" Pas besoin d’enquête, c’est nous ", affirme en substance le député du parti chiite Hassan Fadallah au ministre de l’Intérieur Bassam Maoulaoui, au sujet des deux réunions d’opposants bahreïnis interdites. 

Le Hezbollah a poursuivi vendredi ses provocations contre les pays du Golfe, au moment où l’État libanais tente plutôt de montrer patte blanche à ces derniers, après la feuille de route franco-saoudienne lors du déplacement du président français Emmanuel Macron en Arabie saoudite fin 2021 et l’initiative koweïtienne, présentée à Beyrouth il y a quelques semaines par le chef de la diplomatie de ce pays, cheikh Ahmad Nasser al-Mohammad al-Sabah.

Après avoir interdit jeudi deux événements organisés à Beyrouth les 14 et 15 février par des opposants bahreïnis sous l’égide du Hezbollah, le ministre de l’intérieur Bassam Maoulaoui a de nouveau envoyé deux notes à la direction générale des Forces de sécurité intérieure et à la direction générale de la Sûreté générale, leur demandant d’informer la direction de la salle où se déroule l’exposition “Rissalat”, située dans le quartier de Rihab dans la banlieue-sud, que les deux activités organisées par la Société islamique nationale dite “al-Wefaq”, hostile au régime de Manama, n’auraient pas lieu dans la mesure où “elles n’ont pas obtenu les autorisations légales”. M. Maoulaoui a également appelé les deux organes de sécurité à mener leur enquête “pour recueillir des informations sur les organisateurs, les invités et les hôtes”.

Le ministre de l’Intérieur a justifié son geste par les risques que l’événement puisse “entraver les efforts officiels déployés par l’État libanais pour renforcer les relations avec les États arabes du Golfe, à la lumière de l’initiative koweïtienne par le biais de laquelle l’État s’est engagé à prendre toutes les mesures qui empêchent toute atteinte verbale ou réelle aux pays arabes frères”, et “porter préjudice, partant, à l’intérêt national supérieur et aux orientations officielles de l’État libanais”.

En soirée, le député du groupe parlementaire du Hezbollah, Hassan Fadlallah, a répondu sur un ton de défi au ministre de l’Intérieur, dans le cadre d’un entretien à la chaîne de télévision du parti chiite al-Manar. " Nul besoin d’une enquête, cette salle appartient au Hezbollah”, a-t-il dit, justifiant que “de par son identité, le Liban est un pays de libertés”. “Qu’ils présentent un projet pour amender la Constitution”, a ajouté le député du Hezbollah – un parti qui ne possède aucune existence légale aux yeux de l’État libanais.

" Si ces deux événements venaient à avoir lieu, ils porteraient atteinte aux autorités officielles bahreïnies et aux pays arabes du Golfe, bloquant ainsi les efforts officiels du Liban pour renforcer les relations " avec ces pays, avait déclaré jeudi M. Maoulaoui dans un communiqué.

Début décembre, des membres du groupe d’opposition al-Wefaq, aux liens étroits avec le Hezbollah, avaient tenu à Beyrouth une conférence de presse au cours de laquelle ils avaient dénoncé des violations des droits humains au Bahreïn, provoquant la colère de ce royaume du Golfe. M. Maoulaoui avait alors demandé l’expulsion de ces opposants.

Bahreïn a dissous en 2016 al-Wefaq, l’un des deux principaux groupes d’opposition dans le royaume, en raison de liens présumés avec des “terroristes ".

Banderole de solidarité avec le Yémen

Dans la même veine, le Hezbollah a organisé vendredi une cérémonie à Bourdaï, à Baalbeck (Békaa), durant laquelle il a érigé une banderole de soutien aux Houthis au Yémen sur une colline de la région… alors même que le Liban officiel s’était précipité au cours des derniers jours de stigmatiser les attaques menées par les rebelles yéménites contre les Émirats arabes unis.

La schizophrénie se poursuit donc au plus haut niveau de l’appareil d’État, dont le Hezbollah est partie intégrante, dans ce qui apparaît comme une chorégraphie de la " coexistence pacifique” entre le plus fort, à savoir la milice, et le plus faible, une présidence du Conseil qui tente, pour une multitude de soucis intérieurs et extérieurs, de préserver des ersatz de présence légale face aux armes illégales.

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