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L’armée russe a poursuivi son offensive jeudi sur plusieurs fronts, prenant pour cibles plusieurs grandes villes ukrainiennes. Les photos et vidéos montrant les destructions témoignent de l’intensité des bombardements aériens et de l’artillerie. Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a déclaré mercredi que le bilan humain de l’invasion russe de l’Ukraine est déjà " ahurissant " et ne va que continuer à s’alourdir. Les infrastructures détruites par les frappes russes " ne sont pas des cibles militaires ", a-t-il déploré dans une conférence de presse. Le Pentagone a déclaré de son côté que les Etats-Unis craignent une multiplication des victimes civiles en Ukraine. " Nous anticipons un usage accru de l’artillerie quand ils s’approcheront des centres urbains et quand ils tenteront de les encercler ", a précisé à la presse un responsable ayant requis l’anonymat. " C’est typique d’un siège: quand on veut encercler un centre urbain et le soumettre, le forcer à capituler, l’artillerie devient une arme très utile ", a-t-il expliqué. Mais " ce qui nous inquiète, c’est qu’en devenant plus agressifs, ils deviennent moins précis et moins sélectifs " dans leurs frappes d’artillerie, a-t-il ajouté. Quelque 82% du dispositif militaire russe déployé depuis des semaines aux frontières du pays est maintenant engagée en Ukraine, a indiqué le responsable.

Pourtant, il n’y a eu " aucun mouvement notable " des forces russes vers Kiev ou Kharkiv par rapport aux deux ou trois derniers jours, a-t-il affirmé, soulignant que la ville de Kherson (sud), dont les forces russes ont revendiqué mercredi le " contrôle total ", restait en fait une ville " très contestée ". En outre, les soldats russes n’ont toujours pas pris le contrôle de l’espace aérien ukrainien, et continuent à avoir des problèmes logistiques, notamment des pénuries de fuel et de nourriture. " Ils sont en retard sur leurs plans ", a-t-il poursuivi. Mais " ils ont encore une énorme force de combat à leur disposition et ils vont surmonter leurs difficultés. " Les Etats-Unis continuent de fournir une assistance militaire à l’Ukraine, la dernière livraison remontant à moins de 24 heures, a-t-il noté.
Les Ukrainiens sont par ailleurs toujours plus nombreux à quitter leur pays : près de 900.000 sont déjà partis à l’étranger depuis le 24 février, a déclaré mercredi le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés.

Sur le terrain, au septième jour de l’offensive déclenchée par Vladimir Poutine en Ukraine, des unités aéroportées russes ont débarqué à Kharkiv, la deuxième ville du pays, située à 50 km de la frontière avec la Russie, a affirmé l’armée ukrainienne. Après plusieurs bombardements dans le centre-ville la veille, qui ont fait au moins 21 morts selon le gouverneur régional, des bâtiments abritant des forces de sécurité et l’université ont été touchés. Au moins quatre personnes ont été tuées et neuf blessées. La place de l’Indépendance a été la cible dans la journée d’une frappe aérienne qui a fait voler en éclats les vitres de la mairie et détruit les commerces, a constaté un journaliste de l’AFP.

A Kiev, 500 km plus à l’ouest, dont les habitants qui n’ont pas fui se préparent depuis des jours à un assaut, un calme relatif règne mercredi, après que la tour de télévision eut été prise pour cible la veille. Plusieurs localités au nord-ouest de la capitale, dont Bucha et Gostomel, ont toutefois été bombardées, ont déploré les autorités régionales. La survie s’organisait dans le métro de Kiev transformé en abri antiaérien.

Dans la station Dorohozhychi, proche de la tour de télévision, l’AFP a vu des dizaines de familles. Beaucoup ont passé les six dernières nuits par terre, allongées sur des draps et des serviettes. La tour domine le quartier du parc-mémorial de Babi Yar, où furent abattus en septembre 1941, sous l’occupation nazie, plus de 33.000 juifs. Si aucun monument en hommage aux victimes de ce massacre n’a été atteint, le président Volodymyr Zelensky, d’ascendance juive, a accusé Moscou de chercher à " effacer " l’Ukraine et exhorté les juifs " à ne pas rester silencieux ". Le maire de la capitale, l’ex-boxeur Vitaly Klitschko, a appelé tous les habitants à la résistance : " Kiev tient et va tenir ".

Des bombardements ont également eu lieu à Jitomir, 150 km plus à l’ouest. L’AFP a vu mercredi des personnes fouiller les décombres d’un petit marché. Au moins trois personnes y ont été tuées et une dizaine blessées, selon des habitants de la ville.

L’armée russe fournissait quant à elle officiellement de premiers chiffres sur ses pertes en sept jours de combats. " 498 militaires russes sont morts (…) 1.597 de nos camarades ont été blessés ", a annoncé son porte-parole Igor Konachenkov, devant les caméras de la télévision publique russe.

Dans le sud, les militaires russes ont affirmé totalement contrôler Kherson, mais la situation y restait incertaine. Le maire de cette cité, Igor Kolykhaïev, a évoqué une " catastrophe humanitaire ".

Plus à l’est, à Marioupol, le principal port ukrainien de la mer d’Azov, " ça se dégrade d’heure en heure ", a témoigné une de ses habitantes, Maryna, 28 ans, selon laquelle le centre-ville a été pilonné. Si elle en prenait le contrôle, l’armée russe pourrait assurer une continuité territoriale entre ses forces en provenance de Crimée et celles arrivées des territoires séparatistes plus au nord. Dans ce contexte, le ministère russe de la Défense a annoncé mercredi la mise en place de couloirs humanitaires pour permettre la sortie des civils des villes ukrainiennes les plus exposées, notamment Kiev, Kharkiv et Marioupol.

Avec AFP