Coréalisée avec le Théâtre du Chêne noir et mise en scène par Robin Renucci, Andromaque offre au spectateur la magie "retenue" des coulisses dans un jeu à scène ouverte où les acteurs se donnent entièrement au jeu. Sur un plateau nu, hommage au texte et au génie de Racine.

Pour le festival Off d’Avignon, les théâtres Avignon accueillent tout genre de représentations; des pièces classiques aux pièces contemporaines, comiques, tragiques et expérimentales, ainsi que des spectacles de danse, de musique et de mouvement. Le Théâtre du Chêne noir se focalise sur les pièces à texte. Ainsi y est jouée Les Chaises d’Ionesco dans une mise en scène captivante et une performance remarquable, bouleversante et attendrissante à la fois; ou encore Lettres à un ami allemand d’Albert Camus où entre jeu et lecture théâtrale, un hommage "juste" est rendu au texte de Camus. Également au programme: Andromaque, coréalisée avec le Théâtre du Chêne noir et mise en scène par Robin Renucci.

Cette mise en scène particulière offre au spectateur la magie "retenue" des coulisses dans un jeu à scène ouverte où les acteurs se donnent entièrement au jeu. Sur un plateau nu, hommage au texte et au génie de Racine: "La guerre de Troie, interminable, s’est achevée dans la honte. Depuis la mort de son mari Hector, tué par Achille, la belle Andromaque est prisonnière de Pyrrhus, roi d’Épire et vainqueur du conflit. Fou amoureux d’elle, et alors qu’il doit épouser Hermione, Pyrrhus tente l’impossible pour séduire Andromaque."

Une construction qui met en relief le jeu de chaque acteur, lui donne le même espace d’expression et dévoile le souffle des coulisses. La sueur, le trac, les émotions, le retour à l’échelle zéro, le dénuement mais aussi l’écoute de l’autre, l’attention, le regard porteur. Les rôles sont infailliblement interprétés par Judith d’Aleazzo (Cléone), Thomas Fitterer (Pylade), Marilyne Fontaine (Hermione), Solenn Goix (Céphise), Julien Léonelli (Oreste), Sylvain Méallet (Pyrrhus), Patrick Palmero (Phoenix) et Chani Sabat (Andromaque).

Le choix de scénographie de Samuel Poncet nous rappelle "l’espace vide" du géant de théâtre Peter Brook, qui a déserté à 96 ans plus tôt ce mois, à quelques jours du Festival d’Avignon, mais dans des costumes distingués qui nous ramènent au XVIe siècle, avec un choix de couleurs harmonieux, créés par Jean-Bernard Scotto.

Et pourtant, un tapis circulaire qui délimite l’espace de jeu nous invite dans l’arène racinienne, là où tout est passion triangulaire, destin indomptable, tragédie et poésie… Un tympanon sonore, instrument à percussion grandiose et pourtant brut, nous ramène aux trois coups du brigadier… ou plus, et impose le silence sacré et respectueux des actes, face aux actions osées et hardies et aux sentiments infaillibles.

Tout au long de la pièce, les acteurs se portent. Ils se suivent des yeux et gardent pour la discrétion des coulisses les ébauches de sourires.

Andromaque se révèle, dans ces vers que l’on a tant de fois mémorisés, dans des monologues fougueux et crus, qui revêtent chacun des personnages d’une parure de pensées propres à lui. Tout est là, dans le "Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes", dans le "Dois-je l’oublier"… mais aussi dans le déchaînement d’une Hermione folle amoureuse ou amoureuse folle interprétée par Maryline Fontaine qui s’écrie, éperdue: "Où suis-je, qu’ai-je fait, que dois-je faire encore?" Elle se décharge peu à peu, au fil des scènes, de ses parures et de son silence, dans une mise à nu d’état d’âme qui ravage la scène et la salle… Dans sa fureur, elle inspire la pitié. Dans sa folie, elle nous attendrit.

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