"L’homme doit s’appuyer sur le passé et tendre vers l’avenir", nous dit Henri Bergson. De ce siècle dernier où notre pays a connu diverses occupations, la famine, des guerres et des misères, nous allons retenir l’édification d’une nation, son impact sur le monde, son rayonnement culturel et sa formidable vitalité. Mois par mois, un peu de ces petites lucioles d’hier pour éclairer notre chemin vers demain.

Le mois de mai est traditionnellement le mois de Marie et c’est le 3 mai 1909 qu’est inaugurée la statue de la Vierge à Harissa. Le 2 mai 1922 est posée par le Général Gouraud la première pierre de ce qui deviendra l’Hôtel-Dieu de France, officiellement inauguré le 27 mai 1923 par le général Weygand. Le 5 mai 1925, l’Université Saint-Joseph fête son cinquantenaire. De nombreuses personnalités françaises et libanaises assistent à la cérémonie au cours de laquelle sera dévoilée la plaque commémorative du passage de Maurice Barrès qui avait décrit cette université comme le "phare de la Méditerranée orientale". C’est dans les salons de l’hôtel Saint-Georges que les Libanais découvrent, stupéfaits, une drôle de machine. Nous sommes en mai 1962 et la compagnie IBM présente ce que l’on appelle un ordinateur.

En mai 1968, le premier institut de yoga est ouvert au Liban par Louise Raaf, une Hollandaise. Le 25 mai 1997, on dira adieu à Laure Moghaïzel, membre du Comité international des droits de l’homme et pionnière en matière de droit des femmes.

Le premier opéra libanais, Les Deux Rois, se produit au Grand Théâtre le 27 mai 1939. Œuvre de Maroun Ghosn mise en musique par Wadia Sabra, le drame lyrique évoque la tragédie de Saul et David. L’école de ballet d’Elena Imaz s’implante au Conservatoire national de Beyrouth en 1952, pour former des générations de jeunes ballerines. Côté spectacles, le grand show de patinage Holiday on Ice est inauguré le 12 mai 1960 à la Cité Sportive devant plus de 2.000 spectateurs. Le compositeur soviétique d’origine arménienne Aram Khatchadourian donne au Liban une série de galas en 1961 auxquels assistent des spectateurs subjugués. Le 15 mai 1965, c’est la troupe du Folklore libano-arménien composée de plus de 100 danseurs, chanteurs et musiciens sous la houlette de Nina Jidéjian, qui triomphe à Lisbonne. Pour la première fois, un spectacle son et lumière illumine, le 27 mai 1965, le palais de Beiteddine. La voix inimitable de Feyrouz résonne sur les vieux murs séculaires dans un spectacle en arabe, suivi d’une version française. Chacune des apparitions à l’étranger de notre diva nationale créera l’évènement. Le 22 mai 1962, elle est longuement ovationnée par plus de 7.000 spectateurs au Royal Albert Hall à Londres. Un spectacle auquel assistent de nombreuses personnalités britanniques. Le 3 mai 1979, c’est à l’Olympia que se produit Feyrouz pour la première fois et le 17 mai 1999, c’est à Las Vegas et devant 11.000 personnes que la chanteuse chante nos titres préférés. Retour en arrière dans le temps avec Gilbert Bécaud, qui deviendra un visiteur régulier et enthousiaste, qui vient mettre le feu à la scène au Casino du Liban le 24 mai 1969. Sans Assi, mais avec toujours le même panache, Mansour Rahbani présente en mai 1987, au Casino du Liban, Saïf 840, dans une mise en scène de Raymond Gébara avec, parmi les acteurs, Antoine Kerbage, Ghassan Saliba et Micheline Daou.

Le Théâtre du Liban au Casino devient un rendez-vous incontournable et accueille chaque année des troupes françaises qui viennent notamment interpréter des pièces classiques, comme Le Misanthrope les 7 et 8 mai 1960. C’est le grand acteur Pierre Brasseur, accompagné de Maria Casares, qui enchante les amateurs avec Cher menteur, en mai 1962, et une pièce de Paul Valéry, Mon Faust, en mai 1964. Côté libanais, le Cercle du théâtre libanais, la troupe d’Antoine Moultaka, présente Richard III à l’occasion du 400e anniversaire de la naissance de Shakespeare, en mai 1964, dans un décor de Michel Basbous, avec Raymond Gébara, Latifé Moultaka, Nadia Khattar et Aïda Khoury. Toujours au Théâtre du Liban, la belle Delphine Seyrig, qui est née au Liban, interprète aux côtés de Jacques François, en mai 1965, Un mois à la campagne de Tourgueniev. Majdaloun 2, qui avait été interdite par les autorités en avril 1960, est enfin autorisée en mai 1970 au théâtre du Phoenicia. Le théâtre libanais poursuit sa lancée avec, en mai 1971, une pièce de Mounir Abou Debs, Le Déluge. Dans une mise en scène de Michel Roux, la comédie de Françoise Dorin, Un sale égoïste, est présentée au théâtre du Casino les 12 et 13 mai 1972, avec Paul Meurisse et Hélène Tossi. Alors qu’on avait encore le goût de rire, les Six Gales inaugurent leur neuvième revue, L’kersi la min? à l’Épi-club en mai 1974. Les réparties d’Alec Khalaf et Yvette Sursock, dans des sketches qui croquent la réalité libanaise d’alors, attirent un grand nombre d’amateurs. Malgré la guerre qui fait rage, Dar el Fan, magnifique institution culturelle, reprend ses activités en mai 1980 et présente au Théâtre de Beyrouth, à Aïn el Mreïsseh, Chronique de l’An 1936, avec Roger Assaf et la troupe Al Hakawati.

La scène, mais aussi le grand écran qui passionne les Libanais depuis toujours. Quoique loin des films étrangers qui ont le vent en poupe dans les nombreuses salles qui se multiplient Place des Canons et à la rue Hamra à partir des années 60, le cinéma libanais trouve petit à petit son chemin. Le 7 mai 1957, le drapeau libanais flotte pour la première fois au Festival de Cannes avec Ila Ayn, (Vers l’inconnu), un film de Georges Nasser. La projection attire beaucoup de curieux venus voir ce que le Liban a à dire. Les critiques sont moyennes, mais les encouragements au rendez-vous. La musique de Toufic Succar est saluée. En 1962, c’est un autre film libanais parlant français qui participe au Festival. Produit par Mario et Armand Araktingi et mis en scène par Georges Nasser, Le petit étranger, d’après une histoire de Ramez Noujaim et sur une musique de Bob Azzam, est salué par les critiques. Aux côtés de Laura Azar, Gaston Chikhani et Chakib Khoury, un débutant de 14 ans, Vasso Gabriel, attire toutes les sympathies. Une triste nouvelle cependant tombera en mai 1966 avec la décision de ne plus organiser de Festival du cinéma international à Beyrouth faute de budget. Maigre consolation, Beyrouth est nommé, en 1974, Capitale internationale du cinéma. Retour à Cannes, en 1982 avec, dans le cadre de la 35e éditio et dans la section Un certain regard, un film qui ne passe pas inaperçu: Petites guerres de Maroun Baghdadi, très bien accueilli par la critique. Baghdadi, parti trop tôt, récidivera en mai 1991 avec Hors la vie, toujours à Cannes.

En mai, les restaurants inaugurent leurs terrasses et la night life gagne en puissance. Le 10 mai 1959 et pour la première fois au Liban, une course de garçons de café met en concurrence 120 serveurs qui vont, entre autres épreuves, courir avec un plateau la distance entre le Lucullus et le Saint-Georges. Les spectateurs sont aux anges. Au cours d’une soirée de gala réunissant 2.500 personnes au Casino du Liban, Nohad Cabbabé est élue Miss Liban 1962, volant ainsi la tiare aux 19 autres concurrentes. Le 23 mai 1963, la brasserie et malterie Almaza, fondée en 1933, inaugure ses nouvelles installations ultramodernes. Mai est également le mois des défilés de mode qui revêtent la forme de dîners de gala où les élégantes se pressent. En 1957, Mme Djenny présentera sa collection Printemps-Été lors d’un dîner caritatif au profit des vieillards et des orphelins russes. En mai 1965, c’est la collection Carven qui est présentée au Phoenicia lors d’un gala en présence de Mme Carven. Pour la première fois au Moyen-Orient, se tient au Liban, en mai 1967, un Festival de la coiffure et de la haute couture libanaises auquel participent 27 coiffeurs et 15 grands couturiers. Quelques années plus tard, en mai 1972, c’est Guy Laroche en personne qui présente sa collection, et Jean Patou en fera autant en mai 1974.

Alors que le Conseil national du tourisme continue d’organiser des semaines libanaises partout dans le monde pour promouvoir le Liban, l’Office du tourisme libanais à Paris est inauguré le 22 mai 1967, avec une décoration de Sami el Khazen. Mais les visiteurs n’ont pas attendu cette expansion pour accoster sur nos rivages. Gérard de Nerval est l’un des premiers, après Lamartine, à fouler le sol libanais en mai 1843. Il écrit ainsi dans son Voyage en Orient qu’il n’avait jamais rien connu de plus animé, de plus vivant que le port de Beyrouth. Il s’intéresse particulièrement aux traditions libanaises, aux différentes religions et à notre façon de vivre et ressort de ce voyage marqué à vie.

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