Les élections législatives à Beyrouth II constituent un défi majeur pour le Hezbollah dont le candidat Amine Sherri, au scrutin de 2018, avait réussi à obtenir le plus grand nombre de voix. Amine Sherri avait remporté 22.961 voix, devançant l’ancien Premier ministre et chef du Courant du Futur, Saad Hariri, arrivé deuxième sur la liste "l’Avenir de Beyrouth" avec 20.751 voix. Cette victoire a eu un énorme impact, non seulement au Liban, mais au niveau de la région. Aussitôt les résultats parus, le commandant de la Force Quds des Gardiens de la révolution iranienne, le général Qassem Soleimani, s’était empressé de déclarer à l’époque: "À Beyrouth, et pour la première fois dans l’histoire du Liban, une figure chiite attribuée au Hezbollah a remporté le siège brigué, alors que certains candidats qualifiés d’agents de l’Iran ont obtenu plus de voix que les autres candidats." Et de poursuivre, en commentant les élections au Liban dans leur ensemble, que "le Hezbollah a gagné pour la première fois 74 sièges au Parlement sur 128 sièges".

Partant, le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, considère que la victoire aux élections de 2018 est un indicateur pour les prochaines élections, la première étant les élections législatives qui se tiendront à la mi-mai. Il estime que les résultats obtenus par le parti au Parlement actuel, soit du vivant du général Soleimani avant que les États-Unis d’Amérique ne l’assassinent au début de 2020, devraient rester semblables aux résultats escomptés des élections à venir. Il est connu, parmi les experts du dossier du parti, qu’après l’assassinat de Soleimani, Nasrallah est devenu le numéro un de l’appareil sécuritaire iranien à l’extérieur de l’Iran. Ces experts disent qu’Ismail Qaani, le général iranien qui a succédé à Soleimani à la tête de la Force Al-Qods, arrive en deuxième position après Nasrallah dans la hiérarchie établie par le dirigeant iranien, Ali Khamenei, concernant les armes iraniennes dans la région et dans le monde.

Selon ces experts, comprendre la portée de la victoire du Hezbollah aux élections de 2018 explique pourquoi le secrétaire général du parti a décidé de prendre personnellement les rênes de la bataille électorale. Après avoir lui-même annoncé les noms des candidats du parti dans tout le Liban, il a entamé de longues réunions avec les cadres du parti, qui se comptent par milliers, afin de les orienter et les mobiliser pour mesurer l’importance des prochaines élections et leur impact sur l’avenir du parti.

Parmi les plus importantes réunions tenues par Nasrallah au cours de ce mois figure celle durant laquelle il a souligné que les prochaines élections seront "l’une des batailles politiques les plus importantes et les plus dangereuses, dont les résultats détermineront la suite des événements". A ce titre, il a déclaré que "le Hezbollah mènera la bataille dans la deuxième circonscription de Beyrouth uniquement avec le Mouvement Amal et le Courant patriotique libre". Or, que se cache derrière cette déclaration?

Selon des sources bien informées, le Hezbollah a commencé à tenir des réunions secrètes avec d’autres listes qui se présentent ouvertement aux élections sous des slogans contre le parti. Le but étant de conclure secrètement un accord avec le parti, afin que les votes soient échangés selon un plan judicieux qui assurera la victoire du candidat du CPL dans cette circonscription, similairement à ce qui s’était passé en 2018, lorsque Edgar Traboulsi a remporté le siège évangélique. Aujourd’hui, le candidat du CPL n’est autre que Traboulsi. De même pour les deux candidats du duopole chiite en 2018 qui se représentent cette année également, à savoir les députés Amine Cherri du Hezbollah et Mohamad Khawaja du mouvement Amal.

Aussi, selon ces mêmes sources, les négociations en cours avec une liste dirigée par un député actuel sont paradoxales, dans la mesure où ce député mène actuellement une grande campagne de propagande contre le Hezbollah. Campagne que le parti a choisi d’ignorer pour la simple raison qu’il s’intéresse à l’accord potentiel qu’il pourra sceller avec ce député qui était tête de liste en 2018, mais l’a emporté seul, bénéficiant des voix des autres candidats sur cette liste qu’il menait.

En revanche, le président Fouad Siniora poursuit ses efforts pour constituer une liste dans cette circonscription en essayant de mobiliser les forces souverainistes face au Hezbollah, lequel cherche à obtenir une victoire peut-être supérieure aux élections précédentes, ce qui menacera l’avenir du Liban pour de nombreuses années à venir et permettra à l’Iran d’avoir une mainmise absolue sur le Liban.