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Toulouse s’apprête à plonger au cœur d’une période fascinante et controversée de son histoire avec l’exposition "Cathares" qui ouvrira ses portes le 5 avril prochain. Les guillemets ont ici toute leur importance, soulignant d’emblée les débats passionnés que suscite ce pan du passé médiéval de la région. 

Orchestrée par la mairie de Toulouse, cette exposition phare entend valoriser l’identité de la ville rose et de l’Occitanie, dont les "Cathares" font indéniablement partie. Avec malice, l’adjoint en charge des musées, Pierre Esplugas-Labatut, voit même dans la mentalité un brin frondeuse des Toulousains une forme d’héritage de cet esprit "cathare".

Au-delà du folklore, la commissaire Laure Barthet promet un voyage captivant au cœur des turbulences du treizième siècle, quand une croisade fut lancée par le pape Innocent III contre les hérétiques du Midi. Un scénario digne de Game of Thrones, mêlant rebondissements militaires, persécutions et lutte du faible contre l’ordre établi. De quoi expliquer la fascination qu’exerce cette époque, source d’inspiration pour nombre d’artistes.

Répartie sur deux sites emblématiques de Toulouse, le musée Saint-Raymond et le couvent des Jacobins, l’exposition promet une immersion totale. La première partie retrace la croisade elle-même, de 1208 à 1229. Dispositifs numériques et reconstitutions permettent de s’imprégner de cette aventure guerrière et de plonger dans la Toulouse médiévale, trois fois assiégée, mais jamais vaincue.

Le deuxième volet se penche sur les dernières avancées de la recherche historique. Et c’est là que les choses se corsent. Car le terme même de "Cathares", jamais utilisé à l’époque, ne se serait imposé qu’au dix-neuvième siècle, sous la plume de certains historiens. Quant à la réalité de l’hérésie cathare, elle est aujourd’hui fortement remise en question.

Pour une majorité d’experts, comme Alessia Trivellone de l’université de Montpellier, l’accusation d’hérésie n’aurait été qu’un prétexte pour permettre au pouvoir papal et royal d’asseoir sa domination sur un Midi jugé trop indépendant. Les sources de l’époque, trop partiales, ne prouveraient en rien l’existence de véritables communautés hérétiques.

Une lecture que réfutent certains, à l’instar de Pilar Jimenez, auteure d’un ouvrage défendant la thèse d’une authentique dissidence chrétienne avec son clergé propre. L’exposition, en institution "neutre et scientifique", entend exposer les termes de ce débat sans le trancher.

En explorant les zones d’ombre d’une histoire que l’on croyait écrite, Cathares promet de passionnants questionnements. Et démontre que le Moyen-Âge n’a pas fini de nous surprendre et de résonner avec notre époque, friande de récits mêlant vérités et légendes. Les mystères des Cathares n’ont assurément pas fini de faire parler d’eux.

Avec AFP