Amnesty International dénonce l’utilisation d’armes à sous-munitions en Ukraine. Une utilisation attribuée à la Russie et qui aurait déjà tué plusieurs civils dont un enfant. Mais de quoi s’agit-il et que dit le droit international humanitaire en la matière ?

 

Alors que le conflit s’intensifie au Ukraine, plusieurs ONGs de défense des droits de l’homme, dont Amnesty international, dénoncent l’utilisation d’armes à sous-munitions par la Russie. Employées pour la première fois par l’Union soviétique et l’Allemagne lors de la Seconde Guerre mondiale, ces obus, roquettes ou missiles contiennent le plus souvent des mini-bombes explosives. Une fois largué par voie terrestre ou aérienne, le conteneur libère ces sous-munitions dont la propagation et l’impact peuvent recouvrir plusieurs centaines de mètres carrés.

Selon Amnesty, une école maternelle d’Okhtyrka (Nord-Est du pays) où se réfugiaient des civils, a été touchée vendredi matin par ce type d’arme. Trois civils, dont un enfant, ont été tués. Un autre a été blessé. S’appuyant sur des images vidéo de drones prises sur les lieux, l’ONG avance que l’attaque aurait " été menée par les forces russes, qui opéraient à proximité et qui ont l’habitude d’utiliser des armes à sous-munitions dans des zones peuplées ".
Pour Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, " cette attaque […] devrait faire l’objet d’une enquête en tant que crime de guerre ". De son côté, Human Rights Watch a affirmé que des armes à sous-munitions russes avaient touché un hôpital à Vuhledar (Est de l’Ukraine) le 24 février dernier, tuant 4 civils et en blessant 10 autres.

En s’éparpillant sur de vastes zones, ces mini-bombes sont une véritable menace pour les populations civiles, d’autant qu’elles n’explosent pas systématiquement, se transformant en mines antipersonnel pouvant tuer ou mutiler longtemps après la fin d’un conflit. " Des victimes atteintes de restes non explosés d’armes à sous-munitions ont été signalées en 2019 en Afghanistan, en Iraq, au Laos, au Liban ou en Serbie ", rapporte l’ONU à ce sujet.

Que dit le droit international humanitaire ?

La Convention de 2008 sur les bombes à sous-munitions interdit leur utilisation, leur transfert, leur production et leur stockage aux 120 États adhérents, dont la France et le Royaume-Uni. Elle prévoit également, en théorie, " la destruction des stocks, la dépollution des zones contaminées par les restes non explosés et l’assistance aux victimes. "

Indépendamment de cette convention, l’utilisation des armes à sous-munitions est normalement soumise au respect des règles générales du droit international humanitaire afin de limiter leur impact sur les civils. Mais leur manque de précision rend ces règles difficilement applicables, notamment le principe de distinction qui exige que les parties à un conflit fassent la différence entre objectifs militaires et population/biens civils. A noter que comme l’explique le Centre international de déminage humanitaire de Genève, leur utilisation indiscriminée " serait considéré comme un crime de guerre ".

Un cadre juridique qui ne suffit pas à limiter l’emploi des sous-munitions par les pays non-signataires de la Convention. Certains d’entre eux les ont d’ailleurs employées lors de conflits récents. C’est notamment le cas de l’Arabie saoudite au Yemen (2015-2018), de l’Ukraine et de la Russie sur le sol ukrainien (2014-2015) ou encore de la Syrie (depuis 2012).

À l’échelle mondiale, le dernier rapport de l’Observatoire des mines et des armes à sous-munitions fait état de 360 nouvelles victimes en 2020, dont 126 enfants. Parmi elles, 107 personnes ont trouvé la mort et 242 ont été blessées.