Un an, jour pour jour, et la douleur est toujours aussi vive, l’émotion palpable, mélangée à la colère, dans le jardin de la résidence des Slim, à Haret Hreik, dans la banlieue-sud, où repose Lokman, et qui a accueilli la cérémonie commémorative pour la première année de sa disparition ainsi que la remise du Prix Lokman Slim.

Cinq trophées au total ont été conçus pour perpétuer la mémoire de l’homme, et décernés à des " Lokmaniens " de la première heure, triés sur le volet pour leur action en faveur du rayonnement du Liban.

Le jardin où la voix de Lokman résonnait pour nous rappeler ses paroles justes, vraies, implacables, et toujours d’actualité, était bondé. La famille, Salma sa mère, Rasha sa sœur, et son épouse Monica étaient entourées de ses compagnons de route qui partageaient ses valeurs, et qui ont tous répondu présent. À ceux-là sont venus s’ajouter activistes, intellectuels, dignitaires religieux et hommes politiques, tels qu’Ahmad Fatfat, président du Conseil national pour la levée de l’occupation iranienne (CNLOI), l’ancien ministre Melhem Riachi, le Pr Antoine Messarra, ancien membre du Conseil constitutionnel, le général Khalil Hélou, Rony Chatah, fils de feu Mohamad Chatah, lui-même victime de la barbarie des assassins " anonymes ", entre autres.

Fait particulièrement notable : l’importante présence de nombre d’ambassadeurs et de diplomates, notamment les ambassadeurs et ambassadrices de France, des Etats-Unis, de Grande Bretagne, de Belgique, de Suisse, du Canada, d’Autriche, d’Allemagne et la représentante des Nations-Unies.

Préserver la singularité du Liban

La cérémonie a débuté par une minute de silence, de recueillement, comme le veulent de telles circonstances. Par la suite, la chanteuse Maysa Jallad a entonné la chanson de Lokman, sur des paroles de Rasha, Monica et " Sitt Salma ", avant de laisser place aux représentants des chancelleries à Beyrouth qui ont marqué l’assistance par leur présence solennelle.

Outre leur soutien à la famille et l’amitié qui liait certains d’entre eux à Lokman, ces ambassadeurs et diplomates se sont succédés pour rappeler que la " voix de Lokman ne s’est pas tue " !  Et pour évoquer, si besoin est, les mérites de Lokman, ses combats, son esprit libre et érudit, son courage et son action sur plus d’un front.

Plus important encore, il était surtout question de rappeler que la justice se fait toujours attendre, pour Lokman mais aussi pour les autres… Mais que la vérité et la justice devraient être rendues, de façon transparente et indépendante. L’impunité ne saurait avoir le dernier mot.

Ce parterre de diplomates réunis a réitéré la nécessité de préserver ce qui fait la singularité du Liban, la liberté, notamment la liberté d’expression – quoique malmenée –  la pluralité, la paix et la coexistence auxquels les Libanais aspirent.

Au terme des allocutions, quatre récipiendaires ont reçu le Prix Lokman Slim, conçu par Sélim Mouzannar :

  • Leila Hanna, pour son travail floral pour préserver la rose éternelle de Lokman.
  • Maysa Jallad, pour sa chanson dédiée à Lokman et son travail sur la musique et la mémoire.
  • Fadi Toufaili, pour sa biographie de Wahid el-Solh, assassiné au centre de Beyrouth en 1985.
  • Nasri Messarra pour son étude de terrain sur les réseaux de la haine qui ont cerné Lokman Slim de son vivant et après son assassinat.

Un cinquième Prix – une surprise – a été décerné à Salma Slim, la mère courage de Lokman.

Au terme de cette cérémonie, les amis de Lokman se sont rendus au Hangar d’Umam, mitoyen à la maison, pour visiter l’ "amie diabolique " de Lokman, sa porte-parole fictive, qui commentait l’actualité sur les réseaux sociaux, et arpenter ce lieu où la parole de Lokman est omniprésente, sur les murs, dans les diverses publications et surtout dans la pensée de tout un chacun présent ce jeudi 3 février et déterminé à poursuivre sur cette voie tracée par cet amoureux du Liban pour lequel il n’y a " …pas de fuite, sauf en avant… ". Et avec zéro peur.