukraine. Le chancelier allemand a assuré la semaine dernière à des sénateurs américains que le gazoduc " n’irait pas de l’avant " si la Russie envahissait l’Ukraine.La Russie s’est par ailleurs dite " inquiète " de la " relocalisation " de personnel de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) qui était jusqu’ici en Ukraine. " Certains États participants ont décidé que leurs détachés respectifs à la Mission spéciale d’observation devraient quitter l’Ukraine dans les prochains jours ", mais la Mission " continuera à mettre en œuvre son mandat (…) avec ses observateurs déployés dans 10 villes à travers l’Ukraine ", a indiqué l’OSCE dans un communiqué. L’OSCE, qui réunit une soixantaine de pays, dont les Etats-Unis, la Russie et les principaux pays d’Europe de l’Ouest, est un forum chargé de favoriser le dialogue et la coopération sur les questions de sécurité. Moscou a accusé la mission ukrainienne de cette organisation d’être " délibérément entraînée dans la psychose militariste fomentée par Washington et utilisée comme outil pour une éventuelle provocation " via des retraits de personnel.De son côté, le Canada a décidé de " relocaliser temporairement " ailleurs en Europe une partie de ses 200 militaires stationnés en Ukraine, pour " recentrer ses efforts tout en assurant la sécurité des membres des forces armées canadiennes ".

Avec AFP