Je parcours beaucoup de kilomètres dans la journée, plus que la moyenne je veux dire. Avant, j’avais mes habitudes dans le quartier de Mar Mikhaël, ma balade hebdomadaire était bien rôdée. Je prenais la troisième à droite depuis chez moi, vers ce restaurant qui ne paie pas de mine, pour un petit-déjeuner à la libanaise. Je me contentais de ce que je trouvais au pied des tables, à chaque fois un festin: restes de labneh que je léchais avec délice et parfois même des morceaux de man’ouché au fromage laissés par les clients rassasiés.

Alourdi, je dandinais gaiment jusqu’au grand escalier. Je le nommais ainsi, mais en réalité, il s’agissait de trois volées de marches bariolées, pleines de passants qui se photographiaient. J’aimais courir entre leurs jambes, les embêter un peu; la plupart du temps, ils me trouvaient mignon. Il paraît que ce lieu de balade est touristique parce que des artistes y ont peint des motifs géométriques de couleurs vives. Personnellement, daltonien que je suis, je ne distinguais que du bleu et du jaune.

Balade Gens

Mais je ne vagabonde plus tellement dans ce coin-là. Un jour, je me suis laissé surprendre par la nuit. J’avais été malade toute la journée, nombreux vomissements et douleurs dans le ventre… la faute à de copieux restes de poissons que j’avais dévorés directement sur l’arrête trouvée dans une poubelle. Je n’avais pu profiter de ma balade quotidienne qu’en toute fin d’après-midi et je m’étais perdu. Je n’ai pas un bon sens de l’orientation… Les copains du quartier se moquent de moi avec ça: je me balade, mais me perds aisément. J’ai parcouru près de cinq kilomètres, j’en avais plein les pattes et j’ai dû passer la nuit dehors. En six ans d’existence, c’était la première fois. Je ne le referai pas, mais je ne regrette rien. N’empêche! J’ai découvert une rue formidable nommée Hamra, un terrain de chasse incroyable!

Ici, les habitants semblaient heureux. Ils vivaient dans d’élégantes maisonnettes libanaises colorées, drôlement agencées, suspendues aux gouttières, aux grilles ou aux poteaux. Les occupants pépiaient et chantaient toute la journée. Une véritable rue du bonheur!

Balade Gens

Je retrouvais un snack fréquenté, du labneh et des mana’ich grignotées et même un petit robinet d’eau, appréciable après les mets salés.

Chaque fois que j’y retournais, j’étais fasciné. Mon petit corps et mes pattes s’habituaient aux nombreux kilomètres que cette balade leur imposait; je gagnais en endurance et ne stockait plus de graisse sur le ventre. Je gardais juste un léger mal de nuque à force de gambader la tête relevée.

En fait, je n’avais même pas envie de chasser les oiseaux, après tout, eux m’accueillaient chaleureusement… j’étais pourtant leur prédateur numéro un!

"In the winter of 2012, Thomas went to Beirut to make an international tribute to the Happy City Birds Project. With the help of a couple of locals, he made 110 birdhouses with a design to look like a classic Beirut house."

Sources et photos:
s
ite internet de Thomas Dambo : https://thomasdambo.com/works/birds-in-beirut/
Sites internet:
https://www.lemoniteur.fr/article/beyrouth-marches-d-escalier-et-nids-d-oiseaux-dignes-d-une-palette-de-peintre.1404474
https://thomasdambo.com/works/birds-in-beirut/
Le titre est librement inspiré de la chanson La Ballade des gens heureux de Gérard Lenorman

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