Nouvel épisode dans la saga des négociations entre l’Iran et les Occidentaux. Selon le Guardian britannique, Londres, Berlin et Paris auraient décidé de ne pas lever leurs sanctions contre Téhéran en octobre prochain. Les trois puissances européennes sont restées dans l’accord sur le nucléaire iranien malgré le retrait US sous Trump en 2018 et les violations de cet accord par Téhéran depuis cette date.

Le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France devraient annoncer pour la première fois leur intention de rompre l’accord sur le nucléaire iranien de 2015, connu sous le sigle anglais JCPOA.

Les trois puissances européennes auraient décidé, selon le journal britannique The Guardian, de ne pas lever les sanctions contre l’utilisation de missiles par Téhéran en octobre, comme l’exige l’accord.

Centrifugeuses sur le site de recherche nucléaire iranien de Natanz.

L’ex-président américain Donald Trump a retiré les États-Unis du JCPOA en 2018, mais l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni sont restés dans l’accord, malgré la réaction iranienne de violer les conditions convenues. Téhéran a, en effet, poussé les limites permises par l’accord sur la qualité et la quantité d’uranium enrichi.

Désormais, Téhéran est plus près que jamais de produire de l’uranium de qualité militaire en déclarant avoir produit des quantités d’uranium enrichi à 60%, alors que l’accord a plafonné l’enrichissement à 3,67 %.

Une bombe atomique requiert un enrichissement à plus de 90% de l’élément fissile. De ce fait, le Guardian s’interroge sur le risque que représente la décision des Européens.

La justification citée par l’UE et les diplomates britanniques incluait la propre violation par l’Iran de l’accord et la vente par l’Iran de drones à la Russie, que Moscou a utilisé dans son invasion de l’Ukraine. Les Européens s’inquiètent également de possibles futurs transferts vers la Russie de missiles balistiques iraniens.

Rafael Grossi lors d’une conférence de presse avec le chef de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), Mohammad Eslami, en mars dernier à Téhéran.

Le chef de l’AIEA, Rafael Grossi, a admis la semaine dernière qu’un accord sur la surveillance du programme nucléaire iranien était devenu très limité et fragmenté. Les députés iraniens se sont opposés à l’installation prévue d’une dizaine de caméras de sécurité dans les sites de production de centrifugeuses d’un site à Ispahan.

L’accord sur le nucléaire de 2015 comprenait une série de dates ou de soi-disant clauses d’extinction par lesquelles certaines sanctions contre des entités devaient être levées par l’Occident. Mais il n’avait pas été envisagé en 2015 que l’accord serait si largement violé.

Les sanctions de l’UE doivent expirer le 18 octobre en vertu d’une résolution de l’ONU qui consacre l’accord nucléaire de 2015. Les sanctions " appelaient " l’Iran à ne rien faire pour développer des missiles balistiques qui pourraient transporter des armes nucléaires.

Ils ont également interdit à quiconque d’acheter, de vendre ou de transférer des drones et leurs composants capables de voler à plus de 300 km (186 miles) vers ou depuis l’Iran sans l’autorisation préalable du Conseil de sécurité de l’ONU, autorisation qui n’a pas été accordée.

L’envoyé spécial américain pour l’Iran, Rob Malley.

L’avenir de l’accord est en pleine mutation après des pourparlers à Oman entre les États-Unis et l’Iran qui se sont concentrés sur l’accord de l’Iran de ne pas enrichir d’uranium au-delà de 60 % en échange de la libération par l’Occident de milliards de fonds gelés, ainsi que de certains prisonniers américains détenus par Téhéran.

Le département d’État américain a déclaré qu’aucun accord n’était en vue, mais la négociation a été assombrie par la suspension sans solde de l’envoyé spécial américain pour l’Iran, Rob Malley. Plusieurs médias ont évoqué un problème lié au traitement de documents sensibles.

Malley, ami d’enfance du secrétaire d’Etat Antony Blinken, fut l’un des architectes de l’accord sur le nucléaire iranien. Il s’est vu retirer son immunité diplomatique en attendant une enquête.

Georges Haddad, avec The Guardian, Reuters et AFP