Alors que l’étau se resserre sur le pouvoir d’achat des Libanais, le Front souverainiste pointe du doigt "un acharnement supplémentaire sur les épaules des honnêtes contribuables, annonciateur d’une mainmise renforcée des non-cotisants sur le pays".

C’est essentiellement pour souligner les dangers du projet de budget que s’est réuni le Front souverainiste pour le Liban mardi matin à Sodeco, à l’occasion de son septième congrès. Plus tard dans l’après-midi, le Premier ministre Nagib Mikati a transmis le projet définitif de budget à la présidence de la République ainsi qu’au Parlement qui devra, après débat, le promulguer par une loi.

Anticipant la transmission du projet de budget à la Chambre des députés, la coalition a accusé dans un communiqué les responsables politiques d’ "irresponsabilité et d’enrichissement perpétuel, alors même qu’une situation de misère sans précédent accable la population libanaise". Le Front estime en substance qu’augmenter les impôts et les taxes dans ce contexte de crise économique accrue est irrecevable pour la partie de la population qui a toujours et en toute honnêteté contribué aux charges publiques, surtout au regard du fait que "quasiment tout ce que le peuple possédait lui a déjà été pris".

Trois membres du secrétariat général du Front contactés par Ici Beyrouth ont ajouté à cela qu’il ne faut pas omettre le rôle fondamental du Hezbollah dans l’effondrement du pays, et dans lequel ce projet de budget s’inscrit. "Alors que toutes les caisses sont vides, le gouvernement continue d’augmenter les impôts et de creuser l’écart entre ceux qui payent et ceux qui ne le font pas, accuse l’un d’entre eux. C’est au Hezbollah que cet écart profite essentiellement, dans la mesure où l’augmentation des taxes, notamment douanières, doit être comprise dans un contexte de contrôle par le parti de toutes les infrastructures du pays, qu’elles soient maritimes (ports), aériennes (l’aéroport) ou terrestres (les frontières avec la Syrie)" a-t-il ajouté.

Cependant, la coalition ne s’est pas contentée de critiquer. Elle a aussi formulé des idées fidèles à la représentation qu’elle se ferait d’un budget cohérent et salvateur. Ainsi, parmi les propositions du Front, on note les éléments suivants:

  • – D’abord le retour des institutions à l’esprit de la Constitution libanaise pour rétablir la confiance entre le Liban et son environnement, notamment les pays du Golfe, ce qui réactiverait le cycle d’investissements et le tourisme, qui a autrefois rapporté de l’argent au Trésor public.
  • – La condamnation de tous les représentants de la classe politico-financière libanaise à restituer les sommes sorties du Liban avant 2019 et jusqu’à ce jour, pour restaurer la confiance des Libanais et des étrangers quant à la fiabilité de l’économie libanaise.
  • – La fermeture de tous les passages légaux et illégaux de contrebande ainsi que la récupération de la valeur des marchandises introduites en contrebande en Syrie, sachant que ces actes criminels ont été effectués aux frais du déposant libanais en raison de la politique de subvention dévastatrice qui a duré des années et coûté des milliards de dollars à la Trésorerie. L’identité des contrebandiers, leurs adresses et numéros de téléphone sont très bien connus des forces de l’ordre.
  • – La suppression des milliers de salaires que des proches de fonctionnaires décédés continuent de percevoir depuis des décennies, ainsi que la récupération des sommes indûment perçues par leurs familles. Sans oublier la suppression des milliers d’emplois fictifs au sein de la fonction publique, et plus globalement la restructuration des établissements publics.
  • – La soumission complète et définitive à l’impôt et aux charges publiques à travers tout le territoire libanais, camps de réfugiés, déplacés, et enclaves sécuritaires inclus ; et de toutes les entreprises et personnes physiques, sans exception. À chacun d’entre eux de payer sa part des frais liés notamment à l’eau, l’électricité, la taxe mécanique, les infrastructures, pour empêcher que certaines parties de la population ne profitent de la contribution des autres qui sont contraints de payer plus que leur propre part…

Le communiqué de ce 7e congrès a été lu par Charbel Azar, représentant de 22 groupes souverainistes de la société civile au sein du Front. Il indique par ailleurs que la renonciation à la ligne maritime 29 au Liban-Sud constitue un acte de haute-trahison, en ne manquant pas d’avertir son auteur que "l’histoire ne pardonne pas".

* Le Front souverainiste a été formé le 29 septembre 2021. Il regroupe une vingtaine de formations souverainistes issues de la société civile ainsi que des personnalités et partis politiques tels que les Forces libanaises, le Parti national libéral, le Parti syriaque international et les Gardiens du cèdre. Le but de ce front est de dénoncer ouvertement la mainmise du Hezbollah sur le Liban, son État et ses institutions, et de mettre l’accent sur son rôle de bras armé de la République islamique d’Iran.