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Chrystelle, à la voix d’or, dévoile Mon père, une nouvelle chanson émouvante en hommage à son père. L’artiste nous invite dans les coulisses de cette création poignante, reflétant la profondeur de ses émotions et son engagement artistique.

Auteure, compositrice et interprète, Chrystelle se livre corps et âme dans ses projets créatifs, tout en préservant une harmonie entre son identité et ses œuvres. Fidèle à ses émotions, elle puise dans son inspiration et chante sans relâche. Elle partage avec Ici Beyrouth les coulisses de sa chanson, Mon père.

Mon père. Pourquoi cet hommage à cet instant précis?

C’est un moment important dans ma vie. Dans deux semaines, je me marierai. J’avais aussi envie de sortir cette chanson juste avant la fête des Pères, pour remercier mon père de sa présence et de son soutien. J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour lui. Passionné, il m’a transmis l’amour de la musique, et c’est grâce à elle que j’ai rencontré mon fiancé. Quand nous étions petits, papa nous chantait toujours des opérettes de Feyrouz pendant les longs trajets en voiture, qu’il nous traduisait car on ne comprenait pas bien l’arabe. Il nous faisait aussi répéter après lui. C’est ainsi que nous avons appris l’arabe, et à chanter.

C’est important pour moi, à quelques jours de changer de nom de famille, de dire à mon père tout ce qu’il représente pour moi. Il m’a toujours soutenue, même quand il ne comprenait pas mes choix. Je suis en quelque sorte la "rebelle" de la famille, donc je peux vous dire que je les ai fatigués (rires). Dans certaines familles libanaises, la vie d’artiste n’est pas encore très acceptée: on préfère que l’on soit docteur ou ingénieur. Les artistes sont souvent perçus comme des gens économiquement instables…On aime les applaudir mais quand quelqu’un de sa famille choisit cette voie, on s’inquiète.

Je comprends cette inquiétude parentale, bien sûr, mais cela ne facilite pas les choses pour les jeunes qui veulent suivre cette voie. Non seulement devons-nous nous battre contre nous-mêmes chaque jour pour continuer à avancer et à croire en notre potentiel, mais en plus, nous devons lutter contre sa famille et leur expliquer que c’est un vrai travail. Mon père a toujours été un allié, parce qu’il a compris que la musique était mon plus grand bonheur.

"Vous dire son regard", chantez-vous. Pourriez-vous le "dire" en mots?

Le regard de mon père est avant tout un regard rempli de passion, le regard d’un idéaliste, de quelqu’un qui a rêvé de son pays toute sa vie, qui s’est battu pour son pays, qui lui a tout donné: son temps, sa plume, ses économies…Depuis 2020, il porte une tristesse difficile à effacer…c’est ce que je chantais dans Alors je reste; des yeux trahis et remplis de nostalgie. Le regard de mon père, c’est aussi celui d’un homme intègre, que personne ne peut corrompre. J’ai toujours admiré cela chez lui, il est intransigeant avec lui-même et ses valeurs. Finalement, c’est un regard rieur, rempli d’amour, celui d’un homme qui donnerait tout pour sa famille, celui de quelqu’un qui ne vous abandonne jamais dans la difficulté, un regard qui dit: "Relève-toi, je suis là".

J’ai la chance d’avoir un père comme lui, et je ne voulais pas attendre son "grand départ" pour lui rendre hommage. Les gens attendent souvent qu’il soit trop tard pour faire ce genre d’hommage. Il faut dire à ceux qu’on aime toutes ces choses de leur vivant. Sans perte de temps. Moi aussi, d’ailleurs, je suis extrêmement pudique avec mes sentiments, il n’y a que la musique qui me permet de tout verbaliser. Voilà pourquoi mon projet musical a des airs de journal intime. Mes chansons portent tous mes non-dits.

"Chaque jour est un départ." Dans votre départ actuel, quels sont les bagages que vous emportez avec vous?

C’est une belle question. Pour moi, chaque matin est un nouveau départ et l’occasion d’essayer de refaire ce qu’on a raté la veille. Je n’abandonne pas, et je pense que cet entêtement est mon plus beau bagage. Le succès dans la musique, ou dans toute autre chose d’ailleurs, ce n’est pas une destination mais un chemin, la persévérance de toujours continuer à essayer, sans s’arrêter, et de profiter des instants de bonheur que nous offre chaque étape.

Qu’est-ce que "chavirer" pour vous?

C’est sombrer dans une forme de désespoir, quand on a l’impression que plus rien n’a de sens autour de soi, et qu’il n’y a pas d’issue. J’ai une personnalité "borderline", donc il m’arrive régulièrement de vivre des moments d’euphorie et des moments de désespoir. C’est assez fatigant, mais je m’y suis habituée. Dans ces moments, je pense à ma famille et je me dis que s’ils arrivent à maintenir le cap, moi aussi je dois essayer à nouveau.

Quelle est votre zone de confort et pourquoi ne pas vous y complaire?

Je dirais en pyjama, avec plein de trucs à grignoter, devant une série d’amour pour ados comme Gossip Girl! (rires). C’est tellement plus facile de rêver sa vie que de la vivre. Le pire danger serait de s’oublier dans ce monde imaginaire et de se laisser couler justement. La musique me permet de continuer à me challenger. Oser écrire, oser faire écouter ses créations, oser sortir de nouvelles chansons en public, oser les chanter sur scène, oser, oser, oser… pas de musique sans audace. Faire de la musique son métier, c’est sortir en permanence de sa zone de confort. C’est tellement plus facile de créer et de ne jamais rien faire écouter à personne; au moins on ne prend pas le risque d’être critiqué. Mais si on reste dans ces moments de complaisance personnelle, on n’évolue pas, on n’apprend rien. Continuer à essayer encore, c’est grandir.

Entre Beyrouth et Paris, où se trouve aujourd’hui votre "bon port"?

Pour l’instant, je suis un peu en errance. Cela fait quatre ans que ne suis pas rentrée à Beyrouth… Je suis fatiguée de la vie parisienne, bien que Paris soit la plus belle ville du monde à mes yeux. Le rythme de vie est trop éreintant. Je cherche à me construire un nouveau port, ailleurs. J’ai actuellement choisi l’Espagne, Valencia en particulier, où je retrouve une ambiance méditerranéenne tout en n’étant pas loin de Paris. J’espère pouvoir m’y installer bientôt.

Vos projets futurs?

J’ai plusieurs chansons prêtes à être dévoilées au public. La parution de Mon père marque le début d’une série de nouveaux titres à venir. Le projet s’appelle "Implicite". C’est un projet super intime dans lequel je chante toute cette poésie du non-dit. C’est un face-à-face avec moi-même.

Votre ultime "ambition"?

Trouver l’harmonie, apprendre à m’aimer un peu plus. J’ai beaucoup de mal avec mon image, je suis ma pire ennemie, donc je dirais apprendre à m’apprécier plus.

 

 

 

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