Directrice de l’Institut français à Deir el-Qamar pendant quatre ans, de 2007 à 2011, Delphine Gayrard a été profondément marquée par le Liban. Nous l’avons rencontrée pour discuter sur son parcours passé, présent et à venir.

Quel a été votre parcours professionnel avant d’être nommée directrice générale adjointe pour la culture et la transformation numérique au département des Alpes-Maritimes?

Mon parcours professionnel m’a conduite à occuper des responsabilités dans différentes institutions publiques (ministère de l’Économie, ministère des Entreprises, ministère des Affaires étrangères, Chambres de commerce et d’industrie, université Paris-Dauphine…) dans le domaine de l’économie et de la culture, à Paris. Puis, j’ai eu envie de contribuer à la promotion de la culture et la langue françaises à l’extérieur de France et de m’engager dans la coopération. Je suis alors partie au Liban et occupé le poste de directrice de l’Institut français de l’ambassade de France à Deir el-Qamar pendant quatre ans. J’ai ensuite travaillé pour une ONG irakienne à Erbil pendant six mois dans le cadre d’une mission humanitaire. Puis je suis repartie en poste au Soudan, à Khartoum, comme attachée culturelle et directrice de l’Institut français, pendant quatre ans. De retour en France, j’ai alors intégré le département du Nord (à Lille) en tant que directrice générale adjointe en charge du développement territorial (collèges, culture, sport, agriculture, aide aux communes). Et me voici désormais depuis deux ans au département des Alpes-Maritimes, dont le siège est situé à Nice, en charge de la culture et de la transformation numérique. Comme vous pouvez le constater, j’aime vivre des expériences contrastées, partir à la rencontre des territoires et découvrir l’ailleurs. Et surtout, monter des projets innovants, valoriser le patrimoine et la culture.

Qu’avez-vous le plus apprécié lors de votre séjour au Liban entre 2008 et 2011 et quel est le projet dont vous gardez le meilleur souvenir?            

Je ne considère pas avoir "séjourné" au Liban, mais avoir vécu une expérience extraordinaire pendant quatre ans. Je ne me suis jamais sentie étrangère dans ce pays que j’ai tout de suite adopté et qui, je crois, m’a adoptée sans réserve. J’ai adoré le Liban avec sa géographie époustouflante maritime et montagneuse, et le peuple libanais dans sa diversité, sa créativité mais aussi dans sa capacité à s’adapter à tout. Les Libanais ont un instinct de survie et une envie de vivre que l’on sent à chaque instant. Leur gentillesse et leur sens de l’accueil sont légendaires. Mais plus encore, ce qui m’a fascinée, c’est la vitalité culturelle qui anime ce pays avec de très grands écrivains, plasticiens, musiciens, comédiens, chanteurs, universitaires… Je garde, par exemple, un souvenir très ému de ma rencontre avec l’écrivain Rachid el-Daïf.

Pour répondre à la deuxième partie de votre question, j’ai beaucoup de "meilleur souvenir", mais si je devais en choisir un, ce serait la création du Cinéchouf, un cinéma itinérant de films de fiction et d’animation dans le Chouf, l’Iqlim et le Haut-Metn (écoles, structures associatives…) qui permet d’aller dans des lieux les plus reculés où il n’y a pas de salles de cinéma. Nous parcourions des dizaines de villes et villages chaque année à la rencontre des écoliers, collégiens, lycéens, ou simplement des habitants, pour projeter des films et favoriser la discussion comme l’apprentissage et la pratique du français. Le Liban m’a marquée à jamais. L’engagement de ces femmes et ces hommes, nombreux, qui chaque jour forcent le destin et se tiennent debout pour avancer quoiqu’il arrive suscite mon admiration. Le Liban s’est toujours relevé. Pour reprendre une célèbre chanson de Fairouz, "bhebbak, ya Lebnan"!

Quels sont les défis auxquels vous êtes confrontée actuellement dans le cadre de vos fonctions? 

J’ai la chance de travailler pour un département qui conduit une politique culturelle ambitieuse et exigeante sur son territoire. Le département est le premier soutien de la culture, avec 25 millions d’euros dépensés chaque année pour développer une offre culturelle diversifiée, de qualité, partout sur le territoire. Le défi est essentiellement géographique.

Les Alpes-Maritimes ressemblent à certains égards au Liban. Avec une topographie très contrastée, il possède un littoral peuplé, tandis que la partie montagneuse est plus étendue, mais beaucoup moins habitée, avec ses stations de ski, Valberg, Auron et Isola. Le département offre d’immenses possibilités de randonnée avec des vues à couper le souffle. On peut également découvrir la vallée des Merveilles, dans le massif du Mercantour, où ont été découvertes plus de 40.000 gravures rupestres préhistoriques.

Le défi que relève quotidiennement le département, c’est de permettre à chaque Maralpin (les habitants du département), où qu’il réside, de pouvoir avoir accès à une offre culturelle. C’est ce à quoi nous nous employons chaque jour. Par ailleurs, le département, très attaché à la conservation de son patrimoine culturel, a mis en place un plan d’envergure de restauration des édifices religieux (chapelles, églises…) qui constituent l’histoire de ce territoire.

De nombreux édifices sont par ailleurs en train d’être numérisés en 3D pour pouvoir être "visité" de façon virtuelle dans d’autres lieux et être ainsi accessibles à tous.

Parlez-nous de la Micro-Folie et de vos projets.  

Delphine Gayrard

Le président du département, Charles-Ange Ginesy, a fait de l’innovation une de ses priorités, à travers le "Smart Deal". C’est pourquoi le département est résolument engagé dans le développement et l’innovation technologiques au service notamment de l’accès à la connaissance, à la culture et aux arts.

Dès février 2020, en partenariat avec une douzaine d’institutions nationales (le Louvre, le musée d’Orsay, l’opéra de Paris, l’Institut du monde arabe, le centre Pompidou) coordonné par la Villette-Paris, nous avons créé une Micro-Folie départementale à Nice. Véritable tiers-lieu de culture numérique dédié aux arts, la Micro-Folie constitue un espace convivial d’apprentissage et d’échange. Toutes les activités proposées dans cet espace culturel numérique de 300 mètres carrés sont gratuites. La Micro-Folie regroupe cinq espaces:

1- Le musée numérique qui propose plusieurs milliers de chefs-d’œuvre issus d’institutions nationales et internationales présentés en très haute définition sur un écran géant et agrémentés d’une interaction par le biais de tablettes numériques.

Delphine Gayrard

2- l’espace de réalité virtuelle qui offre une expérience immersive à 360° au cœur des grandes œuvres de l’histoire des arts mais également des promenades 3D pour découvrir le patrimoine des Alpes-Maritimes ainsi que des hologrammes captivants. Vous pouvez notamment contempler La Joconde sous un nouveau jour avec l’expérience de réalité virtuelle développée par le Louvre (en partenariat avec HTC Vive), En tête-à-tête avec la Joconde, qui s’appuie sur les dernières recherches scientifiques qui ont mis au jour les techniques utilisées par l’artiste dans son processus de création et des informations sur l’identité du modèle. Vous découvrirez également un hologramme du pendentif Au nom du roi Osorkon II (850 av. J.-C.) qui nous a été prêté par le département des Antiquités égyptiennes du Louvre. Ce bijou d’une pure beauté avec ses trois figurines en or constitue une œuvre remarquable.

Delphine Gayrard

3- Le FabLab, atelier de fabrication numérique avec scanner, imprimante 3D, brodeuse numérique, graveuse-découpeuse laser, découpeuse vinyle… pour tous ceux qui souhaitent développer leur créativité.

Delphine Gayrard

4- L’Art Box, un lieu d’animation et d’exposition, présente actuellement l’exposition L’Art vu par les Playmobill de Richard Unglick.

Delphine Gayrard

5- Enfin, une cinquième salle, la Biblio’Art est une bibliothèque aux couleurs bleues Klein dédiée à l’art et au numérique.

Delphine Gayrard Depuis son ouverture, plus de 6.000 personnes ont visité la Micro-Folie. De publics très différents, elles en sont toutes ressorties enchantées. Si un jour vous venez à Nice, rendez-vous au 26 rue Saint-François de Paule, du mardi au samedi de 10h à 18h! Sinon, retrouvez-nous sur les réseaux sociaux: Instagram (Micro_Folie_06), ou Facebook (Micro-Folie 06). Ahlan Wa Sahlan Fikoum!

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