En pleine tempête, le Liban lance une campagne audacieuse pour promouvoir le tourisme. Mechouar, initié par le ministère du Tourisme, se veut un message d’espoir et de résilience dans un contexte des plus difficiles. Ce terme, qui signifie promenade en arabe, évoque l’idée d’une escapade agréable, d’un moment de répit. Pourtant, au regard des défis que traverse le pays, ce Mechouar est loin d’être un long fleuve tranquille.
Le Liban fait face à une crise économique et financière sans précédent, à des tensions accrues à sa frontière sud et à une instabilité sécuritaire qui pèse lourdement sur le secteur touristique. Dans ce contexte, la campagne Mechouarse veut un rappel des merveilles du pays, une invitation à découvrir ses trésors malgré les turbulences. Un pari audacieux qui suscite des réactions mitigées, entre ceux qui saluent cette initiative porteuse d’espoir et ceux qui critiquent le décalage entre le message optimiste et la réalité du terrain.
Au cœur de cette campagne, un logo emblématique attire tous les regards. Derrière ce symbole fort se cache l’histoire extraordinaire de Mouna Bassili Sehnaoui, une pionnière qui a façonné l’identité visuelle du pays.
Née en 1945 à Alexandrie, en Égypte, Mouna Bassili Sehnaoui a montré très tôt un talent remarquable pour les arts graphiques. Après des études à l’Université américaine de Beyrouth, elle a obtenu un Bachelor of Fine Arts en design graphique à l’Université d’Arizona aux États-Unis. Cette expérience internationale a nourri sa créativité et élargi sa perspective.
De retour au Liban au début des années 1970, Sehnaoui a intégré le Conseil national du tourisme, où elle a pris la tête du département d’art graphique. C’est là qu’elle a créé le logo désormais indissociable du Liban, utilisé encore aujourd’hui sur toutes les publications du ministère du Tourisme. Mais son influence ne s’est pas limitée à ce seul projet, aussi emblématique soit-il.
Mouna Bassili Sehnaoui a joué un rôle essentiel dans la définition de l’identité visuelle libanaise. Ses créations, des timbres aux affiches, en passant par les livres promotionnels, ont circulé pendant l’âge d’or du pays, avant que la guerre civile ne vienne tout bouleverser. Son style distinctif, puisant dans l’iconographie et la mythologie byzantine, perse et phénicienne, a contribué à façonner l’image du Liban dans le monde entier.
Mouna Bassili Sehnaoui n’est pas seulement une artiste talentueuse, elle est aussi une pionnière qui a ouvert la voie aux femmes dans le domaine du design graphique au Moyen-Orient. Première femme designer graphique formée académiquement à établir une pratique dans la région arabe, elle a brisé les barrières et les stéréotypes, prouvant que le talent n’a pas de genre.
Son travail exceptionnel a été récompensé par de nombreux prix et distinctions. Ses œuvres sont exposées dans des collections prestigieuses, tant dans les musées locaux qu’internationaux, témoignant de la portée de son art. Mais c’est surtout son impact durable sur l’identité visuelle du Liban qui restera son plus grand héritage.
Aujourd’hui, alors que le Liban traverse une période tumultueuse, la campagne Mechouar du ministère du Tourisme s’efforce de mettre en lumière les merveilles du pays. Un rappel que même dans les moments les plus sombres, la beauté et la résilience du Liban ne peuvent être éclipsées.
Derrière ce message d’espoir, c’est aussi l’héritage de Mouna Bassili Sehnaoui qui transparaît. Le logo qu’elle a créé il y a près de 50 ans, devenu un symbole incontournable, incarne l’essence même du Liban: sa richesse culturelle, son histoire et, surtout, sa capacité à se réinventer face à l’adversité.
À travers la campagne Mechouar et son logo emblématique, l’œuvre de Mouna Bassili Sehnaoui continue de briller, invitant le monde à découvrir les trésors du Liban, contre vents et marées.
