Quatre auteurs français de renom ont renoncé à participer au Festival du livre international et francophone organisé par la France au Liban qui s’ouvre mercredi, à la suite d’accusations de sionisme, mais l’événement est néanmoins maintenu, ont annoncé les organisateurs. 

Après quatre années de privation du Salon du livre francophone de Beyrouth qui faisait la fierté des francophiles libanais, la France a pris l’initiative d’organiser un Festival du livre international et francophone. Un vaste projet audacieux et ouvert à l’ensemble de la population libanaise puisque l’arabe et le français se côtoient et se complètent.

Une centaine d’auteurs francophones du monde entier prennent part à Beyrouth Livres, une manifestation culturelle inédite au cours de laquelle les quatre finalistes du prix Goncourt 2022 doivent être annoncés depuis la capitale libanaise.

Mais quatre membres du prestigieux Goncourt (Éric-Emmanuel Schmitt, Tahar Ben Jelloun, Pascal Bruckner et Pierre Assouline) ont décidé de ne pas participer à cet événement. " Certains auteurs se sont désistés en raison de la situation sécuritaire dans le pays, et d’autres pour des raisons personnelles ", ont indiqué les organisateurs.

Le ministre libanais de la Culture, Mohammad Mourtada, proche du mouvement chiite Amal, avait accusé le 8 octobre certains auteurs participant au festival, sans les nommer, de soutenir " le sionisme ", avant de retirer son communiqué des réseaux sociaux.

M. Mourtada, dont la formation est alliée au puissant Hezbollah pro-iranien, ennemi juré d’Israël, n’avait pas précisé à quels auteurs il faisait allusion. Mais il avait affirmé qu’il " ne permettrait pas à des sionistes de venir parmi nous et de répandre le venin du sionisme au Liban ".

Mercredi, le quotidien Al-Akhbar, proche du Hezbollah, a publié un article se félicitant du désistement des auteurs, sous le titre : " Beyrouth tient tête aux sionistes ".
" Le ministère de la Culture nous a assurés de son soutien complet pour l’organisation de ce festival qui a pour but de remettre en valeur le rôle de Beyrouth comme capitale culturelle ", a déclaré Sabine Sciortino, directrice de l’Institut français du Liban qui organise l’événement.

" La programmation ambitieuse du festival se maintient ", a-t-elle souligné. " L’Académie Goncourt nous a assuré qu’elle allait honorer l’engagement pris, le président Didier Decoin se déplacera à Beyrouth pour annoncer les finalistes du prix ", le 25 octobre.

Le Liban et Israël sont techniquement en état de guerre et des campagnes ciblent régulièrement des auteurs accusés de " normalisation ". En 2016, le prestigieux auteur franco-libanais Amin Maalouf, lauréat du prix Goncourt, avait été la cible d’une campagne au Liban pour avoir accordé une interview à un média israélien.

Une telle mauvaise foi de la part des " autorités culturelles " est si choquante que l’on se demande s’il aurait fallu, en sus d’assurer un événement fédérateur bilingue, le rehausser par une pincée de farsi dont le redoutable venin se répand comme une trainée de Captagon dans un Liban désormais inféodé à l’obscurantisme des mollahs…

Bélinda Ibrahim – Avec AFP